Publié par Guy Millière le 21 octobre 2012

L’actualité est chargée. Des événements importants peuvent échapper aux regards. C’est de l’un de ces événements que j’entends traiter ici: la réélection d’Hugo Chavez le 7 octobre dernier pour un troisième mandat de président du Venezuela.

Cette réélection a été peu commentée. Elle a parfois été saluée : par Mélenchon, par exemple, ou par ce qui reste du Parti communiste.

Lorsqu’elle a été commentée, cela a été avec les mots habituels de la langue de bois en vigueur, et les réserves énoncées ont été rares.

Ce qui doit être dit est que cette réélection est logique et que, quoi qu’on ait dit ici ou là, l’opposition à Chavez n’a jamais eu aucune chance : son rôle a été de faire de la figuration. Elle s’est acquittée de son rôle. Elle a connu une défaite qu’elle peut elle-même qualifier d’honorable puisqu’elle a obtenu plus de quarante pour cent des voix. Elle n’a pas présenté le moindre recours et n’a pas parlé de fraude. Elle a permis à Chavez de passer pour un homme qui respecte la démocratie et remet son titre en jeu, alors que ce n’est pas le cas.

Ce qui doit être dit est que Chavez sait agir comme les totalitaires modernes : il ne confisque pas tout le pouvoir politique, et se contente de le dominer aux fins de gagner à chaque fois tout en se payant le luxe de dire qu’il n’est pas un dictateur. Mais s’il ne confisque pas tout le pouvoir politique, Chavez confisque quasiment tout le reste.

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Ce qui doit être dit est que l’économie vénézuelienne est mise en coupe réglée depuis que Chavez est arrivé au pouvoir : les entreprises qui ne sont pas totalement aux mains de l’Etat sont des entreprises totalement dépendantes de l’Etat ou totalement à sa merci. La justice est censée être indépendante, mais les juges qui ne seraient pas du même courant que Chavez disparaissent étrangement et sont remplacés par des fidèles de Chavez, avec pour résultat que la justice est aujourd’hui complètement soumise au président. Quelques médias sont censés être encore indépendants eux-mêmes, mais leurs revenus dépendent du gouvernement ou d’entreprises gouvernementales ou liées au gouvernement, ce qui les rend absolument dociles. Il n’est en fait pas un secteur de la société qui échappe à Chavez, et des comités de quartier ont été établis qui ressemblent fort aux comités de défense de la révolution mis en place à Cuba : on peut parler librement au Venezuela, mais à ses risques et périls.

Ce qui doit être ajouté est que Chavez asphyxie les plus riches, les entrepreneurs, ceux qui pensent autrement, et les incite à se soumettre ou à quitter le pays : son règne a conduit de nombreux Vénézuéliens à partir vers d’autres contrées, et Miami aux Etats-Unis a vu arriver de nombreux Vénézuéliens qui ont rejoint des millions de Cubains et de gens venus d’autres pays d’Amérique latine.

Tout en asphyxiant certaines catégories de la population, Chavez en achète d’autres, et il multiplie les pauvres, comme tout socialiste conséquent, en leur distribuant l’argent venu du pétrole et en leur assurant un niveau de vie décent sans qu’ils aient toujours à travailler.

L’augmentation du prix des matières premières énergétiques fait que Chavez a beaucoup d’argent à distribuer, sous formes de rémunérations fictives, de logements donnés au « révolutionnaires » les plus zélés, d’emplois de fonctionnaires en nombre très conséquent, tout particulièrement des enseignants, recrutés sur la base de leur enthousiasme « révolutionnaire », cela va de soi.

En parallèle, aucun investissement n’est effectué dans le secteur productif ou dans les infrastructures. La propriété privée a été quasiment abolie : ce qui en reste peut faire l’objet d’expropriations du jour au lendemain si Chavez le décide, et il le décide souvent. Toutes les décisions financières et bancaires sont prises sous le strict contrôle du gouvernement.

Chavez maintient en vie, sous perfusion, le régime castriste à Cuba. Il finance les FARC en Colombie et les fournit en armes, et les FARC ont quitté depuis longtemps le marxisme-léninisme pour lui préférer la prise d’otage et le trafic de cocaïne. Il a financé l ’arrivée au pouvoir de gens qui ont les mêmes idées totalitaires que lui, et le même type d’action que lui : Evo Morales en Bolivie, Rafael Correa en Equateur.

Enfin, ce doit être souligné, Chavez n’a cessé d’utiliser l’antisémitisme comme arme politique et organise la persécution des Juifs qui vivent encore au Vénézuela. Il est l’un des alliés majeurs de Vladimir Poutine et du régime des mollahs en Iran. Lors d’une conférence de presse récente à Caracas, il était en compagnie de Mahmoud Ahmadinejad et a applaudi chaleureusement celui-ci lorsqu’il a affirmé sa volonté de rayer Israël de la carte du monde. Chavez a ajouté aux propos d’Ahhmadinejad, qu’ils auraient bientôt l’un et l’autre l’arme atomique, et que son ennemi à lui, Chavez, c’était les Etats-Unis d’Amérique.

Le Venezuela abrite des camps du Hezbollah, sans qu’on sache exactement ce que le Hezbollah vient faire en Amérique latine.

Que quasiment rien de tout cela ne soit dit dans la grande presse est absolument révoltant.

Que des dirigeants politiques occidentaux puissent citer positivement un homme tel que Chavez est répugnant.

Que des gens trouvent des excuses et des circonstances atténuantes à Chavez montre qu’ils ont eux-mêmes des idées totalitaires.

Ce que ceux qui en sont restés aux définitions archaïques du totalitarisme oublient volontiers est que le totalitarisme évolue et sait se faire plus subtil : laisser quelques apparences de liberté tout en détruisant la liberté est plus efficace que tuer à la mitrailleuse lourde ou enfermer dans des camps de rééducation ou de concentration.

Créer une société duale, avec au sommet une nomenklatura dans laquelle existent des entrepreneurs liés à l’Etat, et à la base une vaste clientèle docile et achetée est une recette éprouvée.

C’est sans doute un hasard si c’est celle dont s’inspire un homme à qui Hugo Chavez a transmis son chaleureux soutien : Barack Obama. Intéressant, non ?

Reproduction autorisée, avec la mention suivante : © Guy Millière pour www.Dreuz.info

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