Photo tirée du film "les convois de la honte" réalisé par Raphaël Delpard *
27 janvier 2011, journée internationale de la déportation, journée de la Shoah.
Pour moi, c'est la journée idéale pour dire à ceux qui se plaignent qu'on parle trop de la Shoah : « je vous emmerde ! » et confirmer que De Gaulle avait raison. Nous sommes en effet un peuple fier (avec 125 prix Nobel nous pouvons) et dominateur (nous disposons de la quatrième armée du monde pour tenir en respect les peigne culs)
C'est aussi la journée pour rappeler comment la SNCF s'est courbée, pour l'amour du dieu argent, devant un petit Juif démocrate du nom de Bob Blumenfield, membre de l’Assemblée de l’Etat de Californie, et représentant d'une banlieue de Los Angeles, la San Fernando Valley.
Pendant la dernière guerre mondiale, la SNCF a accepté de transporter les juifs vers les camps de la mort, et a facturé son client, les nazis, au tarif fort pour ce « service ». Après la fuite de Pétain, elle a continué à présenter ses factures impayées aux allemands, comme un bon fournisseur qui demande paiement une fois son travail terminé.
La SNCF souhaite, comme ses concurrents chinois, coréens et allemands, vendre son TGV à l’État de Californie. Montant prévisionnel : 34 milliards d’euros. Elle convoite également le contrat de la Floride.
Hélas, la SNCF pourrait bien être éliminée de la course, rattrapée par son passé qui pue.
Une loi vient d’être votée à l’unanimité des démocrates et républicains, Chrétiens et Juifs, qui réclame que toute société qui souhaite construire le futur TGV déclare si elle a été impliquée dans le transport de victimes du nazisme (soldats américains, juifs ou autres), et ce qu’elle a fait pour réparer, (en terme d'excuses présentées aux victimes et à leurs familles, et indemnisations)
Ceci, à l'initiative du petit Juif Blumenfield qui s'explique sur le site de l’État de Californie1 :
« Le cauchemar des camps a hanté les survivants, dont certains sont américains, toute leur vie. Et aujourd’hui, la compagnie qui les a transportés vers ces camps de la mort souhaite construire un réseau ferroviaire ici en Californie, et pour certains des survivants, dans leurs propres villes. Le moins que l’on puisse faire, c’est de demander à cette société qu’elle assume la responsabilité de ses actions passées, chose qu’elle n’a jamais fait »
« Les survivants de l’holocauste, les familles de ceux qui ont péri par la complicité de la SNCF, dont beaucoup vivent en Californie aujourd’hui, méritent que la SNCF prenne ses responsabilité tant qu’ils sont encore vivants, car n’oublions pas que ce contrat sera financé par les impôts de ces mêmes personnes »
Pour mémoire, le gouverneur de Californie, Mr Arnold Schwarzenegger dont le père, rappelons le, faisait partie du mouvement nazi, a posé son véto et a refusé d'entériner la loi.
La SNCF n’a jamais, avant l'intervention du petit Bob, reconnu officiellement les faits, peut on lire encore sur le site de l’État de Californie. En 2007, condamnée à indemniser les victimes, la SNCF avait même poussé l'ignominie jusqu'à faire appel… et elle gagna le droit de ne pas payer dont elle pourrait, aujourd'hui, se mordre les doigts.
Rudolph Loebel, 83 ans, psychologue à la retraite vivant à Pacific Palisades (un quartier de Los Angeles) en Californie, est très enthousiaste à l’idée que la SNCF soit mise hors jeu. « Mon père Ephraïm a été arrêté en 43 parce qu’il était juif, et il a été emmené dans un fourgon de la SNCF vers Auschwitz, ou il a été assassiné. Il ne se passe pas une seule journée de ma vie sans que je n’y pense ». « Rien ne peut ramener les morts, dit il, mais au moins la SNCF aurait pu montrer un peu de bonne volonté »
« Si la SNCF (qui a organisé les convois de la honte, et a transporté des enfants, des femmes, des vieillards et des hommes comme de la marchandise) veut un morceau du plus gros contrat que la Californie ait jamais signé, payé par certains des californiens dont la vie a été dramatiquement bouleversée par son rôle actif, il faut qu’elle montre de quelle façon elle se conformera aux principes fondamentaux des droits de l’homme qui régissent notre pays. » ajoute Bob Blumenfield.
Comme l'on pouvait se l'imaginer, la cupidité et l'appât du gain l'ont emporté, et le président de la SNCF, Guillaume Pepy, s'est fendu d'un mea culpa aussi humiliant que sordide, ou les pépètes se cachaient derrière chaque mot de regret.
Et pour bien prendre les américains pour des cons, la SNCF a décidé de transformer une gare désaffectée de Bobigny qui ne vaut pas un clou, située en bordure de nationale dans un quartier pourri, et qu'elle aurait très probablement été amené à raser, en mémorial de la déportation. Inutile de vous dire que vu le quartier – une des 750 zones de non droit français, et les bandes musulmanes violentes qui y font la loi, on peut imaginer dans quel état sera vite rendu le bâtiment, et douter que les Juifs se risqueront à y faire un pèlerinage.
Mais que voulez vous, la SNCF a vraiment très envie de ce contrat.
Jean-Patrick Grumberg
* "Les convois de la honte" cité dans un article du Monde du 9 mars 2010
1 http://democrats.assembly.ca.gov/members/a40/News_room/Press/20100621AD40PR01.aspx