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France – l’idéologie remplace la connaissance
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Par Michel Garroté
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Mercredi 23 juin 2010 – 11 Tammuz 5770
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J’ai toujours eu, avec la France, une relation à la fois étroite et ambivalente ; un mélange d’amitié et d’irritation. De l’amitié, car l’amitié francophone gravite autour de l’amitié française, qui reste la source de notre langue commune. De l’irritation, car le fossé entre ce que les Français sont aujourd’hui réellement devenus et ce qu’ils croient être encore, ce fossé est devenu abyssal. Peut-être que Sarkozy, en dépit de ses origines hellèno-magyares, est de tous les présidents de la Ve République, celui qui incarne le plus ce fossé franco-français, ce mode de pensée décalé, cet anachronisme à la française. Je n’ai pas encore suffisamment avancé dans ma quête historique et sociologique pour parvenir à expliquer ce mal français qui confond idéologie et connaissance. Au stade actuel, j’en suis à dater le début du déclin français lorsque son roi alla piétiner, sur son cheval, les vignobles de Rhénanie. Ce roi qui ne représentait plus qu’une grandeur à la fois bouffonne et vaniteuse.
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Ce roi qui se tapait des courtisanes, en fait des putes ; et qui faisait bombance après la chasse avec ses courtisans. Ce roi qui se poudrait mais ne se lavait pas. En quoi ce Louis XIV à perruque était-il encore Roi des Français ? En quoi la France de ce roi était-elle encore Fille aînée de l’Eglise ? J’ajouterais que la France chrétienne s’est ramassée quelques coups de massue spectaculaires avec la Réforme, la Révolution dite française, la Révolution bolchevique et la Révolte de Mai 68. Personnellement, je ne souhaite nullement que la France revienne en arrière, qu’elle redevienne monarchique et qu’elle redevienne la Fille aînée de l’Eglise. En revanche, je souhaiterais que la France daigne s’intéresser un peu moins à son nombril et un peu plus à ce qui fonctionne correctement ailleurs que chez elle. Pour la liberté, je pense aux USA. Pour le fédéralisme, je pense encore aux USA et aussi à l’Allemagne, à la Suisse.
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Pour le christianisme, je pense de nouveau aux USA, à l’Allemagne et à la Suisse. Je souhaiterais, pour tout dire, que la France se reconnaisse dans une société libre de culture judéo-chrétienne ouverte à l’islam à condition que cet islam soit réformé. Je souhaiterais que la France soit catholique sans être pour autant islamophile à tout prix, tout en étant judéophobe et christianophobe envers les chrétiens qui ne sont pas catholiques. Si en France des mahométans deviennent évangéliques c’est un motif de joie et non de jalousie pour les catholiques. Bref, je souhaiterais, pour finir, que la France se reconnaisse dans une anthropologie judéo-chrétienne, qu’elle cesse d’alterner, tantôt l’étatisme version UMP, tantôt le socialisme version PS. Si vraiment la France a besoin d’un Charlemagne ou d’une Jeanne d’Arc, alors que la France songe à ce qu’ont réalisé Ronald Reagan et Margaret Thatcher. Il est vrai qu’en l’espèce, le travail des idées, côté France, se fait exclusivement sur Internet.
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Ainsi par exemple, dans une analyse intitulée « Défendre la vérité et la liberté en France, c’est adhérer à une cause perdue », Guy Millière, le 16 juin 2010, sur http://menapress.org/, écrit notamment (extraits) : « En France, c’est le politiquement correct, et lui seul, qui décide de ce qu’est la vérité, et on ne montre que ce qui contribue à fabriquer cette ‘vérité’. Le résultat est un fossé qui se creuse. Le résultat est aussi qu’on a, d’un côté de l’Atlantique (ndmg : Amérique du Nord), une population qui dispose encore de repères concernant l’évolution du monde, et, de l’autre côté de l’Atlantique (ndmg : Europe de l’Ouest), une population qui, pour l’essentiel, vit dans une sorte de bocal aux trois quarts clos, où des idées préconçues sont distillées, martelées, injectées dans les neurones, jusqu’à ce qu’il semble aux gens que ces idées sont vraies ».
