Publié par Michel Garroté le 27 juillet 2011

Pour ce qui me concerne, Anders Behring Breivik, n’a jamais été chrétien, que cela soit « chrétien » ou « chrétien fondamentaliste ». Ses délires sur le christianisme (sur le protestantisme et sur le catholicisme) en témoignent. Anders Behring Breivik n’a jamais été et n’est toujours pas chrétien. Pour ce qui me concerne –et c’est là un avis purement personnel – Anders Behring Breivik est un criminel, un malade et un sectaire de type satanique. Je le verrais volontiers finir ses jours dans une prison psychiatrique de haute sécurité. Sur l’absence de christianisme chez Anders Behring Breivik, je ne suis apparemment pas tout seul à le penser.

Ainsi, Le sociologue Massimo Introvigne, sur ‘La Bussola’, dans une analyse que je ne partage qu’en partie, revient sur Anders Behring Breivik et sur les attentats en Norvège (extraits adaptés) : L'horrible tragédie d'Oslo demande d'abord respect et prière pour les victimes, puis une réflexion sur les mesures de surveillance que les sociétés, comme celle scandinave, qui tiennent à leur caractère ouvert, aujourd'hui ne peuvent manquer d'adopter face aux nombreuses et multiples formes de terrorisme. Parmi ces mesures, cependant, il ne peut et il ne doit y avoir aucune stigmatisation des « chrétiens fondamentalistes » et présentés comme des criminels et des terroristes potentiels. Il est vraiment regrettable que la police norvégienne, immédiatement reprise par les médias du monde entier, ait initialement présenté le kamikaze (ndmg – qui n’est pas kamikaze, vu qu’il vit toujours), Anders Behring Breivik, comme un chrétien fondamentaliste, et qu'en Italie certains médias l'aient même défini – à tort – comme catholique. L'incident montre simplement comment aujourd'hui « fondamentaliste » est un mot utilisé de manière générique et imprécise pour désigner toute personne ayant des idées extrêmes ou plus généralement de « droite », et une référence, même vague, au christianisme. Et depuis que l'attaque à Oslo a été attribuée à un adepte du fondamentalisme, comme un terroriste potentiel. Justement, quelques jours avant l'attentat d'Oslo, l'Observatoire sur l'intolérance et la discrimination contre les chrétiens de Vienne avait envoyé, aux responsables de la Commission européenne, un volumineux mémorandum sur les dangers de l'utilisation du terme « fondamentalisme » qui devient un instrument de discrimination anti-chrétienne. Le terme « chrétien fondamentaliste » a bien sûr un sens précis. Il remonte à la publication aux Etats-Unis entre 1910 et 1915 des brochures ‘The Fundamentals’, une critique militante des théologies protestantes libérales, de la méthode historico-critique dans l'interprétation biblique et de l'évolutionnisme biologique. Un fondamentaliste insiste sur une interprétation littérale et traditionnelle de la Bible, refusant toute approche herméneutique qui prenne en compte les sciences humaines modernes et de cette interprétation, déduit des principes moraux et théologiques ultra-conservateurs. Anders Behring Breivik n'est pas un fondamentaliste.

