Hier, un journaliste israélien frustré des résultats a eu l’audace, sur la chaîne 10, de déclarer que les israéliens ont triché : ils n’ont pas voté conformément à ce qu’ils avaient déclaré dans les sondages !

Un autre n’a pas hésité à affirmer qu’il faut changer de peuple : il est bête, puisqu’il ne vote pas comme les élites le lui disent. Des observateurs ont rapporté qu’à la Maison-blanche, avant le dur réveil à la réalité, on sabrait le champagne…

Plusieurs faits ont marqué la campagne qui a donné la première place à Benjamin Netanyahou le 17 mars :

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• L’invitation du premier ministre israélien à exprimer devant le Congrès ses craintes d’un accord avec l’Iran sur le nucléaire, que la gauche israélienne a utilisé pour preuve supplémentaire que Netanyahou a détruit les liens d’amitié entre les Etats Unis et Israël,
• Le lynchage médiatique de Benjamin Netanyahou et sa femme, pendant trois semaines, à coté duquel les attaques des journalistes français contre l’ex président Sarkozy ressemblent à des taquineries entre amis,
• L’intervention de V15, une très puissante organisation américaine spécialisée dans le combat électoral, basée sur les méthodes qui ont fait deux fois élire le président Obama, et appellée Move on, destinée à faire échouer Netanyahou, et financée en partie par une subvention de 300 000 dollars de la Maison Blanche,
• L’invraisemblable flot de faux sondages d’opinion qui ont trompé le public israélien sur l’issue de l’élection en donnant le camp sioniste largement gagnant,
• Un nouveau front terroriste : l’Etat islamique à la frontière du Golan et dans le Sinaï,
• La polarisation de la campagne : Netanyahou a fait campagne sur la sécurité du pays, Herzog/ Livni sur la situation économique.

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De tout cela est sortie une victoire très nette du Likoud, avec 30 sièges, et encore plus nette de la droite (hors partis religieux) et il me semble important de comprendre pourquoi. La comparaison entre 2013 et 2015 nous y aide.

En 2013 (tableaux ci dessous), le Likoud obtenait 31 sièges, contre 36 en 2015 (si l’on rajoute Yisrael Beitenou qui était uni au Likoud en 2013), un gain de 5 sièges.

Les travaillistes + Livni + Kadima avaient 23 sièges, contre 24 en 2015 (une fois unis), ce qui détruit la thèse selon laquelle les électeurs de gauche, trompés par des médias inconscients qui ont donné l’Union sioniste grand gagnant, seraient restés chez eux.

Cette thèse est d’ailleurs contestée par Amos Harel, qui dans le plus à gauche d’entre eux, Haaretz, explique que :

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La victoire de Netanyahou prouve que la sécurité était le sujet de cette élection. Après quatre ans d’agitations dans le monde arabe, avec l’écroulement d’Etats entiers autour d’Israël, et l’émergeance de groupes terroristes aux frontières d’Israël, les Israéliens sont inquiets.

L’évidente victoire de Benjamin Netanyahou ne peut pas être attribuée, comme la gauche et plusieurs médias le disent, à un “vote tribal” où à l’usage de la peur. C’est la troisième fois d’afilée que Netanyahou va constituer un gouvernement.

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Yesh Atid est tombé de 19 à 11 sièges, et cela s’explique par le fait que Yair Lapid n’a pas tenu ses promesses – il l’a reconnu et a affirmé assumer la responsabilité de l’échec de ses réformes pour la classe moyenne – puisqu’il avait été élu après les longues manifestations de Tel Aviv en 2011 pour faire baisser le coût de la vie, et a, au contraire, alourdi les impôts des classes moyennes d’au moins 12%.

