Publié par Dreuz Info le 2 octobre 2007

Par Helios

” L’Europe détient à son corps défendant les clés de la paix et de la stabilité dans le golfe persique », c’est ce que j’écrivais le 25 février dernier dans un article publié sur le blog DRZZ sous le titre « l’heure de vérité ». Dans un autre passage du même article on peut lire ceci : « Les sanctions actuelles, à la charge quasi exclusive des américains, font déjà mal, on assiste à une fuite des capitaux hors de l’Iran et parallèlement une réduction marquée de la ligne de crédit, le régime manque d’argent pour assurer les obligations du gouvernement et financer les activités subversives à l’étranger. Cependant  sa marge de manœuvre quoique réduite ne menace pas à court terme sa survie. Le poids de l’Europe ajouté à celui de l’Amérique fera pencher la balance et ni la Russie ni la Chine ne seront en mesure de rétablir l’équilibre. »

 Il se trouve que Nicolas Sarkozy pense exactement la même chose, contrairement à nombres de gens il fait confiance aux sanctions et de ce fait ne pense pas que la guerre soit inévitable. Cette position est très proche, pour ne pas dire identique à celle de Georges Bush, cependant ce dernier n’exclut pas la solution militaire en cas d’échec.

 Mais Bush et Sarkozy se sont mis d’accord sur un autre point, corriger l’erreur historique dont les présidents Giscard et Carter se sont rendus responsables, soit permettre à une tyrannie islamiste de prendre le pouvoir dans un état clé du Golfe Persique. Cet objectif n’est pas claironné mais il découle naturellement des mesures mises en œuvre pour convaincre les mollahs de renoncer à la bombe.

 La Russie et la Chine s’opposent aux sanctions pour les mêmes raisons, elles savent qu’elles entraîneraient inévitablement la disparition du régime des mollahs, elles verraient d’un mauvais œil s’instaurer en Iran un gouvernement démocratique tourné vers l’occident.

 Les évènements des six derniers mois ont dans l’ensemble renforcé le camp occidental. L’alignement des astres est favorable, mentionnons certaines réalités nouvelles:

  • Les terroristes en Irak et en Afghanistan perdent du terrain malgré l’aide de l’Iran, le départ précipité des armées occidentales de ces deux pays n’aura pas lieu.
  • Les pays arabes à l’exception de la Syrie s’opposent résolument à l’Iran, ils achètent des armes à l’oncle Sam et se montrent très à l’aise de faire alliance avec lui.
  • La cause palestinienne sort très affaiblie du conflit sanglant opposant le Hamas au Fatah, par sa victoire à Gaza le Hamas s’est piégé lui-même, il est actuellement hors d’état d’influer sur le cours des événements.
  • Le gouvernement pro-occidental au Liban a tenu le coup malgré les menées de l’Iran et de la Syrie.
  • Israël a rétabli sa crédibilité au chapitre de la dissuasion, ses forces armées ont été réformées, des opérations en profondeur sur le territoire syrien mettent leurs ennemis sur la défensive ; l’Iran aura de la difficulté à convaincre la Syrie d’entreprendre des actions militaires contre Israël.
  • Le départ de Chirac et l’avènement de Sarkozy permet la création d’un front commun occidental.
  • Le Congrès et la Maison Blanche n’entretiennent pas de divergences fondamentales sur la conduite à tenir face aux mollahs.

 Face à des conditions de moins en moins favorables les mollahs n’ont pas modifié leur trajectoire, ils se contentent de manœuvres de diversion tel l’accord récent avec El Baradei pour empêcher une nouvelle résolution de l’ONU imposant de nouvelles sanctions, cependant une telle résolution n’aurait tout au plus qu’un effet moral puisque d’une part, si elle était adoptée, elle n’empêcherait pas la Russie et la Chine de l’ignorer, et d’autre part si elle était bloquée, les lourdes sanctions que le monde libre envisage seraient quand même mises en place.

 Les mollahs n’ont pas le choix, la survie de leur régime leur impose de se doter de la bombe, le danger pour eux n’est pas extérieur, il est intérieur, il découle de la corruption qui affecte les détenteurs du pouvoir à différents échelons et de leur incapacité d’empêcher la détérioration graduelle de la situation intérieure et la révolte qu’elle suscite. L’appareil répressif quoique puissant ne peut être maintenu sans un apport constant d’argent. Ne pouvant compter sur les ressources du pays, ils se voient obligés de regarder du côté de leurs voisins du Golfe, bien plus riches mais beaucoup plus faibles. Le chantage nucléaire couplé aux menaces d’attentats leurs permettraient d’imposer un régime de protection sur les roitelets du pétrole et même sur l’Arabie Saoudite. Cependant la survie du régime des mollahs n’est pas seul en cause autrement ils n’auraient pas refusé de négocier avec les occidentaux les avantages économiques mirobolants que ces derniers leur offraient moyennant leur renonciation à l’arme nucléaire; de toute évidence les visées impérialistes des mollahs les incitent à se doter de la bombe.