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Guy Millière ajoute : « Pourquoi en est-il ainsi ? Pourquoi la France est-elle dans cette situation ? Mon explication tient à plusieurs facteurs. Le premier d’entre eux est le poids des intellectuels dans la vie culturelle et politique française. Aux Etats-Unis, il existe des commentateurs, des universitaires, mais les gens qui parlent de sujets qu’ils ne connaissent pas avec le ton péremptoire de celui qui a la science infuse sont peu nombreux et sans réelle influence. En France, ces gens sont écoutés et pris au sérieux. Leurs lubies et leurs délires sont considérés comme ayant de l’importance et de la pertinence. C’est une tradition qui remonte au temps de la Révolution française et qui, en passant par Sartre, se prolonge jusqu’à des gens tels que Régis Debray aujourd’hui ».
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Guy Millière poursuit : « Le second de ces facteurs est relié au premier. Il tient au rôle des idéologies dans les débats. Aux Etats-Unis, parce que les intellectuels au sens français du terme sont peu nombreux, et que les idéologies sont essentiellement le fruit des activités des intellectuels, on voit circuler des notions diverses, mais l’impact d’idéologies structurées est très faible. En France, parce que les intellectuels ont une place prépondérante, les idéologies ont elles-mêmes un rôle prépondérant et, quand elles ne se substituent pas à la connaissance, teintent celle-ci de colorations la transformant en autre chose qu’elle » (Fin des extraits de l’analyse de Guy Millière intitulée « Défendre la vérité et la liberté en France, c’est adhérer à une cause perdue » parue le 16 juin 2010 sur http://menapress.org/).
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Lorsqu’un homme politique sort sa petite phrase, elle peut faire la Une de plusieurs quotidiens comme si l’action qu’elle est supposée sous tendre était déjà de l’ordre du fait réalisé.
Dans les pays anglo-saxons les décideurs sont jugés sur ce qu’ils font ou sur ce qu’ils ont fait. En France, ils sont jugés sur ce qu’ils disent ou sur ce qu’ils ont dit, ce qui permet à notre président actuel de masquer en grande partie la régression que nous vivons en réalité dans de nombreux domaines.
Le mal est entré jusque dans les plus hautes sphères de nos grands groupes industriels. Beaucoup de brillants ingénieurs font carrière sur l’audace de leurs projets, bien ficelés sur le papier, que des subalternes seront chargés de réaliser. S’ils y parviennent la gloire en reviendra au concepteur, s’ils échouent la cause sera imputée au manque de motivation ou de professionnalisme du réalisateur. Entre temps notre brillant ingénieur aura déjà été propulsé sur un autre projet, … avec promotion et augmentation.
« Grands causeux, petits faiseux » dit-on à juste raison chez les Ch’tis.
L’appellation est déjà en soi arrogante car elle laisse entendre qu’en dehors de ce club un peu fermé, dans lequel on entre par cooptation, tout le reste de la population n’utilise son cerveau qu’à des activités vulgaires et subalternes comme par exemple la médecine, le commerce, l’ingénierie, la finance, l’administration, l’urbanisme, l’architecture, l’artisanat ou que sais-je encore.
L’intellectuel, lui, se veut visionnaire, homme de réflexion profonde et complexe. Il est « l’éclaireur » de la société moderne, que dis-je, … de la civilisation de demain. Il ne se commet pas avec les basses contingences. Il conceptualise des constructions de l’esprit censées fournir toutes les réponses à toutes les questions. Le système qu’il peaufine est donc un système très fermé à l’intérieur duquel on peut vivre spirituellement et intellectuellement en autarcie. Et de toute façon, si d’aventure la réalité ne corrobore pas le concept, c’est forcément la réalité qui aura tort. Il connaît, par exemple, beaucoup mieux la condition ouvrière qu’un mineur de charbon qui aura passé trente ans au fond, … puisqu’il a lu tout Germinal, lui !
Tout au plus consent-il à « redescendre » un peu pour encaisser ses chèques. C’est qu’il faut quand même bien manger mon bon monsieur !
Notre homo intellectualis se caractérise par une capacité (relative) à maîtriser la syntaxe, ce qui lui permet de parler avec élégance de ce qu’il ne connaît pas, mais en pratiquant comme personne l’accord du participe passé et l’emploi du subjonctif, ce qui autorise tout. Adepte du dictionnaire des synonymes, il vous truffera sa prose de mots ésotériques incompréhensibles à l’entendement du vulgum pecus. On ne vulgarise pas !
