Publié par Guy Millière le 18 janvier 2014

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Voici quelques jours, une exécution en Ohio ne s’est pas passée de manière aussi rapide que c’était prévu. Le condamné à mort a mis plus de vingt minutes à expirer, et il a, semble-t-il souffert. Nombre de journaux en France se sont aussitôt apitoyés en songeant au « pauvre homme ». Les discours des opposants à la peine de mort ont suivi immédiatement, accompagnés d’un flot de propos traitant les Etats Unis de pays barbare et abject, et les plaçant sur le même plan que la Chine, l’Iran ou la Corée du Nord. Ce flot a été mêlé de propos soulignant le degré suprême de civilisation atteint par la merveilleuse Europe.

Je dois dire qu’au moment où j’ai songé au condamné à mort, j’ai immédiatement songé à sa victime, et essentiellement à sa victime. A-t-elle souffert ? Oui, c’est indéniable. Elle a souffert atrocement. Elle a été violée, sodomisée, frappée, achevée à coups de couteau. Elle était enceinte de cinq mois et demi. Elle n’est pas la seule à avoir souffert : son mari ne s’est jamais remis de l’assassinat de son épouse, et s’est suicidé quelques mois plus tard.

Un dévoiement grave de la compassion

L’exécution aurait pu mieux se passer, c’est indéniable. Les poisons à effet rapide existent. Les fusils aussi. Mais je trouve très douteux qu’en pareil cas on pense avec compassion au criminel et jamais à la victime, ou alors si peu. Il y a là un dévoiement grave de la compassion elle-même, et une forme d’inversion des valeurs.

Il y a aussi plus grave encore : une dévaluation du prix accordé à la vie humaine. Quelqu’un qui prend de sang froid et avec préméditation la vie d’un autre être humain prend à cet autre être humain ce qu’il a de plus précieux, sa vie. L’idée même de justice implique un châtiment proportionnel au crime. Le seul châtiment proportionnel en pareil cas est de priver l’assassin lui-même de sa vie. La déclaration des droits américaine stipule qu’un châtiment doit être proportionnel au crime, et c’est une déclaration des droits qui mérite ce nom. Elle précise que le châtiment ne doit pas être cruel, et on peut sans doute trouver des moyens plus rapides que ce jour là en Ohio, certes.

Mettre sur le même plan la condamnation à mort d’assassins et celle de prisonniers politiques dans des dictatures montre que décidément, nous sommes dans une époque où les mots perdent leur sens.

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Dire qu’un pays est barbare et abject parce qu’on y respecte les principes de la justice est consternant.

Dire que l’Europe est plus civilisée est plus consternant encore : que vaut une vie en Europe lorsqu’un assassin qui a tué cinq ou six personnes risque au maximum trente ans d’emprisonnement. La réponse est-elle cinq ans ? Six ans ? Je connais des parents de victimes d’assassinat qui ont dû déménager pour ne pas avoir pour voisin un homme qui avait tué leur enfant dix ans auparavant, condamné à quinze ans, et qui avait bénéficié de remises de peine pour bonne conduite : il avait, selon l’expression consacrée, « payé sa dette à la société » et pouvait vivre où il le décidait, y compris à côté de chez ceux dont il avait tué le fils en le découpant au couteau de chasse. Que dire lorsqu’un assassin récidive ? Que c’est une erreur statistique ? Celui (ou celle) qui perd alors la vie est-il (elle) une erreur statistique ? La vie en Europe ne vaut plus grand chose.

Quelques assassins en Europe ont la décence de mettre fin à leurs jours, et comprenant ce qu’ils ont fait, s’administrent eux-mêmes la peine de mort. Le fait est que ce n’est pas le cas de tous.

Ce que j’écris pour l’Europe vaut aussi pour Israël.

Quand je vois des assassins libérés en Israël sous pression internationale, pour les raisons que je viens d’énoncer, je me dis que justice n’est pas faite, et que ce qui a valu pour Adolf Eichmann devrait valoir pour nombre de ceux qui sont nourris logés, blanchis dans les prisons israéliennes. Cela accroîtrait les risques d’assassin (timesofisrael.com/israeli-death-penalty-for-terrorists). Et je trouve la parole du rabbin Shmuley Boteach très respectable.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière pour Dreuz.info.

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