Publié par Guy Millière le 9 juillet 2013

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Ce qui se passe présentement en Egypte constitue une débâcle pour la politique islamique de l’administration Obama : celle-ci, comme je l’ai expliqué dans de précédents articles et dans mon livre Le désastre Obama*, a tout fait pour que les Frères musulmans arrivent au pouvoir dans l’ensemble du monde sunnite. Comme elle a tout fait pour que l’Iran puisse se sanctuariser en arrivant au seuil de l’arme nucléaire. La stratégie Obama a réussi très largement, jusqu’à l’enlisement dans la guerre civile en Syrie. Le soutien apporté par la Russie à Bachar El Assad, le refus par l’Iran d’accepter un régime de transition à Damas ont abouti au carnage qui se poursuit, à un affaiblissement des positions du Qatar, principal soutien des Frères musulmans dans la région, et à un affaiblissement aussi des positions de la Turquie, autre soutien des Frères musulmans dans la région (de manière moins affirmée que le Qatar en raison des pressions de la Russie sur la Turquie).

La chute de Mohamed Morsi et la prise de pouvoir par l’armée en Egypte sont en train de parachever ce qui a commencé avec l’enlisement dans la guerre civile en Syrie.

L’acteur principal de la chute de Mohamed Morsi et de la prise de pouvoir par l’armée en Egypte n’est pas le général al-Sisi, qui a été l’exécutant, mais la monarchie saoudienne, qui tient désormais les cordons de la bourse, et qui est prête à financer un retour au calme provisoire. Si tant est que celui-ci puisse avoir lieu. Derrière le général Al-Sisi, la monarchie saoudienne soutient les mouvements salafistes, principalement le parti al Nour et semble en quête d’un dictateur qui pourrait endosser le costume d’Hosni Moubarak, sans être Hosni Moubarak.

Les Frères musulmans choisissent la stratégie de l’affrontement, car ils discernent qu’accepter d’être éliminés du jeu égyptien impliquerait leur affaiblissement partout où ils sont au pouvoir présentement, la déstabilisation du régime qatari (le changement d’émir récemment est une tentative de limiter les dégâts), et celle du régime turc. Ils discernent aussi que c’est de cette façon qu’ils pourront imposer leur maintien dans le jeu égyptien, et ils savent qu’ils ont le soutien de l’administration Obama pour cela.

Si la stratégie saoudienne fonctionne, l’Egypte pourrait se stabiliser, provisoirement : pas davantage que provisoirement au vu de la situation économique catastrophique du pays. Et la vague islamiste voulue par l’administration Obama pourrait se trouver endiguée.

Si elle ne fonctionne pas, l’Egypte glissera vers le chaos et la guerre civile. Comme l’a noté Daniel Greenfield dans Frontpage magazine, l’administration Obama, en tout cas, a perdu une bataille très importante, mais elle n’a pas perdu la guerre, d’où la stratégie d’affrontement des Frères musulmans, et l’administration Obama a un « plan B » : le chaos et la guerre civile qu’interrompraient des élections très rapides, dans lesquelles un candidat soutenu par les Frères musulmans, sans être des Frères musulmans, serait à même de l’emporter, avec le soutien des Etats-Unis et, sans doute, des Européens. Le candidat choisi implicitement, pour l’heure, par l’administration Obama semble être Mohamed El Baradei. C’est ce choix implicite qui explique pourquoi la nomination de Mohamed El Baradei au poste de Premier ministre par interim fait l’objet de tant de tractations et se trouve rejetée par les salafistes soutenus par l’Arabie Saoudite (comme l’a expliqué Michel Garroté, Mohamed El Baradei est un homme dangereux, qui a, de facto, facilité la nucléarisation de l’Iran).

Imaginer qu’une administration américaine soutiendrait l’islam radical dans sa version la plus anti-américaine et anti-occidentale était impensable depuis les années Carter. Avec Obama, c’est non seulement redevenu pensable, c’est devenu une réalité. Imaginer que les Etats-Unis, après avoir permis et favorisé le renversement de plusieurs dirigeants alliés des Etats Unis dans le monde arabe, après avoir facilité le glissement vers l’islam radical de la Turquie sous Erdogan, et après avoir facilité l’avancée de l’Iran vers l’arme nucléaire, puisse se retrouver en opposition frontale avec l’Arabie Saoudite était devenu pensable au moment de la chute de Moubarak, c’est devenu une réalité aussi.

Le régime saoudien est un régime féodal, autoritaire, largement obscurantiste, mais c’est un régime du statu quo dans le monde musulman. Entre un régime du statu quo, et l’islam radical dans sa pire version (doit-on rappeler une fois encore que les Frères musulmans sont imprégnés d’expansionnisme djihadiste et de national-socialisme ?), l’administration Obama a choisi, depuis le départ, l’islam radical dans sa pire version.

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Pour Israël, pour la sécurité régionale et la sécurité du monde, on peut souhaiter que la stratégie saoudienne fonctionne. Et que le plan B de l’administration Obama échoue.

Pour le futur des Etats Unis, on peut aussi souhaiter que le plan B de l’administration Obama échoue.

Cela ne sauvera pas l’Egypte du désastre. Cela ne mettra pas fin à la guerre en Syrie ou au péril nucléaire iranien. Mais ce sera un pas dans la bonne direction.

Je n’ai pas dit un mot ici des « démocrates égyptiens » : c’est une espèce qui n’existe que dans l’oeil des journalistes occidentaux. Un pays où la faim menace, où l’analphabétisme touche près de la moitié de la population, et où plus de quatre vingt pour cent de la population veut l’application la plus stricte de la charia est très éloigné de ce qu’on peut appeler démocratie, et c’est un pays où le choix est entre le mal et un moindre mal.

On me posera peut-être encore la question : pourquoi, diable, Obama s’est-il allié avec l’islam radical dans sa pire version ? Réponse : parce que c’est un gauchiste tiers-mondiste anti-occidental persuadé que l’impérialisme américain a été une force d’oppression, que les Frères musulmans sont une force révolutionnaire conforme aux aspirations gauchistes tiers-mondistes anti-occidentales, et que leur accession au pouvoir et un retour à une forme de néo-califat islamiste serait juste et répondrait aux frustrations du monde arabe.

Vous ne comprenez pas ? C’est parce que vous n’êtes pas gauchiste tiers-mondiste anti-occidental.

Dans ce cas, vous ne comprenez pas non plus, j’en suis sûr, pourquoi Obama a consacré son voyage en Afrique a deux sujets cruciaux pour lui : la promotion du mariage homosexuel, et celle des énergies alternatives compatibles avec le « développement durable », dans des pays où on manque de développement, et où on se fiche à juste titre des lubies écologistes pour bobo nanti.

Vous n’êtes décidément pas gauchiste tiers-mondiste anti-occidental.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière pour www.Dreuz.info

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