 L’argument avancé par Sarkozy est d’une logique implacable, la seule avenue pour forcer les mollahs à renoncer à la bombe sans recourir à la guerre est l’imposition de sanctions efficaces, des sanctions trop molles ne décourageront pas les mollahs pavant ainsi la voie à la solution militaire. L’Allemagne qui rechigne se voit offrir le choix entre réduire ses échanges commerciaux en solidarité avec ses partenaires ou assister à la ruine de ses intérêts économiques en Iran en cas de guerre. Un des éléments dont il faudra également tenir compte est la capacité des monarchies du Golfe de baisser les prix du pétrole en inondant le marché. Une éventuelle baisse des prix, pour peu qu’elle soit durable, pourrait s’avérer catastrophique pour les mollahs.

 Des sanctions efficaces n’auraient pas pour effet de créer une crise aiguë en Iran mais un marasme économique lentement progressif qui inciterait les détenteurs du pouvoir et leurs supporters à mettre à l’abri leur fortune, l’argent venant à manquer il sera difficile d’alimenter l’appareil répressif, le mécontentement et la révolte qui l’accompagnent ne rencontreraient pas de forte opposition, un changement politique profond pourrait s’ensuivre.

 Les sanctions ont plus de chances de provoquer un changement de régime, le bombardement des sites nucléaires et des bases des pasdarans permettraient de briser les capacités de nuisance des mollahs dans la région mais sans affaiblir leur appareil répressif. Il est d’ailleurs peu probable que ces bombardements reçoivent l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU, un grand nombre de pays les considèreraient comme illégaux, l’Iran pourrait y trouver un appui moral et tenter de mobiliser les iraniens contre « les agresseurs ». C’est pourquoi je demeure convaincu que les mollahs préfèrent de loin les bombardements aux sanctions.

 Ceux qui critiquent les sanctions en invoquant le cas de l’Irak ne tiennent pas compte du fait que les sanctions imposées à Saddam n’ont pas été respectées. Bien des pays, la France en tête, ont fermé les yeux sur le trafic lucratif qui a permis à Saddam de dépasser les quotas imposés et de s’approprier les recettes du programme pétrole contre nourriture, les enjeux ne semblaient pas alors aussi fondamentaux. D’autre part l’Irak est trois fois moins peuplé que l’Iran mais sa production pétrolière était à peine inférieure, par conséquent Saddam a pu encaisser les coups sans être sérieusement ébranlé. L’Iran de son côté compte 80 millions d’habitants, en majorité des jeunes sans emploi et sans avenir, il ne peut tolérer une baisse même légère de revenus. Ses visées expansionnistes l’amènent à financer à coup de milliards, le Hezbollah, le régime syrien, le Hamas et à fomenter des troubles un peu partout dans le monde y compris en Amérique Latine, cette « générosité » s’exerce aux dépens du peuple iranien et nul doute qu’elle attise sa colère.

 L’Iran a parié sur la lâcheté des pacifistes et sur le « chacun pour soi » des pays occidentaux, les défaitistes et les intérêts économiques égoïstes ont été jusqu’à présent ses meilleurs alliés, cependant les européens prennent conscience des dangers incarnés par des mollahs possesseurs d’armes nucléaires. Le virage opéré par Sarkozy est caractéristique d’un nouvel état d’esprit, après tout les missiles iraniens de longue portée et leurs charges atomiques seront aussi pointés sur les capitales européennes. Madrid, Rome ou Berlin se retrouveront dans le collimateur et rien n’empêchera les mollahs de faire chanter les européens.

  À bien des égards la situation actuelle ressemble à celle qui a prévalu au début des années 80, au moment où les soviétiques menaçaient l’Europe avec les missiles SS 20 de moyenne portée. Il s’en est fallu de peu que le chantage nucléaire ne fonctionne et que L’URSS n’échappe à la décomposition en vampirisant l’Europe occidentale. L’alliance de l’Amérique et de la France a permis d’écarter le danger, pour convaincre les européens et réduire au silence les pacifistes enragés, Mitterrand a su trouver la bonne formule : « les pacifistes sont à l’Ouest et les missiles sont à l’Est ! » Il a, à cette occasion, aidé Reagan à installer ses fusées Pershing et ses missiles de croisière. L’équilibre a ainsi été rétabli et le chantage neutralisé. Quelques années plus tard l’URSS s’écroulait.

 Sarkozy et Bush se partagent la même mission, celle de faire échec à une entité totalitaire qui, pour échapper à sa propre décomposition, développe fébrilement l’outil par excellence de la menace et du chantage.

 

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