L’analyse politique de Me Bertrand Ramas-Muhlbach
Le 16 juin 2009, le Président américain Obama a salué le discours prononcé 4 jours plus tôt par le Premier Ministre Israélien (désormais favorable à la création d’un Etat palestinien). Il a toutefois renouvelé ses exigences quant à l’arrêt des constructions en Judée Samarie, constitutives, selon lui, d’un obstacle, à toute perspective de paix.
Loin d’ébranler le ministre des Affaires étrangères, cette recommandation américaine n’a pas empêché Avigdor Lieberman de confirmer à la secrétaire d’Etat Hilary Clinton, qu’il n’y aurait aucun gel des constructions en Judée Samarie, (le 17 juin 2009), en vertu d’accords passés en ce sens avec la précédente administration américaine (ce qu’a immédiatement démenti l’interlocutrice). Pour Avigdor Liberman, «des gens vivent et meurent en Judée Samarie» et il n’est pas possible d’empêcher l’extension naturelle des implantations même si le désaccord avec l’administration américaine peut être réglé par une volonté mutuelle «de trouver une formule consensuelle».
Sur le plan linguistique, les aménagements effectués par Israël en Judée Samarie sont généralement repris sous le terme de « colonisation » parce que les mots implantations, constructions et colonisations se traduisent en anglais par le même terme «settlements». Aussi, est il confortable pour ceux qui se livrent à une critique systématique de la politique israélienne, d’employer ce mot qui suggère à la fois une attitude condescendante, une illégitimité définitive et l’idée d’une future décolonisation puisqu’il faudra nécessairement défaire demain ce qui ne devait pas être fait aujourd’hui : soit la puissance coloniale tombe, soit elle organise elle-même sa propre décolonisation (après un retour à la raison).
Sur un plan géopolitique, le terme de colonisation résulte de ce que la Cisjordanie n’a pas été annexée par Israël et qu’ainsi, faute d’intégration à l’intérieur des frontières israéliennes, les aménagements sont nécessairement effectués sur une terre étrangère.
Enfin, pour ce qu’il en est des palestiniens, la condamnation de la « colonisation » légitime le combat mené par « l’occupé » et justifie tous les moyens employés pour se débarrasser de celui qui n’a rien à faire à cet endroit. Les palestiniens sont d’ailleurs confortés dans leur entreprise par la communauté internationale qui a, de façon récurrente, condamné l’occupation survenue en 1967, critiqué la politique d’implantation dans les territoires et jamais reconnu l’annexion de la partie orientale de Jérusalem intervenue à la suite de la guerre des 6 jours.
En fait, l’emploi du mot « colonisation » est impropre mais résulte de la rédaction de la résolution 242 de 1967, et de l’absence de prise en compte des modifications survenues en 1988.
Le 22 novembre 1967, l’Onu a adopté la résolution 242 qui a exigé « un retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit », exigence également reprise dans la résolution 476 du 30 juin 1980 (la nécessité impérieuse de mettre fin à l’occupation prolongée des territoires arabes occupés par Israël depuis 1967, y compris Jérusalem) ou encore par la résolution 478 du 20 août 1980 (qui reprend dans son 1er point la même formulation). Au delà de la discussion sémantique sur la traduction anglaise de la résolution 242, qui stipule un retrait « from territories » (c’est-à-dire de territoires) et non « from the territories » (c’est-à-dire des territoires), il convient de rappeler que le territoire occupé en 1967 était la Jordanie et non la Palestine, ce qui emporte des conséquences immédiates au regard de la soi disant colonisation.
En effet, ce sont les forces transjordaniennes qui ont, le 23 mai 1948, capturé la ville sainte de Jérusalem, et occupé la Samarie et une partie de la Judée en s’installant sur des zones qui avaient vocation à devenir le « futur État arabe » (en vertu du plan de partage de l’Organisation des Nations unies de 1947). Par la suite, le roi Abdallah de Transjordanie a annexé la Cisjordanie et la partie arabe de Jérusalem (le 24 janvier 1949), malgré la vive et unanime protestation des chefs d’Etat Arabes de la région. Puis, le nouveau Parlement d’Amman a, le 24 avril 1950, approuvé officiellement l’union des deux rives du Jourdain en un seul État pour fonder « le Royaume hachémite de Jordanie ».
Assiette territoriale du futur Etat arabe de Palestine (pourtant refusé par les arabes de Palestine en 1947), ces territoires sont devenus (un temps) une partie intégrante du pays qui allait devenir la Jordanie. Bien évidemment, pour marquer la désapprobation, le roi Abdallah de Jordanie a été assassiné le 20 juillet 1951 sur les marches d’une mosquée à Jérusalem, par un palestinien partisan du mufti Haj Amin el-Hussein opposé au contrôle jordanien sur la partie arabe de la Palestine. Par la suite, le fils du roi Hachémite, l’émir Talal fils bdallah a succédé un temps à son père, puis a été remplacé (pour cause d’incapacité mentale) par son petit fils Hussein en 1952 qui a été sacré roi de Jordanie en mai 1953.