Le résultat assez paradoxal est que ces « esprits supérieurs » écrivent des livres très ennuyeux, des articles soporifiques, que peu de gens lisent. En fait ils se lisent entre eux en vue de polémiquer devant les micros et les caméras de télévision, devant des animateurs de pseudos débats nourris de fiches de synthèse destinées à faire croire qu’ils sont eux aussi au faîte du sujet traité. Alors qu’en réalité combien de gens « normaux » ont lu tout Régis Debray ou tout BHL ? … pour n’en citer que deux particulièrement connus pour se ‘’bricoler les neurones‘’.
J’ai pris conscience de cette pratique au cours de l’été 1981. La gauche venait d’accéder au pouvoir et, au bas de la Une du journal Le Monde un même titre revenait régulièrement : Des raisons du silence des intellectuels de gauche. Les auteurs étaient chaque fois différents. Ils s’interpellaient en eux, se répondaient, se « taquinaient », se suggéraient, se laissaient supposer, … et le lecteur lambda n’entendait strictement rien à leur prose codée. C’est alors que j’ai compris que « ces messieurs » ne s’adressaient pas à moi, lecteur anonyme. Je n’étais là que pour payer le timbre de leurs correspondances en achetant le journal. A dater de ce moment, j’ai cessé d’acheter Le Monde.
Vive le pragmatisme ! …… « Les intellectuels » devraient être la seule caste à bénéficier du privilège de rouler à deux roues en étant exonérée du port du casque. … Chacun comprendra pourquoi !
Magnifique analyse de l”intellectuel de gauche” français.
Ceux que l’on nous impose dans tous les média à chaque fois que “quelque chose” se passe dans le monde.
Surtout dans les “débats” télévisés, on ne voit qu’eux, alors que les principaux intéressés, le peuple par exemple, n’a pas le droit de parole.
D’ailleurs, ils ne manquent jamais de faire la promotion de leur dernier “ouvrage”, seul but de leurs interventions, avec la complicité des hommes en place dans les média.
En fait, ils rêvent tous de “rester à la postérité” grâce à leurs écrits incompréhensibles quand on sait que leur vie sur terre ne ressemble en rien à l’idéologie qu’ils distillent.
Croyez-vous que les français ne voient pas comment vivent ces gens-là ?
Ce peuple d’en bas, comme ils appellent le français lambda, commence à se réveiller. Mais comme ces français-là ont avalé des somnifères pendant des décennies, il ne faut pas s’attendre à un réveil trop tonique.
Néanmoins, je pense que le réveil se fera.
Très bien, Pierre ! Mais, après cette magistrale analyse intellectuelle, que pensez-vous qu’il y ait comme solution ? Les priver de leurs émoluments, les priver de leur audience ? Assurément, mais comment y arriver ? Comme je l’ai déjà dit, ce n’est pas un hasard si le maître de céans provient d’une famille où l’on faisait de la publicité. Tout un programme !
“Une société ouverte à l’islam pourvu qu’il soit réformé”. Mais pourquoi ouverte à l’erreur et la barabarie? ne peut-on raisonnablement et spirituellement considérer ce noeud de religiosité et de tribalité comme le mal? La vie du fondateur lui-même n’est-elle pas le mal? Car vous citez le sac du Palatinat par les armées françaises sous le règne de Louis XIV comme le mal, mais tous les historiens le mettent à son débit, ce fut une mauvaise action, ou, comme l’eut dit Talleyrand, “plus qu’un crime, une faute”. Mais Louis XIV n’est pas Dieu ni son prophète, et par ailleurs, car l’analyse historique se veut à charge et à décharge, il fut aussi le fondateur de la France au sens de la primauté du gouvernement sur les provinces, au sens de l’éclat de la pensée et des arts qui firent de la France le phare de l’Europe, et donc du monde en ces temps là.
