Publié par Jean-Patrick Grumberg le 12 mars 2015

Les grandes manœuvres judiciaires ont déjà commencé autour de l’EmailGate, le scandale des emails de la probable candidate démocrate à la présidence des Etats Unis, Hilary Clinton.

C’est l’agence d’information Associated Press qui a tiré la première et poursuit le Département d’Etat américain en justice à l’échelon fédéral, car ce dernier a fait échouer l’équivalent de cinq ans de demandes d’emails de Mme Clinton, et n’a jamais expliqué à l’agence d’information ni au tribunal, que Clinton avait son propre serveur – ce qui signifie qu’aucune recherche n’a été faite par l’administration dans ses emails, en violation avec le Freedom of Information Act, FOIA (qui autorise chaque citoyen à obtenir une copie de documents et informations contrôlés par le gouvernement américain).

Rappel des faits

Quand elle a été nommée à la tête du Département d’Etat, Hilary Clinton a immédiatement ouvert un compte email personnel.

Ce faisant, elle violait la loi qui impose à tous les employés de l’administration des Etats Unis d’utiliser ses serveurs hyper-sécurisés et un compte email officiel.

Les conséquences de cette infraction sont au nombre de quatre :

[ordered_list style=”decimal”]

  1. Des documents et échanges de la plus haute importance, des secrets d’état, ont été potentiellement exposés aux attaques de hackers. Des hackers se sont-ils introduits sur son serveur ? On l’ignore à ce jour, ce qui ne veut pas dire qu’aucune brêche n’a été ouverte par un pays hostile aux Etats Unis – et il n’en manque pas.
  2. La totalité des emails envoyés et reçus par Hilary Clinton dans le cadre de son emploi appartiennent à l’ensemble de la nation américaine, et non à Clinton, qui n’est pas autorisée à en disposer librement, ce que son compte personnel lui a permis de faire.
  3. En vertu du Freedom of Information Act mentionné plus haut, chaque citoyen peut se faire communiquer des documents d’Etat. Comme l’Etat n’avait pas accès à son compte personnel, il ne peut remplir sa mission.
  4. Lors des demandes passées pour ses emails au titre du FOIA, le Département d’Etat n’a pas révélé que Clinton utilisait un compte personnel. Les fonctionnaires sont donc ainsi à la fois complices de la couverture d’une fraude, et ils doivent expliquer pourquoi, lorsqu’ils ont constaté que Clinton violait la loi, ils n’ont pas prévenus les services du FOIA ni même l’intéressée.

[/ordered_list]

L’embrouille

Pour tenter de calmer le jeu, Hilary Clinton a demandé à ses aides de trier entre ses emails personnels et professionnels, et a livré environ 50 000 emails à son ex employeur, qui s’est engagé à les rendre public dès qu’il les aura examiné.

Les critiques ont immédiatement répliqué que ce n’est pas à Clinton de faire le tri et de décider ce qui est privé et ce qui est public, et que cela ouvrait la voix à une intolérable opacité que l’ex secrétaire d’Etat et candidate probable à la présidentielle ne peut assumer, selon les critiques de son propre camp.

Trey Gowdy, le député Républicain responsable de la commission d’enquête sur l’attentat de Benghazi de la Chambre des représentants, qui réclame l’intégralité des documents pour son enquête, a immédiatement signalé que plusieurs périodes complètes d’emails manquent dans ce qu’a fourni Clinton.

Clinton n'a ni reçu ni envoyé d'email ce jour là ?
Clinton n’a ni reçu ni envoyé d’email ce jour là ?

Ce n’est pas qu’une simple anecdote, le jour où la photo culte qui montre une Hilary Clinton moderne, branchée sur son Blackberry a été prise, elle se rendait en Libye – et aucun email n’aurait été envoyé ou reçu – d’après ce qu’elle a remis. Il y a quatre jours, elle a d’ailleurs supprimé cette photo de son compte Twitter…

Screen Shot 2015-03-12 at 17.40.32 PM

“Il y a des trous de plusieurs mois. Si vous considérez cette photo iconique d’elle au moment d’embarquer dans un C-17 pour la Libye, avec son smartphone à la main, nous n’avons aucun email de ce jour là. En fait, nous n’avons aucun email de son voyage en Libye” a déclaré Gowdy à CBS News, ajoutant, “donc c’est assez difficile de croire que si vous êtes en déplacement en Libye pour discuter de la politique libyenne, aucun document n’existe qui a été remis au Congrès.”

“Il y a des trous énormes. Et avec tout le respect que je dois au président, ce n’est pas à la Secrétaire d’Etat Clinton de décider ce qui est public et ce qui ne l’est pas,” a également indiqué Gowdy, car les documents qui lui ont été communiqués n’incluent aucun email d’elle datant de la période de l’attaque contre Benghazi où l’ambassadeur et trois Américains ont trouvé la mort.

Tout ceci laisse planer un gros doute sur le genre de tri que Clinton a opéré dans les emails qu’elle a remis au Département d’Etat.

Mise à jour : Jen Psaki, la porte parole du Département d’Etat, vient de déclarer lors d’une conférence de presse que “la Secrétaire d’Etat Clinton n’avait pas de Blackberry du Département d’Etat,” car “avant 2014 et la mise en vente d’une nouvelle génération de Blackberries, les protocoles de sécurité que le Département d’Etat avait mis en place ne permettaient pas aux Blackberries d’avoir accès à un compte email personnel.”

