Publié par Guy Millière le 25 juillet 2010

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Certains m’ont dit, suite aux articles que j’ai rédigés sur la situation présente de la France, que ce que j’évoquais équivalait à « américaniser » la France. J’ai répondu que si la France s’inspirait de ce que les Etats-Unis ont de fécond, cela ne me semblerait poser aucun problème, mais que je doutais, hélas, que ce chemin soit suivi.  


Je voudrais ici en profiter pour expliciter, car il me semble que la vision de nombre de gens vivant en France est brouillée tant sur leur propre pays que sur la société américaine. Je ne pourrai être exhaustif, mais je prendrai quelques exemples qui me semblent éloquents :  


  1. 1 – En écoutant ou en lisant l’évocation des faits divers, des crimes et délits, en consultant les codes et les lois en vigueur, force est de constater qu’en France un assassin multirécidiviste encourra, le plus souvent, une peine située alentour de vingt années de réclusion. Si la peine prononcée est incompressible, il passera effectivement vingt ans en prison, sinon, les remises de peine feront que la durée d’incarcération pourra tomber à une douzaine d’années. Des peines de trente années incompressibles existent, mais sont prononcées très exceptionnellement. Aux Etats-Unis, un assassin multirécidiviste risquerait la peine de mort dans trente Etats, la prison à perpétuité (mais une perpétuité réelle, définitive) dans les vingt autres Etats. Les Etats-Unis sont une société où, même si on désapprouve la peine de mort (ce que je peux comprendre), un assassin, a fortiori un récidiviste, se trouve extrait de la société et placé pour toujours hors d’état de nuire. En France, une chance lui est offerte de se réhabiliter, de refaire sa vie, ou de récidiver. A mes yeux, une seule récidive, en termes de meurtre, est déjà une récidive de trop. Les Etats-Unis ne donnent aucune chance aux assassins, mais protègent davantage ceux qui n’appartiennent pas à la catégorie des assassins, et si on retire de la liste des homicides les victimes de règlements de compte entre gangs rivaux, on voit que la société américaine est une société moins violente, aujourd’hui, que la société française. D’une manière générale, si on franchit la ligne et qu’on passe du côté du crime aux Etats-Unis, on se trouve dans une société plus répressive. Si on ne franchit pas la ligne, on se trouve dans une société moins répressive, et cela m’amène à mon deuxième point.

 

  1. 2 – Sans avoir à consulter les journaux, en prenant simplement ma voiture, en écoutant les gens parler autour de moi, en me fiant à ma propre expérience, je ne puis faire autrement que constater qu’il existe en France une présomption de culpabilité, et pas une présomption d’innocence, et une police qui se trouve incitée à se conduire comme si elle était une force de harcèlement et de racket. Toute personne en France peut faire l’objet de contrôles d’identité par la police à chaque instant : ce serait impossible dans un pays où une vraie présomption d’innocence existe, et c’est, de fait impossible aux Etats-Unis où je peux me promener sans me dire que je ne dois pas oublier d’avoir sur moi ma carte d’identité ou mon passeport. Toute personne en France peut être conduite au poste de police pour plusieurs heures sur décision d’un policier, voire placée en garde à vue, et toute personne accusée sans preuve peut se trouver mise en détention provisoire. Ce serait encore une fois impossible dans un pays où une vraie présomption d’innocence existe, et ce serait impossible aux Etats-Unis. Un automobiliste en France peut se trouver arrêté n’importe où, sous n’importe quel prétexte par un policier ou un gendarme, même s’il n’a commis aucune infraction, et verbalisé arbitrairement : des barrages de police aux fins de contrôle sont régulièrement organisés. Ce serait une fois encore impossible dans un pays de vraie présomption d’innocence, et rien de tout cela ne serait concevable aux Etats-Unis où, quand je circule en voiture, je sais que si je ne commet aucune infraction, aucun policier ne me demandera quoi que ce soit. Le résultat est qu’en France, où on relâche bien plus aisément les assassins qu’aux Etats-Unis, on peut, tout particulièrement si on a la peau un peu sombre, subir plusieurs contrôles d’identité en une seule semaine, et plusieurs contrôles routiers si on conduit un véhicule, même si on conduit impeccablement. On peut aussi se trouver conduit au poste pour plusieurs heures, ou placé en garde à vue de façon arbitraire, voire en détention provisoire sans motif fondé. On peut aussi se voir dresser des contraventions sous des prétextes fallacieux. Aux Etats-Unis, où on relâche moins facilement les assassins, la situation n’est strictement pas comparable sur ces divers plans.

 

  1. 3 – Il existe des écologistes aux Etats-Unis, mais l’idée de pratiquer, au nom de l’écologie, une coercition de masse en asphyxiant délibérément la circulation, en coulant du béton sur la chaussée, en hérissant les trottoirs de parpaings et de poteaux métalliques paraîtrait grotesque et pré-totalitaire au sens où elle serait considérée comme une atteinte à la liberté d’aller et venir la plus élémentaire et à la liberté de choix. En France, ce que je viens de décrire est devenu la norme. On pourrait me placer les yeux fermés dans une ville française, n’importe laquelle, je saurais que je suis en France en ouvrant les yeux rien qu’en voyant les chaussées obstruées, les coulées de béton, les parpaings et les poteaux métalliques : si je voyais un barrage policier un peu plus loin, je n’aurais plus aucun doute. Il n’y a pas qu’aux Etats-Unis que ce type de pratique scandaleuse n’a pas cours, mais une chose est sûre : nulle part aux Etats-Unis la population n’accepterait de voir ce genre de pratique liberticide prendre place. Même dans les villes les plus à gauche, telles San Francisco. La conséquence : circuler à pied ou en voiture aux Etats-Unis est circuler dans un espace ouvert. Circuler à pied ou en voiture en France, sauf si on se rend à la campagne, est circuler dans un espace de plus en plus fermé, asphyxié et asphyxiant.

