Publié par Guy Millière le 21 septembre 2013

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Il m’a été demandé quelquefois ces derniers jours s’il ne me semblait pas plus souhaitable que les islamistes sunnites, Frères musulmans, salafistes, membres d’al Qaida, l’emportent en Syrie plutôt que le régime Assad.

Je répondais que, dans l’absolu, voir des islamistes prêts à exterminer les Chrétiens et les Alaouites, l’emporter sur le régime Assad et ses complices iraniens et membres du Hezbollah, aurait pu présenter l’avantage de couper la continuité chiite allant de Téhéran à Beyrouth, mais que voir ces gens gagner n’avait rien pour susciter mon enthousiasme : entre fanatiques islamistes et fanatiques islamistes, je ne choisis pas. Je répondais que, pour Israël, voir éventuellement un pays pour partie aux mains d’al Qaida sur ses frontières ne me semblait pas infiniment plus souhaitable qu’avoir un pays dominé par l’Iran des mollahs sur ses frontières. Je répondais surtout que la question ne se posait pas, car j’avais du mal à imaginer une intervention décisive et ferme de Barack Obama qui, tout en aimant beaucoup les islamistes sunnites, a aussi une volonté de se poser en position de carpette devant les mollahs.

On sait ce qui s’est passé : Barack Obama a agi de telle façon qu’Assad est resté au pouvoir, que la continuité chiite n’est pas coupée, que la Russie est devenue maître du jeu dans tout le Proche-Orient, et que les Etats-Unis se sont auto-éliminés de la région.

Que les Etats-Unis se soient auto-éliminés de la région ne va pas pour autant empêcher l’administration Obama d’agir.

Ses prochains mouvements vont très vraisemblablement concerner Israël, d’une part, et l’Iran d’autre part.

Pour ce qui concerne Israël, on peut s’attendre à une intensification des pressions américaines sur Israël aux fins d’obtenir un accord de « paix » et la création d’un « Etat palestinien » en Judée-Samarie. On peut s’attendre à ce qu’Israël ne ratifie pas un tel accord : même si, ce que je n’ose imaginer, Netanyahou acquiesçait, le peuple israélien serait consulté et voterait, selon toute vraisemblance, négativement. On peut imaginer, je l’ai déjà écrit, que l’administration Obama s’attende à cette non ratification par Israël, et soit prête à utiliser celle-ci comme un moyen d’incriminer Israël et d’envisager la création d’un Etat palestinien aux Nations Unies, sans que les Etats-Unis utilisent leur droit de veto. Si une personne au sein de l’administration Obama est à même d’aller en ce sens, c’est bien Samantha Power, et elle est désormais ambassadrice des Etats-Unis aux Nations Unies. Je ne pense pas qu’Obama l’ait nommée à ce poste par hasard.

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Pour ce qui concerne l’Iran, on peut s’attendre à ce que l’administration Obama fasse tout pour obtenir un accord avec Hassan Rouhani concernant le nucléaire. Barack Obama a dit avoir échangé plusieurs lettres amicales avec Hasan Rouhani depuis l’élection de celui-ci. Ils seront l’un et l’autre à New York le même jour aux Nations Unies dans les jours qui viennent, et, comme John Bolton vient de le déclarer, il serait très étonnant qu’il n’y ait pas une rencontre et une poignée de main. L’accord avec Rouhani consisterait, pour celui-ci, à faire (avec l’assentiment de son maître, Ali Khamenei) quelques concessions verbales et mineures, à dire que l’Iran ne veut pas de la bombe atomique, mais seulement de l’énergie nucléaire : un homme qui a été le négociateur de l’Iran en la matière pendant des années et qui est parvenu à rouler les Occidentaux dans la farine de pois chiche pendant des années est à même de trouver les phrases requises, et sait qu’il a en face de lui l’auditoire crédule et débile requis. Barack Obama évoquerait une dénucléarisation régionale qui lui fournirait un deuxième moyen d’incriminer Israël. Si une personne au sein de l’administration Obama est à même de rêver à un tel scénario, c’est bien Valerie Jarrett, et elle est la principale conseillère d’Obama depuis sont entrée à la Maison Blanche : elle a négocié avec l’Iran ces derniers mois, sur le sol du Qatar).

Ce qui semble totalement exclu est l’autorisation par l’administration Obama d’une frappe israélienne contre les installations nucléaires iraniennes. C’était exclu il y a un an. C’est plus exclu encore aujourd’hui. Et j’ai du mal à imaginer qu’Israël agisse sans autorisation, même tacite, de l’administration Obama, même si ce n’est pas totalement impensable.

Dois-je dire que les actions de l’administration Obama contre Israël et en faveur d’une « détente » avec l’Iran des mollahs seraient accueillies avec enthousiasme en Europe ?

Dois-je ajouter que la période, pour Israël, est particulièrement périlleuse ?

Dois-ajouter qu’il est absolument paradoxal que la Russie se retrouve en position d’être le pays sur qui Israël devra compter pour freiner les ardeurs de l’administration Obama et pour limiter les dégâts créés par celle-ci ?

Vladimir Poutine est un adepte du réalisme politique le plus froid. Son objectif était de faire mordre la poussière à Obama : c’est fait. Son objectif était d’offrir une revanche à la Russie sur les Etats-Unis : c’est fait aussi. Son objectif était de réduire à néant les projets d’Obama de rendre le Proche-Orient plus sûr pour les Frères musulmans, et de briser l’islamisme sunnite, qui menace la Russie : c’est fait là encore.

Vladimir Poutine pousse présentement son avantage en resserrant ses liens avec l’Iran des mollahs, en se proposant de leur fournir des systèmes de défense anti-missiles et une autre centrale nucléaire : il veut clairement un Iran fort et sanctuarisé qu’il pourra utiliser ensuite à sa guise.

Il ne veut pour autant pas la destruction d’Israël. Il serait très improbable qu’il mettre son droit de veto à la création d’un Etat palestinien aux Nations Unies, mais il peut agir en amont, et faire que l’Autorité Palestinienne ne dépose pas de projet : son poids sur l’Autorité palestinienne est désormais plus grand que celui de l’administration Obama.

Il est très probable qu’il laisserait, le cas échéant, Obama passer un accord avec Rouhani, mais il est improbable qu’il fustige le nucléaire israélien.

Les atouts d’Israël sont d’avoir une population d’origine russe importante, d’être une puissance technologique, d’être un pôle de stabilité au milieu d’une zone de tempête et d’être aussi une puissance énergétique désormais.

Dans un monde où les Etats-Unis sont ce qu’ils sont sous Obama et où, dès lors, les valeurs éthiques qui ont guidé la politique étrangère américaine depuis si longtemps ne sont plus du tout sur le devant de la scène, celles-ci ne jouent plus aucun rôle, dans un monde où l’Europe est ce qu’elle a toujours été, un conglomérat pusillanime et sans grands scrupules, Israël doit s’adapter, pour survivre. Nous sommes à l’ère Poutine.

Celle-ci durera au moins jusqu’à la fin de 2016. Ensuite ? Comme disait Isaac Newton, je ne construis pas d’hypothèses spéculatives.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière pour www.Dreuz.info

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