Mais le fondateur de l’islam s’est dit portant la parole de Dieu et sacralisa jusqu’à ses massacres, ceux de sa main j’entends, ainsi que ses perversions. Et cet enseignement objectivement mauvais pour un chrétien, nous devrions lui être “ouvert”? Qu’est-ce à dire? Que nous devons être ouvert au mal? Et que reste-t-il de chrétien après cela? Car pour un catholique il ne faut pas divorcer, c’est un mal, et eux pourraient le faire sans que cela n’en soit un? Il ne faut pas tuer: décalogue, et eux le pourraient à l’imitation du fondateur, mieux doivent le faire, et ceci serait un bien, ou tout au moins pour ceux qui se veulent “ouverts” un non-mal?
“Vérité en deçà des Pyrénnées erreur au delà”, je devrais donc intérioriser un mal qui serait “bien pour le voisin”? Mieux, je pourrais être condamné pour de tels actes quand il serait absous?
Expliquez, je voudrais comprendre.
A moins que la Paix mérite de tolérer le diable? Si c’est oui, alors le paganisme était la seule religion vraiment cohérente, et tolérante…mais il ne ferait pas bon l’être avec l’islam, n’est-ce pas?
Certains passeront à la « postérité » dans la mesure où, comme le faisait observer Nicolás Gómez Dávila :
« La postérité n’est pas l’ensemble des générations futures. C’est un petit groupe d’hommes de goût, bien élevés, érudits, dans chaque génération. »
Mais il ajoute un peu aussitôt :
« Est cultivé l’homme qui ne fait pas de la culture une profession. »
(Cf. Les horreurs de la démocratie )
@ Senec
La solution ? Vous l’avez fort bien suggérée : LES PRIVER DE LEUR AUDIENCE.
Comment ?
En ne regardant pas les émissions dans lesquelles ils se produisent, en n’achetant pas la presse dans laquelle ils se répandent, en ignorant les livres qu’ils commettent, et éteignant son poste de radio lorsqu’ils sont invités à polluer l’espace sonore.
On vit très bien en ne regardant que les documentaires d’Arte(*), en ne lisant que Géo, Sciences & Vie, L’Usine Nouvelle(*), en côtoyant Montaigne et Saint-Exupéry(*), en écoutant France Musique(*), en consultant DRZZ INFO(*) sur Internet, et en confrontant nos récits de voyages et de rencontres avec des amis ouverts au monde et sur le monde.
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(*) listes non exhaustives, bien sûr.
Pierre, vous préconisez ARTE. Pourtant, je dois vous dire qu’il m’arrive, alors, souvent, de chercher à leur envoyer un message de désapprobation. Ils ont une option philosophique clairement de gauche. Et, à chaque fois, que ce n’est pas tout à fait le cas, je m’étonne. Y aurait-il des progrès ? Mais, comme souvent, je n’aime pas leur façon hypocrite de traiter les sujets, il m’arrive rarement de suivre toute une émission. Trop rarement, sans doute ! Pourquoi faut-il, toujours ou trop so,uvent que la culture soit de gauche ? Une maladie congénitale sûrement ou plutôt une tradition.Less gens ,de gauche n’ont pas d’avenir dans le travail, dans ni le commerce, ils préfèrent entrer ,en religion la religion de la gauche. Alors, oui, pour gagner leur vie, ilssontt surnuméraires dans les postes culturels. Un vrai désastre intellectuel ! La vérité sinistrée, je ne vois pas d’autre expression. Ces gen,s instruits par des laïcs anticl,éricaux sont évidemment très ignorants des valeurs chrétiennes. Alors, lamentablement, ils citent erécitentnt tous les poncifs erronés qu’on leur a inculqués. La civilisation islamique, notamment ! Tout y est faux et si cela ne vous parait pas juste, il faudra vous recycler ! D’ailleurs, il faut que le peuplfrançaisis soit informé de cette escroquerie intellectuelle qui explique clairement pourquoi il ne fallait pas frayer avec cette engeance ! Le peuple voiclair,ir mais la gauche veut continuer, contre ttoue évidence, à lui dire que ce qu’il vo,it lui-même tous les, jours n’est pas la r&alité. C’eça st le gauchisme : gauchir la réalité visible ! Absurde, n’est-il pas ?
C’est à dessein que je parlais de documentaires, et uniquement de documentaires, en ce qui concerne Arte. Documentaires du type « Le Danube de sa source à la Mer Noire » ou « Faune et flore autour du lac Baïkal ».
C’est également à dessein que je précisais que les listes n’étaient pas exhaustives. Il y a aussi KTO, … par exemple.