Nous pouvons savoir beaucoup de choses sur ses idées à partir de son profil Facebook – supprimé, mais pas avant que quelqu'un ne l'ai sauvegardé et mis en ligne -, de plus de soixante pages d'interventions sur un site anti-islamique norvégien, également disponible en anglais et surtout de son livre de 1’500 pages, « 2083, Une Déclaration d'Indépendance européenne », signé « Andrew Berwick » et envoyé à un certain nombre d'amis et de journaux le 22 juillet, quelques heures seulement après le massacre. Et posté sur Internet le 23 juillet par Kevin Slaughter, un ministre de l'Église de Satan fondée en Californie par Anton Szandor LaVey (1930-1997), qui aujourd'hui, a le plus grand nombre d'adeptes en Scandinavie. De sa page Facebook, il apparaît qu'un des intérêts principaux de Breivik était constitué par la Franc-Maçonnerie. Ceux qui ont consulté le profil de Breivik sur Facebook ont été frappés par une photographie qui le représente en tablier maçonnique, comme membre d'une loge qui est l'une des loges qui administrent les trois premiers degrés de l'Ordre norvégien des Maçons, la franc-maçonnerie régulière en Norvège. Breivik fait partie de la Søilene, l'une des loges de cet ordre à Oslo, qui bien sûr n'a en soi rien à voir avec l'attentat. Ces loges pratiquent le rite dit suédois. Aucun fondamentaliste protestant ne diffuserait sa photographie en tenue maçonnique : le fondamentalisme, au contraire, est très hostile à la franc-maçonnerie (ndmg – je préfère quant à moi éviter des formules telles que « fondamentaliste protestant » qui ne font qu’augmenter la confusion). Il ne s'agit pas non plus d'un intérêt passé : la photo a été publiée en 2011, et, auparavant, en 2009. Breivik proposait une collecte de fonds "pour ma loge". Ajoutons que la passion de Breivik pour le jeu de rôle en ligne ‘World of Warcraft’ et pour une série télévisée sur les vampires, plutôt salace, ‘Blood Ties’ , ainsi que l'amitié déclarée pour le gestionnaire du principal site norvégien à caractère pornographique, « malgré sa moralité effilochée » dixit Breivik – pour ne pas mentionner le fait que l'un des destinataires de son mémoire est un sataniste – tout cela constitue des traits qui seraient absurdes pour un fondamentaliste chrétien. Les tons rappellent plutôt Pim Fortuyn (1948-2002), le politicien gay hollandais, fondateur d'un mouvement populiste anti-islamique.

Si une partie de l'ouvrage apprécie la famille traditionnelle, Breivik dit ailleurs qu'il considère l'avortement acceptable – quoique dans un nombre limité de cas – et révèle aussi « avoir mis de côté deux mille euros » qu'il entend dépenser « pour une escort-girl de haute qualité, un véritable top-model, une semaine avant l'exécution de ma mission » (mission terroriste). Les textes – qui révèlent d'amples quoique désordonnées lectures – ne sont pas ceux d'un simple fou, même, s’il y a, des traits de mégalomanie et des contradictions évidentes. La principale préoccupation de Breivik n'est pas la religion, mais la lutte contre l'islam qui menace, selon lui, d'engloutir l'Europe – sans parler d'un pays comme la Norvège – avec l'immigration. Ses idées ne sont, bien sûr, pas très originales – et certains des auteurs cités par Breivik, dont il propose, dans son livre "2083", une sorte d'anthologie, sont tout à fait respectables – mais la théorie est déclinée dans des tons qui, parfois, deviennent paranoïaques et racistes. Le but premier de Breivik est d'arrêter l'islam – d'où son dégoût pour le gouvernement norvégien, perçu par Breivik comme favorable à une immigration musulmane aveugle – et pour cela, il cherche des alliés n'importe où. Breivik raconte avoir volontairement choisi d'être baptisé et confirmé dans l'Eglise luthérienne de Norvège à quinze ans – sa famille, riche et agnostique, lui avait laissé le libre choix – mais il est convaincu que les communautés protestantes sont désormais mortes et ont succombé à l'idéologie multi-culturaliste et philo-islamique. Dans un premier temps, écrit-il, les protestants devraient rejoindre l'Église catholique. Mais l'Eglise catholique elle aussi a été vendue à l'islam quand le pape actuel a décidé de poursuivre le dialogue interreligieux avec les musulmans. Breivik menace Benoît XVI, écrivant que le pape « a abandonné le christianisme et les chrétiens européens et qu'il doit être considéré comme un pape lâche, incompétent, corrompu et illégitime ». Une fois éliminés les protestants et le pape, on pourra, selon Breivik, organiser un grand « Congrès chrétien européen » d'où naîtra une « Église européenne » complètement nouvelle, identitaire et anti-islamique (ndmg – mêmes les sectes sataniques s’autoproclament « Eglise »…). Une référence fréquente est souvent faite par Breivik à la English Defence League – avec qui il semble qu'il y ait eu des contacts directs – un mouvement anti-islamique "de la rue" qui est régulièrement accusé d'être raciste.

