Publié par Michel Garroté le 27 août 2012

Michel Garroté – Les Etats-Unis, la Turquie et la France font, depuis quatre semaines, des déclarations sur le conflit syrien qui constituent, aux yeux de quelques-uns, l’équivalent d’une quasi-déclaration de guerre à Bachar al-Assad. Le journal panarabe Al Hayat, qui passe pour proche de certains milieux saoudiens sunnites, en est pratiquement convaincu : l’Occident et divers pays musulmans finiront par intervenir militairement en Syrie.

Il est vrai que la dictature syrienne, la théocratie iranienne et les terroristes du Hezbollah ont, encore tout récemment, réaffirmé publiquement, d’une part, leur indéfectible alliance ; et d’autre part, leur volonté commune de nuisance dans toute la région.

L’on peut donc aisément comprendre que l’Arabie saoudite ne souhaite pas rester en dehors du conflit régional qui se prépare. Rappelons que ce conflit est – notamment mais pas uniquement – une guerre d’influence entre sunnites et chiites. Dans ce cadre, les Etats-Unis d’Obama et la France de Hollande ne feront rien sans l’accord du camp sunnite. Certains même diront : ils feront ce que voudra le camp sunnite. A cet égard, je continue de me demander si le plus raisonnable ne serait pas de laisser les sunnites et les chiites s’entretuer ; et d’attendre simplement la fin du conflit, avant de réorienter la politique occidentale au Proche et au Moyen Orient.

Ainsi donc, Hazem Saghieh, dans le quotidien panarabe Al Hayat, écrit (voir en bas de page le lien vers la source) : « Depuis un mois environ, les signaux se multiplient quant à la possibilité d’une intervention étrangère dans la crise syrienne. Certains diront sans doute : “Est-ce par amour pour la Syrie ?”. La réponse est non, bien évidemment, et le problème n’a rien à voir avec l’amour ou la haine. Mais parce que l’affaire n’est plus exclusivement syrienne, les chances d’une intervention augmentent. Car, si la question libyenne se limitait à la Libye et la tunisienne à la seule Tunisie, dans le cas de la Syrie c’est le Moyen-Orient qui est remis en cause, là où se forme ou explose le monde post-Ottoman [les pays nés de la fin de l’Empire ottoman en 1920] » (Note de Michel Garroté – La question libyenne ne se limite pas à la seule Libye ; des armes libyennes, conventionnelles et non conventionnelles, se promènent en Afrique entre les mains d’extrémistes incontrôlables. La question tunisienne ne se limite pas à la seule Tunisie, ce pays étant devenu l’un des points de départ régionaux d’islamisme fondamentaliste à vocation mondiale).

Al Hayat : « Le régime syrien, passé maître dans le maniement des “cartes” régionales, a abusé de ce jeu qui se retourne contre lui. La première nouveauté – et la plus importante – concerne les armes chimiques. Le régime a cru malin de révéler qu’il en possédait sans réaliser qu’il déplaçait ainsi le débat à un niveau alarmant. La deuxième question récemment soulevée est celle du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), avec ses activités et son influence. Là encore, le régime a voulu exploiter habilement cette “carte”, mais voilà qu’Ankara accuse Damas d’être derrière les attentats contre ses forces à Gazantiep [le 21 août : 9 morts et 70 blessés]. La troisième nouveauté concerne l’afflux des réfugiés vers la Turquie, dont le nombre approche les 100’000, devenant autant un problème syrien que turc ».

Al Hayat : « Autrement dit, la probabilité d’une intervention augmente à mesure que la crise syrienne déborde de ses frontières. Les mises en garde de la France contre l’embrasement du Liban vont dans ce sens. On peut relever diverses indications ces derniers jours, dont la déclaration du ministre de la Défense français, Jean-Yves Le Drian, évoquant une zone d’exclusion aérienne, la création par les Etats-Unis et la Turquie d’un “mécanisme de coordination complet sur la Syrie”, l’appel de l’Italie à une réunion de ses alliés pour examiner “l’après-Assad” ou encore le retour du porte-avions USS John C. Stennis dans le Golfe ».

Al Hayat : « Il ne faut pas oublier cependant les sérieux obstacles d’une intervention militaire, à commencer par les réactions russe et iranienne, en passant par les peurs occidentales d’Al-Qaida, le calendrier des élections américaines [le 6 novembre], la situation des économies occidentales ou les expériences traumatisantes en Irak ou en Afghanistan et enfin la situation de l’opposition syrienne et la capacité de l’Armée syrienne libre (ASL) à accueillir une intervention étrangère. Mais le plus important est que le régime syrien, en manipulant ce qu’il considère comme ses “cartes”, est en train de précipiter une confrontation inévitable ».

Al Hayat : « En ajoutant la violence sauvage de la répression et le nombre des morts qui approche les 25’000, sans parler des blessés, des défigurés, des détenus et des 3 millions de réfugiés ou déplacés, l’issue devient de plus en plus difficile. Les dirigeants de Damas ont tenu à pousser leur jeu politique et diplomatique à l’extrême, en entraînant la Russie et l’Iran, tandis que militairement ils usent démesurément de leurs forces terrestres et aériennes. Quel plus grand symbole de débordement politique et militaire que le bombardement par un avion syrien de son peuple réfugié sur le territoire irakien », conclut Hazem Saghieh, dans le quotidien panarabe Al Hayat.

Michel Garroté

Rédacteur en chef

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http://www.courrierinternational.com/article/2012/08/27/les-chances-d-une-intervention-occidentale-augmentent

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