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• La Droite sans les religieux passe donc 43 à 54 sièges, un gain très important, qui peut sans risque être attribué au fait que les Israéliens dans leur ensemble ont les pieds sur terre, sont conscients du danger qui pèse sur le pays, et convaincus que Netanyahou est le seul capable d’assurer leur protection.
• Les partis religieux sont passés de 18 à 13.
• La gauche israélienne perd 8 sièges depuis 2013, de 48 sièges à 40 sièges, en partie parce qu’elle a orienté sa campagne sur le coût de la vie, qui n’est, malgré les sondages, certes un problème, mais pas le premier des soucis des Israéliens.
• Et les partis arabes gagnent 2 points, à 13 sièges (le tableau indique 14 car le dépouillement a modifié le résultat) car V15 a affrêté des centaines de bus pour les encourager à voter, et l’union des partis arabes a renforcé un sentiment d’unité politique par ailleurs artificiel.

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Plus le taux de participation est élevé, plus il profite traditionnellement à la gauche. Les deux dernières fois où les travaillistes ont gagné l’élection, en 1992 et 1999, le taux de participation était de 77 et 78%. Nimrod Dweck, le directeur exécutif de l’organisation V15 — financée depuis l’étranger pour battre Netanyahou, a expliqué dans une interview à JTA, l’agence d’information israélienne, qu’un gain de 5% par rapport aux 67% de 2013 peut faire une différence importante pour Isaac Herzog, qui dirige l’Union sioniste avec Tzipi Livni.

Cette année, le taux de participation a en effet beaucoup progressé, il a été de 72,3%, 4,6% de plus qu’en 2013, le plus élevé depuis 1999… et il a profité à la Droite.

Le journal d’extrême gauche Haaretz a réalisé un sondage auprès des jeunes qui votent pour la première fois.

Le constat non seulement étonne, mais porte en soi un espoir fabuleux, vous allez comprendre pourquoi :

Les jeunes disent avoir voté pour Netanyahou parce qu’ils pensent d’abord à leur sécurité (donc à celle du pays), puis à leur sécurité, et enfin à leur sécurité. Ensuite, viennent – et c’est Haaretz qui publie cela : l’absence de confiance dans les Arabes, dans la gauche, et dans ce que disent les médias.

Les jeunes israéliens, qui n’ont pas connu ces époques où le journaliste tirait sa noblesse et sa fierté d’avoir rapporté les faits avec la plus grande neutralité possible, n’ont pas l’élément de comparaison dont nous disposons. Celà ne les empêche en rien de voir clairement ce que sont devenus les médias : des amuseurs pour leurs petits cercles fermés voués à ne jamais évoluer.

Leur manque de confiance dans la gauche et dans les arabes sent bon l’avenir.

De fait, la gauche sioniste israélienne vit en aveugle et se croit dans un monde de bisounours. Elle s’obstine à croire qu’il suffit de faire des sourires aux Arabes, aux Européens, à Obama, aux rebelles syriens (Herzog l’a affirmé l’an dernier) et tout ira bien pour Israël. Elle refuse de regarder ce que fait Abbas, son obstination à refuser le moindre compromis, et d’écouter ce qu’il dit.

L’aveuglement, dans un pays dont les citoyens ont les yeux ouverts, c’est le problème de la gauche.

Regardons le processus de paix, pierre angulaire des disparités politiques et de la fracture gauche droite.

Les Palestiniens ne veulent pas d’Etat palestinien, mais une Palestine sans Israël. La gauche a déjà oublié comment Arafat, en 2000, a refusé les propositions de la dream team, l’équipe dont rêvent les plus pacifiques des pacifiques israéliens : Yossi Sarid, Yossi Beilin et Shlomo Ben-Ami négociaient avec Arafat. Et il a dit non… Autant dire que Abbas refuserait même les propositions d’un gouvernement dirigé par le Meretz.

Tant que la gauche refusera de regarder en face cette réalité – et pour avoir échangé avec de brillants intellectuels, journalistes et intellectuels de gauche, je peux vous assurer qu’ils en sont très loin, ils ne pourront espérer mener le pays.

Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois dit-on. Israël est le royaume des voyants, et les aveugles gauchistes sont regardés comme des borgnes.

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