Publié par Dreuz Info le 25 août 2009

En plus de vingt ans d’existence, le Hamas, « Mouvement de résistance islamique » selon sa dénomination arabe, n’a eu de cesse de multiplier les attentats meurtriers et les exactions en tout genre. Pour bien comprendre les tenants et aboutissants de sa confrontation avec Israël, il faut se replonger dans l’historique macabre de ce mouvement terroriste.

L’hiver est déjà bien installé ce 5 janvier 1996 dans la ville de Gaza. Soudain, une petite déflagration trouble le calme relatif qui règne dans la cité. La charge d’explosifs placée dans le cellulaire d’Yahya Ayyash vient d’être actionnée alors même que ce dernier était en pleine conversation téléphonique. Elle emporte avec elle tous les projets machiavéliques d’attentats-suicides de l’homme que les Palestiniens appellent avec beaucoup de respect l’« Ingénieur ». La main vengeresse du Shabak, les services secrets israéliens, met alors fin aux sombres agissements d’un individu à l’origine de la mort de 90 Israéliens, pour la majorité civils, et d’une dizaine de kamikazes de sa propre nation. Presque trois ans après, le 3 mars 1999, le printemps commence tout juste à poindre le bout de son nez sur Jérusalem. Un jeune Palestinien se fait sauter à l’intérieur du bus 28 qui relie la gare et le centre-ville. C’est la deuxième fois en une semaine que cette ligne est visée. Avec celle du 25 février, cette explosion porte à 45 le total des victimes de cette vague d’attentats. Parmi elles, deux sont originaires des États-Unis, sept de Roumanie et une d’Éthiopie. Ces événements résument parfaitement le malaise qui gouverne les relations entre Israël et le Hamas, auquel appartenaient Ayyash et les deux auteurs des attaques-suicides de la ligne 18.

Construit à partir du mouvement égyptien des Frères musulmans, le Hamas prend véritablement son essor en 1987, lorsque la branche palestinienne déclare son autonomie vis-à-vis de son organisation mère. Cette scission se fera surtout à la faveur de la première Intifada, mouvement de révolte de la rue palestinienne contre Israël.

L’idéologie relativement pacifiste des Frères musulmans d’Égypte est alors abandonnée au profit des thèses plus radicales du cheik Ahmed Yassine. Ce personnage énigmatique qui, depuis un accident à l’âge de 12 ans, circule en fauteuil roulant, est doué d’un certain charisme. Il ose déclamer tout haut ce que les autres Palestiniens pensent tout bas. En prônant le recours aux armes comme seule solution contre ceux qui sont perçus comme les occupants israéliens, il trouve un écho favorable dans le cœur de son auditoire et gagne rapidement en popularité. Les affrontements liés à ce soulèvement prennent fin en 1993 avec la signature des accords d’Oslo. Les textes ratifiés par Yasser Arafat au nom de l’Autorité palestinienne sont cependant en opposition totale avec l’idéologie extrémiste et antisémite du Hamas qui ne peut donc les accepter.

L’année suivante sera ainsi marquée par une totale radicalisation du mouvement qui bascule alors définitivement dans l’horreur. Pour mettre à mal des accords qu’il rejette en bloc, le Hamas décide en effet de recourir pour la première fois aux attentats-suicides, une technique qui deviendra son arme de prédilection. En un peu plus de dix ans, ces attaques feront près d’un demi- millier de victimes.

Elles atteindront leur paroxysme dans les premières années de la deuxième Intifada, aussi appelée Intifada Al-Aqsa. Entre 2001 et 2004, 339 personnes trouveront ainsi la mort du seul fait des explosions kamikazes du Hamas. C’en est trop pour les services de sécurité israéliens qui se doivent de contre- attaquer. En 2004, le cheik Yassine et son successeur, le docteur Abdelaziz al-Rantissi, seront tous les deux tués par des militaires de Tsahal, à seulement quelques jours d’intervalle. Israël pense, alors, que couper les têtes de l’hydre islamiste suffira pour la réduire à l’impuissance. L’État hébreu se trompe hélas lourdement. À l’image du monstre des légendes de la mythologie grecque, chaque tête coupée cède immédiatement sa place à une nouvelle, plus forte et mieux équipée. Le Hamas se sait acculé et choisit de faire un temps profil bas. Il met à profit cette période pour entamer dans l’ombre son processus de reconstruction. Son bras armé, mutilé et exsangue, reprend rapidement de la vigueur grâce à une manne financière ininterrompue qui lui offre l’opportunité de recruter à tout-va dans les quartiers pauvres de Gaza.

