Publié par Dreuz Info le 26 janvier 2008

file_284992_27526.jpgLe bloc-notes d’Ivan Rioufol du 25 janvier.

Lucide, Jacques Attali ? Oui, quand il décrit la France immobile
, devenue une «société de connivence et de privilèges». Président de la commission pour la libération de la croissance, son rapport, rendu mercredi, décrit bien le mal économique français. Cette remarque : «l’enrichissement n’est pas un scandale, seule l’est la pauvreté». La fougue libérale est même réjouissante, ve­nant de celui qui, en 1982, défendit les nationalisations. Mais l’in­sistance à vouloir relancer l’im­migration affaiblit la crédibilité du diagnostic.

Soutenir l’«urgence à ac­cueil­lir des étrangers, pour combler
(des) lacunes démographiques et développer des innovations» re­vient à vouloir ignorer une inquiétude des gens face aux repliements identitaires nés d’une immigration sacralisée. Si la gauche universaliste se flatte d’être insensible à la préservation des civilisations, voir ce même relativisme défendu par un repenti des «110 propositions» socialistes fait douter de sa conversion. Faut-il rappeler qu’un peuple n’est pas interchangeable ?

En fait, ce sont tous les experts de la commission
qui ont oublié cette évidence, en accordant la priorité au paiement des retraites et à la croissance. Alors que la question posée, y compris par le chef de l’État, est la consolidation d’une culture partagée permettant de vivre ensemble, l’attrait matérialiste pour la table rase, partagé par une gauche «antiraciste» et un capitalisme hautain, risque de frustrer les Français en quête de destin.

L’indifférence pour ce qui constitue l’âme
d’un peuple se retrouve d’ailleurs dans d’autres propositions. La commission suggère ainsi que chaque élève sorte de sixième en maîtrisant le français, la lecture et l’écriture, mais aussi l’anglais, l’économie, l’informatique. Or, elle omet l’histoire et la mémoire commune. Le choix de supprimer les départements, porteurs d’une forte proximité, procède de ce désintérêt.

La vision comptable d’une immigration
destinée à équilibrer les comptes sociaux est un non-sens quand elle conduit à fragiliser la solidarité nationale. Qui peut assurer que les immigrés de demain accepteront de payer les retraites de leurs hôtes ? La France court à son éclatement en mettant son identité à l’encan, au prétexte que 50 000 nouvelles entrées par an apporteraient 0,1 % de croissance. Il faut oser penser une autre immigration : celle qui, pour l’essentiel, ne ferait que passer.

La jubilation avec laquelle certains médias
ont accueilli la proposition de relancer «l’immigration, inévitable, indispensable» (Le Monde) s’accommode du flou entretenu sur le sujet. Non seulement l’échec de l’intégration des populations extra-européennes est relativisé par une bien-pensance qui n’y voit qu’un effet du chômage, mais les chiffres se prêtent à des contestations qui conduisent à sous-estimer le solde migratoire. Alors que le pays accueille officiellement 200 000 personnes chaque année (clandestins et demandeurs d’asile non compris), le discours convenu qui a trouvé écho auprès d’Attali assure que la France n’est pas un pays d’immigration massive. Comment élaborer une politique dans cette opacité acceptée ?

La faiblesse du diagnostic sur cette question
, qui entache la cohérence que revendique la commission pour l’ensemble de ses 316 propositions, se retrouve dans l’élaboration du plan Espoir banlieues, présenté mardi par Fadela Amara. La cacophonie montre le désarroi des politiques devant une réalité mal assumée : le ministre de la Ville a son idée, qui n’est pas celle de sa secrétaire d’État, tandis que le ministre de l’Intérieur en a une autre qui ne semble pas convenir au président de la République, qui présentera lui-même son plan le 8 février…

Ce qui reste indicible est pourtant vérifiable :
il existe désormais des Français qui se vivent comme étrangers à la nation. Deux France apparaissent, en dépit des dénégations des «sociologues». Le 11 janvier, à Bruxelles, des institutions musulmanes européennes dont l’UOIF pour la France ont signé une charte qui stipule, concernant les pays d’accueil : «Lorsque les lois en vigueur s’opposent éventuellement aux pratiques et règles islamiques, les musulmans sont en droit (le projet initial disait : «sont tenus») de s’adresser aux autorités pour expliquer leurs points de vue et exprimer leurs besoins et ce dans le but de trouver les solutions les plus adaptées.» Un encouragement à contester les lois.

Il faut répondre à cette fracture occultée
et à ce risque de subversion. Même le mouvement d’émancipation Ni putes ni soumises, créé par Fadela Amara, cède la place dans les cités à un «féminisme voilé», tandis que le nombre de quartiers «sensibles» (751) ne cesse de croître. Les solutions ne se résument pas à des rénovations urbaines ou à de nouvelles lignes de bus. L’État doit reprendre pied dans ces territoires autonomes, qu’une constante immigration éloigne toujours davantage. Où voit-on que celle-ci pourrait être le «puissant facteur de croissance» vanté avec tant d’autosatisfaction par Attali ?

La France ne peut vivre recroquevillée
, et la commission a raison de soutenir que les Européens y ont leur place. Mais pourquoi «supplier» (Attali, hier) les étrangers de venir occuper les 500 000 emplois vacants, alors que le pays compte plus de deux millions de chômeurs, surtout dans les cités ? Laisser croire que ceux-ci seraient inaptes aux métiers du bâtiment, du commerce, de la restauration, de la santé, de l’agriculture témoigne d’un mépris qui s’ajoute au sentiment d’abandon de la jeunesse. «Il faudra se lever le matin, la vie ce n’est pas glander», a expliqué mardi Nicolas Sarkozy, à Sartrouville (Yvelines). Cette politique paraît autrement plus convaincante.

http://neoconexpress.canalblog.com/archives/2008/01/25/7698634.html#comments

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