L'accent chez Breivik est toujours mis sur la lutte contre l'islam. Quiconque est un ennemi, réel ou potentiel, des musulmans, devient un allié potentiel : ainsi, les athées militants, assez fréquent en Norvège, que Breivik invite à combattre l'islam, et pas seulement le christianisme; de même, les homosexuels, qui note-t-il, dans un monde dominé par les musulmans seront persécutés. Sans surprise non plus, le contact avec l'Église de Satan, qui prêche une forme de satanisme "rationaliste" louant la suprématie du fort sur le faible et les vertus du capitalisme débridé, selon les théories de l'écrivain américain d'Ayn Rand (1905-1982), théories souvent citées par le terroriste, et qui, en Scandinavie, s'en prend souvent aux immigrés. Même les Roms, selon Breivik, auraient été réduits en esclavage dans l'Inde et réduits à leur misérable condition actuelle non par les populations hindoues – comme l'enseigne la majorité de l'historiographie actuelle – mais par les musulmans. Donc – un autre trait qui le distingue de beaucoup d'extrême-droites en Europe – Breivik semble être relativement favorable aux Roms, les incite à lutter contre l'islam et leur promet dans sa nouvelle Europe, un État libre et indépendant (ndmg – je note que Breivik, dans sa confusion hallucinante, veut sa « nouvelle Europe » à lui qui est aussi son « Eglise européenne » à lui). Parmi ces références éclectiques, le christianisme n'est pas dominant. Il cite de nombreux auteurs, mais son père spirituel est le blogueur norvégien anonyme anti-islamique « Fjordman », qui en 2005 avait un million de lecteurs, mais qui ferma son blog sans avoir jamais été identifié. Breivik republie un de ses essais selon lequel, après le Moyen Age, le christianisme – dont les seuls aspects positifs étaient selon lui d'origine païenne – « est devenu pour l'Europe une menace pire que le marxisme ». Les « Justiciers des Templiers » de Breivik devaient opérer en trois phases de « guerre civile européenne ». Dans la première (1999-2030), ils devraient réveiller la conscience endormie des Européens à travers des « attaques-choc de cellules clandestines », libérant des « groupes d'individus qui utilisent la terreur » : des groupes petits, voire d'une ou deux personnes. Dans la deuxième (2030-2070) on devrait selon lui passer à la « guérilla armée » et aux « coups d'Etat ». Dans la troisième (2070-2083), à la véritable guerre contre les immigrés musulmans. Breivik est conscient que les attaques de la première phase transformeront ceux qui les accompliront en terroristes détestés par tout le monde. Mais c'est la forme de « martyre Templier » à laquelle il se dit disposé. Les cibles des « attaques-choc » sont les partis politiques : les travaillistes norvégiens d'abord ; mais sont également signalés quatre partis italiens. En Italie, il y aurait, selon Breivik, 60’000 « traîtres » à frapper, conclut Massimo Introvigne sur ‘La Bussola’. Les Chrétiens n’ont rien à voir avec le satanique norvégien Breivik…

Michel Garroté

Reproduction autorisée avec les mentions ci-dessous :

©  Michel Garroté 2011 http://dreuz.info/

http://www.labussolaquotidiana.it/ita/articoli-oslo-i-cristianinon-centrano-affatto-2559.htm

http://benoit-et-moi.fr/ete2011/0455009f1b06c3101/0455009f2d09e0302.html

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