L’administration Obama mise en cause

L’administration Obama n’est pas épargnée, et des plaintes sont également en cours pour qu’elle explique aux juges fédéraux pourquoi elle n’a jamais dit à personne que la Secrétaire d’Etat Hillary Rodham Clinton a utilisé une adresse email secrète qui peut potentiellement contaminer de nombreuses demandes de documents par le public.

Dans un premier temps, samedi 7 mars dernier, Barack Obama a déclaré à CBS News qu’il avait appris la nouvelle du serveur d’email privé de Clinton en regardant les informations.

Puis, lundi 9 mars, Josh Earnest, le porte parole de la Maison Blanche est revenu sur ses propos, et a indiqué qu’en fait le Président Barack Obama savait que Hillary Clinton utilisait une adresse email non gouvernementale quand elle était Secrétaire d’Etat, mais il ne connaissait pas les détails de la façon dont son serveur a été installé.

Une peine de prison, jusqu’à trois ans par email !

Madame Clinton risque un peine de prison de trois ans – par message – si le tribunal la considère coupable d’avoir menti et géré des informations classées top secret sur son compte personnel, a déclaré un expert au Washington Times.

Cet article vous a intéressé ? Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir les nouveaux articles de Dreuz, une fois par jour en fin d’après-midi.

La Maison blanche a décidé de prendre ses distances, et a déclaré qu’aucun assistant du président Obama n’a aidé Clinton a faire le tri pour décider quels emails remettre au Département d’Etat et lesquels effacer.

Hilary Clinton ne s’est pas exprimée après qu’il ait été révélé qu’elle a effacé environ 32 000 emails qu’elle et ses avocats ont jugés “privés”.

Lors d’une conférence de presse, elle a admis avoir utilisé un compte email privé par souci de simplicité et a reconnu qu’elle aurait dû s’abstenir et qu’elle le regrettait.

“Les employés de l’administration n’ont pas le droit de faire ça, mais s’ils le font, ils échappent à toute sanction,” a déclaré Christopher Horner, un chercheur qui a souvent mis en cause et combattu l’administration Obama pour se faire communiquer des documents publics. “C’est une question d’auto-régulation. Si le responsable d’une administration fait des choses comme ça, bonjour l’auto-régulation.”

Horner, qui a révélé que Lisa P. Jackson, l’ex-administrateur de l’EPA, l’agence de protection de l’environnement, utilisait un compte sous le pseudo “Richard Windsor,” a expliqué que Clinton pouvait se retrouver face à de gros problèmes si quelqu’un peut prouver qu’elle a reçu des informations classifiées sur son compte personnel. Mais comme elle contrôle l’accès à ses emails, sur son propre serveur, ce sera très difficile à prouver — sauf si les correspondants de ces emails se manifestent.

“Tant qu’elle garde la main et le contrôle sur son serveur, ce qui de toute évidence était son intention, elle réduit énormément le risque de condamnation, à moins que quelqu’un qui a reçu un email se déclare,” explique Mr. Horner, ajoutant qu’il est plus qu’improbable qu’elle n’a reçu et géré aucun document classifié, même si, lors de sa conférence de presse, elle a affirmé le contraire.

“Je suis bien évidemment au courant des règles du secret, et je n’ai envoyé aucun document secret,” a déclaré Clinton.

Tom Fitton, président de Judicial Watch, a également prévu de déposer plainte.

“Nous avons fait des centaines de demandes. Le Département d’Etat savait depuis le premier jour que leurs recherches ne pouvaient pas inclure ses emails, et personne ne nous a rien dit, et personne n’a rien dit au tribunal,” a expliqué Fitton.

Le Sénateur Charles E. Schumer, démocrate de New York a déclaré : “c’est un toussotement. Dans six mois, tout le monde aura oublié.”

Jerome Reisman, un expert en éthique gouvernementale, a déclaré que les emails manquants sont l’équivalent de ce que Rose Mary Woods, la secrétaire de Nixon, a fait en effaçant les 18 minutes clefs des enregistrements du président Nixon.

“En quoi est-ce différent ? Elle a effacé plus de 30,000 emails,” a déclaré Reisman. “La totalité de son système de serveur de mail, y compris le serveur, doivent être remis au Département d’Etat, et c’est à lui de décider ce qui est privé et ce qui ne l’est pas.”

Hilary Clinton a refusé, prétextant que le serveur est sa propriété.

Clinton n’est pas seulement mise en cause concernant l’attentat de Benghazi et pour avoir utilisé un compte email personnel. Il a été récemment démontré que la fondation Clinton a reçu des millions de dollars de dons de pays étrangers dans l’opacité la plus totale, ce qui a de quoi mettre mal à l’aise, s’agissant de peut-être la future présidente des Etats-Unis.

Que les Républicains ne se fassent aucune illusion : Hilary Clinton est l’unique candidate du parti Démocrate capable de briguer la présidence. Ils n’ont aucun candidat de rechange. Cela suffit à donner à croire que l’affaire sera soigneusement étouffée “comme un toussotement.”

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous

En savoir plus sur Dreuz.info

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading