Publié par Ivan Rioufol le 3 novembre 2011

 

L'incendie criminel, tôt ce mercredi, des locaux de Charlie Hebdo est une violence faite aux Français, à la démocratie, à la laïcité, à la liberté d'expression. Cet acte intervient alors que l'hebdomadaire satirique fait paraître, ce même jour, un numéro titré "Charia Hebdo".
 
Il propose en Une un dessin de Mahomet qui déclare, hilare : "100 coups de fouet, si vous n'êtes pas morts de rire". Les pages intérieures déclinent, avec l'habituel mauvais goût du journal et un sarcasme qui était alors réservé à Jésus, au Pape, aux curés et aux rabbins, les aberrations misogynes de la charia, la loi islamique qui sera appliquée en Libye, en Tunisie et en Egypte, à l'issue du "Printemps arabe", si précocement hivernal.
 
L'impertinence dont l'islam radical est ici la cible vient rompre avec son statut de religion intouchable, imposé par les intimidations des islamistes et par une dialectique assimilant la critique à du racisme anti-arabe ou à de l'islamophobie. L'ensemble du numéro de Charlie Hebdo, gentiment potache, reste cependant très en deçà de ce que le christianisme endure, avec miséricorde le plus souvent, comme insultes et moqueries depuis Voltaire et les bouffeurs du curé.
 
Charlie Hebdo n'est pas ma lecture préférée. Mais dès mardi soir, sur RTL, je lui avais tiré mon chapeau pour avoir eu le courage de rétablir un premier équilibre dans l'approche critique des religions, en renouant avec notre culture frondeuse et gouailleuse. C'est pourquoi l'attentat qui a détruit, quelques heures plus tard, les locaux de mon confrère est, aussi, une agression contre la France et son bien le plus précieux : la liberté de dire.
 
Or c'est bel et bien la survie de cette liberté qui est en jeu, avec la montée de l'islamisme dans certaines cités et le recul parallèle de la sécularisation qui s'observe chez les enfants d'immigrés de culture musulmane. C'est en France qu'un philosophe, Robert Redecker, vit encore sous protection policière pour avoir critiqué Mahomet en 2006, dans Le Figaro. Dans Le Monde du 14 octobre, la démographe Michèle Tribalat remarque: "Si l'islam est encore une religion minoritaire, il a pourtant déjà changé nos vies dans un domaine vital à la démocratie : la liberté d'expression". L'islam politique a fait ressurgir la question religieuse, en tentant d'imposer un délit de blasphème dont Charlie se serait rendu coupable. C'est inacceptable.
 
Cet acte de censure est gravissime car il est celui d'un nouveau fascisme. Il déshonore l'islam et doit évidemment être condamné sans ambiguïté par les autorités musulmanes.
 
Jean-Luc Mélenchon, qui flatte électoralement le communautarisme musulman, attribue cet attentat à "une poignée d'imbéciles, d'abrutis" qu'il ne veut pas confondre  avec "la masse de nos compatriotes musulmans qui pratiquent leur foi en toute tranquillité". Il a sûrement raison. Mais il revient aux musulmans eux-mêmes de le dire et de se désolidariser clairement de cette régression obscurantiste, en démontrant ainsi qu'ils acceptent les règles, certes désagréables pour tous les croyants, d'une démocratie laïque se méfiant, depuis les Lumières, du fanatisme religieux et des intégrismes. 
 
Je rêve d'une grande manifestation unitaire des Français de toutes confessions pour défendre Charlie Hebdo et, à travers lui, la démocratie en danger. Je rêve, ai-je bien dit…
 
© Ivan Rioufol, publié avec son aimable autorisation
L’article original peut être consulté sur le blog d’Ivan Rioufol

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