Les Frères musulmans des origines ont en effet doté le Hamas d’un réseau d’écoles, d’hôpitaux et même de fondations et d’universités très dense dans le paysage gazaouite. C’est ce réseau éducatif et caritatif qui assure au mouvement expansion et popularité depuis sa création. Cette façade, dont il est légalement propriétaire, lui permet aussi de récolter la majeure partie de ses fonds, estimés en 2003 à plus de 50 millions de dollars, aujourd’hui, probablement le double. Au rang des principaux donateurs se trouvent de riches ressortissants des pays du Golfe comme l’Arabie saoudite, dont le montant total des contributions est évalué aux alentours de 12 millions de dollars par an. Vient ensuite l’Iran, dont l’apport ne se limite pas aux 3 millions de dollars qu’il donne tous les ans. Le régime d’Ahmadinejad est en effet bien connu pour apporter une assistance logistique et matérielle de premier plan aux activités terroristes du Hamas, notamment en abritant ses camps d’entraînement. Il en est de même de la Syrie dont le gouvernement fournit asile à de nombreux dirigeants du mouvement.

 Le Hamas en quelques chiffres

• Probablement 100 millions de dollars de dotation annuelle. • 15 000 combattants armés, disciplinés et bien entraînés. • Environ 10 000 roquettes et mortiers en tous genres, dont plusieurs milliers de roquettes Kassam 3 d’une portée de douze kilomètres et plusieurs centaines de roquettes Grad d’une portée de quarante kilomètres. • Plusieurs dizaines de milliers de tonnes d’explosifs réparties dans diverses caches de la bande de Gaza. • Plus de 500 victimes en vingt ans d’existence. • Plus de 3 300 roquettes et mortiers tirés sur le territoire israélien en 2008, soit deux fois plus qu’en 2007 et 2006. • Près de 1 million de citoyens israéliens, habitant les villes d’Ashdod, d’Ashkelon et de Beersheba, vivent depuis plud de huit années sous la menace directe des tirs de roquettes Kassam en provenance de la bande de Gaza.

 L’Iran apporte une assistance logistique et matérielle de premier plan au Hamas, notamment en abritant des camps d’entraînement.

Le reste de l’argent du Hamas lui est fourni à travers un réseau international très complexe d’organisations caritatives, dont le rayonnement s’étend de l’Amérique du Nord à presque tout le Vieux Continent. Il en va ainsi du Fonds d’aide et de développement de la Palestine au Royaume-Uni, de la Fondation de la Terre sainte aux États-Unis, de la Fondation Al-Aqsa en Allemagne ainsi que du Comité de bienfaisance et de solidarité avec la Palestine en France.

Après enquête conjointe des services secrets israéliens et américains, toutes ces organisations se sont révélées être des émanations du Hamas. Le reste de ses financements lui est apporté au travers de nombreuses autres organisations islamiques de solidarité, pour la plupart basées en Occident. Celles-ci affirment vouloir seulement financer des programmes d’aide aux plus nécessiteux tout en sachant que le Hamas place toutes les sommes qu’il reçoit sur un fonds commun. Il décide par la suite selon ses priorités de les affecter ou non à ses activités terroristes.

Ces canaux lui rapporteraient aux alentours de 15 millions de dollars par an. Certaines sommes sont effectivement utilisées par le Hamas pour aider les Palestiniens, notamment à travers la reconstruction de maisons et de bâtiments communautaires. D’autres le sont d’une manière plus ambiguë ou paradoxale, par exemple à travers l’indemnisation des familles des kamikazes qui ont trouvé la mort lors des attentats- suicides qu’il a lui-même fomentés. Entre 2004 et 2006, la cote de popularité du Hamas croît néanmoins de manière exponentielle, forte du soutien et de l’adhésion de toute une population, trop aveuglée par le fanatisme pour comprendre que ceux qu’elle révère sont en fait ses pires ennemis. En 2006, à la surprise générale, le mouvement arrive en tête des législatives avec la liste « Changement et Réforme » menée par Ismaïl Haniyeh. Il réclame alors le poste de Premier ministre qu’il obtient du président Abbas.