 

Je pourrais rajouter de multiples autres éléments : le temps qu’il faut pour créer une entreprise en France est beaucoup plus long et ressemble encore souvent à un parcours d’obstacles, les taxes, impôts et charges en France sont beaucoup plus lourds et la présomption d’innocence en cas de contrôle fiscal n’existe pas, les prix moyens en France sont plus élevés dans la mesure où c’est toujours l’acheteur qui paie les taxes, impôts et charges, et jamais l’entreprise (ce qui devrait être enseigné dès l’école primaire), les salaires et revenus sont en moyenne, en France, plus faibles car le salaire total (ce qu’un emploi coûte à une entreprise) se trouve davantage amputé par les prélèvements divers opérés par le gouvernement. Je pourrai revenir sur les assurances santé, qui reposent aux Etats-Unis sur des principes qui se rapprochent de celui des assurances automobile en Europe, et supposent encore une liberté de s’assurer ou de ne pas s’assurer (la loi Obama n’est pas entrée en vigueur), et plusieurs types d’assurances : on peut ne pas s’assurer, et courir le risque, donc subir les conséquences, sachant que jamais un service d’urgence ne refusera de soigner quelqu’un et qu’il existe les systèmes Medicare et  Medicaid pour couvrir les plus pauvres et les plus âgés, ce qu’on ne dit jamais en France. La Sécurité sociale française couvre de plus en plus mal les soins de santé dans des domaines étendus tels que les soins dentaires, les problèmes de vue ou d’audition. L’équipement de la France en dispositifs technologiques médicaux de pointe est très insuffisant et faible par comparaison avec celui des Etats-Unis.  

 

La société française est, comme je l’ai écrit, dans une situation de guerre civile froide, avec épisodes chauds. C’est une société où la liberté se trouve érodée d’une façon de plus en plus nette et où les gens honnêtes ont parfois davantage à s’inquiéter du risque représenté par la police ou la justice que les truands ou ceux qui vivent dans des zones de non droit. C’est une société où la sécurité ne règne pas, où il est bien plus difficile de gagner sa vie, où tout est plus coûteux et complexe, où une accoutumance à diverses pénuries et raréfactions s’installe. C’est une société où, toutes les études le montrent, les gens se sentent moins heureux, sont plus stressés, plus pessimistes. L’absence de sentiment de bonheur, le stress, le pessimisme sont, sans même parler des Etats-Unis, plus prononcés en France que dans la plupart des autres sociétés européennes.

 

Je m’inquiète des sentiments de haine et de frustration qui montent dans les zones de non droit, mais je les trouve effroyablement logiques : ils découlent de ce qu’est la société française aujourd’hui. Et je n’aimerais pas avoir vingt ans dans ce que les médias appellent un « quartier sensible » :  si j’avais vingt ans dans un « quartier sensible », je pourrais aisément être empli de haine et de frustration. La montée de l’islam radical se fait sur ce terreau fertile, et elle est elle-même effroyablement logique.  


Tout comme il existe des zones de non droit, il existe aussi, encore, des quartiers chic et préservés, et les gens qui y vivent ne discernent pas ce qui se vit dans le reste de la société.  

 

Entre ces deux extrémités, il y a des millions de gens ordinaires qui discernent que tout se détraque, qui aimeraient que des améliorations se fassent, qu’un sursaut survienne. Nombre d’entre eux sont accoutumés à tout ce que je viens de décrire et ne perçoivent pas ce que la vie en France a de profondément délabré et étriqué. Ils sont amers, inquiets, mais ne trouvent pas de réponses. Ils ont d’une société comme la société américaine une vision caricaturale : cette vision est entretenue délibérément par les médias. Entretenir cette vision est, en soi, criminel.  

 

Le choix, aux prochaines élections se situera, si on élimine une extrême-gauche qui continue à  prier sur la momie de Lénine, une extrême-droite autoritaire et xénophobe, entre une droite UMP qui ne comprend rien à ce que sont la liberté d’entreprendre, la liberté d’aller et venir et le rôle de la police et de la justice dans un état de droit digne de ce nom, et une gauche façon PS moins autoritaire, mais qui, en dehors de cela, comprend moins encore que l’UMP.  

 

Le choix sera à l’image de ce que devient ce pays, et je préfère, à l’avance, avec tristesse, m’abstenir. Ou bien, ce que je crois plus guère, un peu de lucidité reviendra, ou bien ce pays continuera à marcher sur la tête, jusqu’au précipice.  

 

Pour ce qui me concerne, je peux, jusqu’à présent, me rendre souvent aux Etats-Unis : j’y trouve un oxygène qui me manque ici assez vite. 

 

Un oxygène que oui, j’aimerais voir davantage épandu dans l’atmosphère en France.

 

Guy Millière 

 

PS. Je mets en lien ici deux vidéos qui me semblent constituer un exemple terrible de ce qu’est devenu la France.

La personne qui parle ici tient un blog et s’exprime. Je sais qu’il en existe des milliers comme elle, quoi se taisent, et subissent les humiliations des voyous et celles de la police sans rien dire.

Regardez les deux vidéos successivement. Cela vaut la peine, même si on n’en sort pas indemne.  

http://www.dailymotion.com/video/xdomtj_marie-neige-sardin-libraire-au-bour_news
http://www.dailymotion.com/video/xe3cwx_marie-neige-sardin-apres-sa-garde-a_news#from=embed

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