Publié par Jean-Patrick Grumberg le 23 janvier 2013
Composition de la prochaine Knesset
Composition de la prochaine Knesset

Yair Lapid a passé une année complète à répéter qu’il ne souhaite pas être premier ministre, qu’il s’occupera des classes moyennes, améliorera le coût de la vie et fera baisser les prix de l’immobilier. Ses positions de politique étrangère ne diffèrent pas fondamentalement de celles du Likud.

Les israéliens ont entendu le message, et c’est le message qu’ils voulaient entendre : ils lui ont donné le second plus fort vote de cette élection législative.

Coût de l’immobilier, préoccupation numéro Un

Traditionnellement, en Israël, un jeune couple qui a laissé derrière lui l’armée et s’est engagé dans la vie professionnelle a trois objectifs : se marier, prendre un crédit immobilier et faire trois ou quatre enfants. 80% des israéliens, le taux le plus élevé au monde il y a encore une dizaine d’année, sont propriétaires de leur appartement, et le sujet revient dans toutes les conversations, quelle que soit les opinions politiques de chacun.

Volé en éclat il y a 6 ans.

Depuis 6 ans, les français ont été injustement accusés d’avoir créé une bulle immobilière et d’avoir fait exploser les prix, qui ont été multipliés par 2, voire par 3 ou plus pour les quartiers les plus recherchés de Tel Aviv et de Jérusalem.

La réalité est bien entendu différente. Qui peut imaginer un acheteur demander à payer plus cher ? Ce sont les israéliens qui vendaient, qui ont fait monter les prix, et les français, principaux acheteurs de ces dernières années, n’ont eu d’autre choix que d’acheter ou laisser.

C’est là que Yair Lapid a raflé 19 sièges

Yesh Atid de Lapid !
Yesh Atid de Lapid hier soir !

En promettant de s’attaquer au problème numéro un des israéliens : l’accession à la propriété, garante d’un enracinement dans la terre qui va bien au delà de la simple logique économique, Lapid a dit vouloir s’occuper du coût de la vie, et les israéliens, ne voyant rien venir de Netanyahu, ne perdant rien bien que ce dernier n’ait aucune expérience politique, lui ont donné sa chance.

Netanyahu aux commandes, sans les vieux suceurs de sang

La seconde décision des israéliens a été de reconduire Netanyahu à la tête pays, mais de lui demander de se débarrasser de son entourage. Exit la vieille garde, exit Barack. Lieberman ? La question n’est pas d’actualité.

Netanyahu est particulièrement concentré sur la politique étrangère – et c’est ce qui lui aura fait perdre des sièges, mais il a su résister à Obama. Le message des israéliens, là encore, est clair : ils ne veulent pas des nostalgiques des accords d’Oslo, des pleurnichards du dialogue avec l’OLP, et d’un gouvernement qui plie comme une brindille devant Obama.

En politique étrangère, ils ont reconduit la stratégie du jeu d’échec et de l’évitement ferme contre Obama, le statu quo sans concession avec les arabes de Palestine, et la ligne rouge de Bibi contre l’Iran génocidaire.

Ils n’ont pas choisi le durcissement à droite que l’ensemble des médias avait prédit. Et ils n’ont pas considéré que Netanyahu faisait croitre le danger de destruction promis par ses ennemis, dont l’occident refuse de mentionner l’existence.

La page des territoires contre la paix est tournée

Pour ceux qui douteraient, qu’ils examinent donc la faible nostalgie, c’est le moins qu’on puisse dire, pour les propositions de Tzipi Livni, arc-boutée sur une politique étrangère de compromis avec l’OLP, pour ne pas être « isolé » du monde occidental, ou « absorbé » dans un état binational ! Les israéliens sont soignés de l’angélisme crasseux de la gauche, par lequel un retrait territorial apporterait une paix magique. La page des territoires contre la paix est heureusement tournée.

Les israéliens ont également abandonné toute admiration pour le modèle européen, considéré il n’y a pas si longtemps comme « avancé ». Ils voient l’Europe s’enfoncer toujours plus dans la récession et l’invasion islamique, toujours plus revenir vers son vieux démon antisémite – les antisionistes ne trompent aucun israélien – et, de fait, accordent une indifférence hautaine et presque amusée aux impuissantes attaques des ridicules médias européens. Leur agent en Israël, le quotidien Haaretz, tombe aux oubliettes, et n’est plus lu que par les retraités nostalgiques de « la paix maintenant » qui se réunissent, avec cane et sonotone, au café Tamar de Sheinkin Street à Tel Aviv. Cela aussi s’est concrétisé dans le vote pour la jeune garde incarnée par Benett et Lapid, pourtant sans expérience, et contre le parti travailliste.

66.6% de participation, les israéliens sont tout sauf blasés

Aux gauchistes qui portent un regard méprisant sur la capacité des israéliens à décider pour eux-même, il me semble utile de pointer du doigt que le taux extrêmement fort de participation, 66.6%, indique que les israéliens sont tout sauf indifférents et blasés de la vie politique, tout sauf incompétents, et tout sauf manipulables par les médias – jusqu’à un certain point puisque la propagande de gauche ne permet pas à celle-ci de remonter, mais leur évite l’écroulement total.

A ces même gauchistes, il convient de dire aussi que le refus de durcir par la droite le gouvernement de Netanyahu montre que les israéliens ont été plus sensibles au coût de l’immobilier et de la vie, et moins intéressés à « coloniser » des « terres » dont le statut n’est clair que pour les antisionistes. Même Bennet, porteur des valeurs sionistes, n’a pas dit un mot sur l’annexion de la Judée et Samarie pendant toute sa campagne, mais a évoqué le coût de la vie.

Surprise, la bobosphère telavivienne a voté centre droit et droite

J’ai visité hier plusieurs bureaux de vote de Tel Aviv, la ville internationale et traditionnellement de gauche.

bureau vote Tel Aviv

Le spectacle était le même partout : une marée humaine de couples baba cool, des bobos, des jeunes de la startup économie, avec une ribambelle de poussettes et d’enfants (Israël est le seul pays où les jeunes urbains font beaucoup d’enfants, ce qui désespère ceux qui tentent de brandir le danger démographique que représenterait les arabes israéliens).

Bureau vote Tel Aviv 2

Tel Aviv est le fief de la gauche radicale, de Meretz, de « la paix maintenant », des pro-palestiniens, sensibles aux idées sociales et « progressistes » de l’Europe.

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Le vote des bobos montre que les deux missiles du Hamas sur Tel Aviv ont fortement marqué les esprits : 20.73% pour Yair Lapid. 17.51% pour Netanyahu, les travaillistes ne récoltent que 16.83%, et sans surprise, Meretz 14.34%, ce qui ne doit pas être loin de représenter la totalité de leurs électeurs.

Lorsque la bobosphère telavivienne vote pour le centre droit (centre gauche diront certains) et la droite, c’est que des changements profonds s’opèrent dans le pays où coule le lait, le miel, et la High Tech.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour www.Dreuz.info

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