Guerre fratricide avec le Fatah à Gaza
Ismaïl Haniyeh est nommé chef d’un gouvernement désormais isolé sur la scène internationale. Les États-Unis, l’Union européenne et Israël, qui considèrent à juste titre le Hamas comme une organisation terroriste, ferment le robinet des aides aux Palestiniens. Sur le plan interne, le Hamas n’est guère mieux loti, les dissensions et les rivalités avec le Fatah vont crescendo jusqu’à aboutir en 2007 à une guerre civile qui oppose les factions armées des deux mouvements. Les affrontements débouchent sur une victoire totale du Hamas dans la bande de Gaza, dont il expulse ou extermine tous les membres du Fatah qui garde, quant à lui, le contrôle de la Cisjordanie. La suite est bien connue puisqu’elle se trouve au centre de l’actualité brûlante du Proche-Orient.


Affaiblir le Hamas
Une trêve de six mois avec l’État d’Israël est laborieusement obtenue par le médiateur égyptien en juin 2008. Elle est définitivement rompue à l’initiative du Hamas qui, dès la fin décembre, pilonne sans coup férir le sud du territoire israélien au moyen de roquettes Kassam de nouvelle génération, dont la portée a été augmentée. Le 27 décembre 2008, l’armée israélienne décide de lancer une série de frappes aériennes ciblées sur les centres névralgiques du Hamas dans la bande de Gaza.

L’opération est dénommée Plomb durci, les principaux objectifs visés sont les centres de fabrication et de stockage d’armement ainsi que les camps d’entraînement militaire. Cet événement pourrait marquer un tournant pour l’existence du mouvement terroriste Hamas. Si son éradication totale paraît difficilement réalisable à travers cette seule opération, une offensive d’envergure contre ses infrastructures de base l’affaiblirait assez pour envisager l’avenir proche d’une manière plus sereine. Il est grand temps, en effet, de mettre définitivement fin aux agissements d’extrémistes qui, en seulement une génération, ont sacrifié plusieurs centaines d’innocents sur l’autel de leur fanatisme.

 L’organisation du Hamas

Tenue secrète, l’organisation interne du Hamas est cependant bien connue dans ses grandes lignes. La direction « politique » du mouvement est scindée entre la bande de Gaza et la Syrie, où résident ses principaux responsables. Un conseil consultatif, le Majis al- Choura, composé d’une cinquantaine de délégués, doit théoriquement prendre les décisions relatives à l’orientation générale du groupe. En réalité, pour maintenir la cohésion dans les rangs, le processus décisionnel du Hamas est concentré entre les mains d’une poignée de dirigeants. À leur tête se trouve Khaled Mechaal. Né en 1956, cet ancien professeur de physique diplômé de l’université du Koweït est connu pour ses talents d’orateur et ses positions radicales vis- à-vis de l’État d’Israël et de la communauté juive en général. Il a notamment appuyé les nombreuses déclarations négationnistes d’Ahmadinejad, les qualifiant de « courageuses ». Il prend la direction du Hamas en 2004, suite à la mort d’al-Rantissi. Son bras droit, le numéro 2 du Hamas, s’appelle Moussa Abou Marzouk. Quinquagénaire natif de Rafah, dans la bande de Gaza, il joue un rôle de première importance dans la recherche de fonds et a été condamné par contumace aux États-Unis pour son implication dans le financement du Hamas. Vient ensuite Mahmoud Zahar, cofondateur avec Cheikh Yassine du Hamas en 1987. Nommé ministre des Affaires étrangères de l’éphémère gouvernement Haniyeh en 2006, il fait partie de la ligne dure et a été longtemps impliqué dans les activités terroristes du groupe. C’est un intellectuel, diplômé en chirurgie de l’université du Caire. Il assure aujourd’hui la direction du Hamas dans la bande de Gaza. À eux trois, ces hommes composent la plateforme dirigeante. La facette la plus connue du Hamas est néanmoins son aile militaire, les brigades Azzedine Al-Qassam. Fortes de 15 000 combattants organisés en cellules de six à sept personnes, elles peuvent monter leurs opérations indépendamment du bureau politique basé en Syrie, mais doivent attendre son aval pour pouvoir les lancer.

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