Suite de drzz en Israël : Arrivée (1) / Tel Aviv (2) Nazareth (3) Haïfa (4)
J’ai eu l’opportunité de visiter de nombreuses villes, parmi les plus célèbres de la planète, comme New York, Paris ou Rome. Mais aucune n’arrive à engendrer le même enthousiame, la même fièvre que Jérusalem. Pendant des milliers d’années, ce qui a fait tenir les communautés juives dispersées de par le monde a été ce rêve fou de revoir, de rentrer à nouveau dans Jérusalem, la Ville Sainte, capitale du monde juif depuis toujours. Depuis plus de deux mille ans, les Chrétiens vénèrent ce lieu où Jésus enseigna dans le Temple et trouva la mort. Il n’y a pas d’autre ville, dans le monde, qui ait suscité autant de convoitises. Lorsque les musulmans virent l’importance de Jérusalem pour les deux autres religon révélées, ils prétextèrent que Mahomet était monté au cieux depuis le Mont où se dressait le Second Temple juif. En réalité, Mahomet était mort avant que les musulmans ne conquièrent Jérusalem, mais il fallait un prétexte aux clercs musulmans pour asservir les Juifs.
Histoire mise à part, Jérusalem est aussi une ville moderne, la capitale de l’Etat hébreu, même si les idiots du reste du monde ne la reconnaissent pas. C’est d’ailleurs à ce propos que je me suis entretenu avec mon chauffeur de taxi. Sur la route menant de Tel Aviv à Jérusalem (45 minutes), j’ai eu le temps d’apprendre la célèbre chanson "Jérusalem d’or" – et en hébreu s’il vous plaît ! – histoire de me préparer à rencontrer la ville la plus mythique de l’histoire humaine.
Je n’ai pas été déçu. Par chance, mon hôtel donnait sur la rue de Jaffa, l’une des plus animées de la ville. A peine mes bagages posés, je me suis rué vers la vieille ville, comme entraîné par l’Histoire. La Grande Jérusalem vous accueille avec ses remparts du XVe siècle et ses immenses portes creusée dans la pierre, comme si le temps avait changé les paysages alentours sans effleurer la ville sainte. Je suis entré dans Jérusalem par la porte de Jaffa, afin de découvrir le quartier chrétien. Rien à dire, les Franciscains ont le sens de la mise en scène. Leur centre de recherches diffusait "la passion de Saint Jean" de Bach à plein volume. Avec les choeurs magnifiques de ce chef d’oeuvre de la création occidentale, j’ai été comme happé par le lieu….
… et par les marchands de souvenirs. Un conseil : il faut déambuler dans les rues des villes arabes (ici Chrétiens et musulmans arabes, dans leurs quartiers respectifs) avec un minimum de préparation. Première règle, ne jamais croire que l’on vous hèle par bienveillance. Seconde règle, toujours se rendre dans un magasin à plusieurs. Lorsque l’un de vous marchande un bibelot, il faut que les autres fassent mine sortir du lieu, de manière à ce que le vendeur, qui jette toujours des coups d’oeil sur vous, croie que vous allez quitter son magasin. Prix raisonnables garantis, la technique a marché avec les Arméniens, les Chrétiens et les musulmans arabes. Pas avec les Juifs, eux ne vous font pas payer deux fois plus cher qu’à la normal dès que vous avez l’air d’un touriste. Si vous ne suivez pas mon conseil, et que vous êtes pétris de bons sentiments, vous allez droit à la ruine. Voyez ces évangélistes américains, le coeur ouvert pour ce voyage spirituel, qui parcouraient les ruelles étroites en arborant fièrement leur nom accroché à leur T-shirts. Une technique chère à tous les voyages de groupe, mais surtout prisée par les vendeurs de rues qui apostrophaient les malheureux Chrétiens pour chaque mètre qu’ils faisaient. Un enfer !
Dès le premier jour, j’ai traversé le quartier chrétien et musulman pour me rendre de l’autre côté, sur les flancs du monts des Oliviers. J’avais lu qu’on avait de là l’une des plus belles vues de Jérusalem, et je tenais à m’asseoir sur un escalier ou un mur et contempler, des heures durant, Jérusalem. Pour réaliser où je me trouvais. En chemin, je suis arrivé dans le quartier musulman. L’un des plus animés de la ville, aussi l’un des plus chaotique, tant il semble être resté figé il y a six siècles en arrière.
Plus tard, assis sur un mur, à côté de la basilique russe consacrée à Marie Madeleine, à quelques dizaines de mètres du fronton majestueux de la basilique de toutes les nations, je me suis laissé aller à contempler le soleil se couchant sur les tombeaux juifs du Mont des Oliviers, caressant la porte dorée, le lieu où les Juifs pensent que le Messie reviendra le moment venu, s’amusant sur les remparts, avant de sublimer le dôme du Rocher et s’enfuir, plus loin, vers la nouvelle Jérusalem, celle qui est tournée vers le futur. Là, à des kilomètres de chez moi, sur cette pente du Mont des Oliviers, à quelques encablures du Jardin de Gethsémani, à quelques jets de pierre du Tombeau de la Vierge, j’ai compris pourquoi les Juifs vénèrent tant cette ville, et en ont rêvé pendant des siècles, quand les pères transmettaient à leurs fils, les mères à leurs filles, cet espoir toujours renouvelé de pouvoir revenir là où je me trouvais, et jeter un regard ému sur la ville de Jérusalem, le mont du Temple, assis devant l’Eternel, et le Mont de Sion, sur la gauche, où est enterré le roi David.
J’ai encore envie d’écrire sur le Mur des Lamentations, sur le Saint Sépulcre, sur le Dôme du Rocher, la tombe de David, et tant d’autres monuments qui enflamment l’imagination. Mais je vais m’arrêter là pour aujourd’hui. Car rencontrer Jérusalem pour la première fois de sa vie est déjà une expérience hors du commun. Plus que tout ce que pourrais écrire. Pourquoi gâcher un tel instant en poursuivant le récit ?
Là, assis contre le flanc du Mont des Oliviers, je remplissais mes poumons, comme on s’abreuve d’eau fraîche dans le désert. Et, comme une petite voix au lointain s’envolant au-dessus de la ville, j’ai cru entendre le vent murmurer :
Aussi longtemps qu’au fond du cœur
l’âme juive vibre,
vers les confins de l’Orient
un œil sur Sion observe.
Nous n’avons pas encore perdu notre espoir
vieux de deux mille ans,
de vivre en peuple libre sur notre terre,
terre de Sion et de Jérusalem.
Vivre en peuple libre sur notre terre,
terre de Sion et de Jérusalem.
A suivre : drzz en Israël (6) : Jérusalem – le quartier musulman