Ainsi, il résulte de cette intégration dans le royaume hachémite, qu’à la suite de la guerre dite des « 6 jours », c’est la Jordanie (dans sa partie occidentale) qui a été occupée par Israël (et non la Palestine) et c’est la partie jordanienne (non palestinienne) de la ville de Jérusalem qui a été annexée.
C’est en l’occurrence cette occupation de la Jordanie par Israël et l’annexion de la partie jordanienne de Jérusalem qui ont été dénoncées dans les résolutions de 1967 et de 1980 : en aucun cas, la communauté internationale n’a condamné l’occupation de la Palestine qui n’a jamais existé en tant qu’entité indépendante et souveraine.
Le véritable problème est né le 31 juillet 1988, lorsque la Jordanie a rompu les liens juridiques et administratifs avec la Cisjordanie : depuis cette date, la Jordanie a cessé d’être occupée et la partie orientale de Jérusalem ne pouvait plus être considérée comme étant annexée. Ainsi, en déplaçant entre les mains de l’OLP la responsabilité de l’avenir des Territoires (anciennement jordanien) occupés, les résolutions 242 et suivantes sont devenues nulles et non avenues (même si elles sont toujours invoquées pour exiger le départ des israéliens).
En fin de compte, le véritable Etat colonial de la région n’était autre que la Jordanie (par l’annexion réalisée en 1950) même si les palestiniens se sont opposés au contrôle jordanien de ce territoire par l’assassinat du roi Abdallah puis lors des évènements de septembre 1970 (septembre noir). Par la suite, la décolonisation jordanienne sauvage survenue en 1988 a véritablement permis à Israël de s’établir sur des terres désertiques sans souveraineté, telle une île déserte qui attend un drapeau national.
Lorsque les palestiniens comprendront que les installations israéliennes sur des territoires sans souveraineté ne sont pas une colonisation, ils sentiront la nécessité d’établir leur Etat sur les terres sans souveraineté qui n’ont pas encore été annexées par Israël et réaliseront que le temps qu’ils ont perdu à faire la guerre, aura juste permis à Israël de se renforcer dans ses frontières géographiques.
http://www.israel-infos.net/article.php?id=4119
Dans ce cas, ces habitants des “colonies” vont devenir à terme des Palestiniens juifs comme il existe des Israéliens musulmans.
C’est le Roi Abdallah de Transjordanie qui procède à l’unification formelle des territoires de Transjordanie et ceux nouvellement annexés par lui ( Cisjordanie rive ouest du Jourdain), pour créer le Royaume de Jordanie. C’est ainsi que s’ajoutent aux 400 000 bédouins de son émirat les 650 000 arabes de Cisjordanie.
C’est donc la Jordanie, lors de la guerre des six jours, qui a été en partie occupée par Israël (et non la « Palestine »), ainsi que la partie jordanienne de Jérusalem et non la partie « palestinienne »..
Personne jusqu’à ce jour n’a contesté la validité et la légitimité du Royaume Hachémite de Jordanie pourtant créé de toutes pièces par les Britanniques pour « consoler» les Hachémites (descendants du Prophète et gardiens traditionnels des lieux saints de La Mecque) de la perte de leurs territoires d’Arabie d’où ils avaient été chassés par la famille des Saoud.
« les installations israéliennes sur des territoires sans souveraineté ne sont pas une colonisation ». Quel sens donnez-vous au mot « souveraineté ? Dans un monde qui sort à peine de la 2e guerre mondiale, où les cartes géographique des pays sont encore à tracer même de manière arbitraire. Surtout, quelle définition donneriez vous à une colonisation qui ne répondent pas à la manière dont Israël s’est établit ?
Vous ajoutez : « en aucun cas, la communauté internationale n’a condamné l’occupation de la Palestine qui n’a jamais existé en tant qu’entité indépendante et souveraine ». Vous ne saurez ignorer pourtant que le monde entier était sous la domination des nations les plus militarisées. Occupées, les nations même les plus anciennes n’étaient ni indépendantes ni souveraine sur leur territoire, et pourtant on parle bien de colonisation. On parle bien de « décolonisation » de l’Afrique par exemple.
« la décolonisation jordanienne sauvage survenue en 1988 a véritablement permis à Israël de s’établir sur des terres désertiques sans souveraineté, telle une île déserte qui attend un drapeau national. » .Vous prétendez que si les israéliens avez trouvé un drapeau original planté devant eux ils auraient fait poliment demi tour ? Vous avancez vous-même le chiffre de 600.000 palestiniens vivant en Cisjordanie à l’époque, il s’agissait bien d’un désert mais il n’attendait aucun drapeau étranger. Vous avancez que la Jordanie doit son Etat au bon vouloir des britanniques, vous savez pourtant pertinemment qu’il n’y aurait jamais eu d’Etat d’Israël sans la complicité des britanniques.
J’ai une question : si un Etat palestinien devait voir le jour, comment vous l’imaginez ? avec des petites colonies parsemées qui se développent « naturellement » ?