Publié par Gilles William Goldnadel le 18 octobre 2016

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Si les propos du président sur les footballeurs ou les magistrats ont choqué, ceux sur l’islam et l’immigration ont provoqué moins de remous. Gilles-William Goldnadel s’étonne de ce silence qui traduit la gêne d’un «camp du Bien» en mauvaise posture.

Et si, sans le vouloir, François Hollande avait rendu enfin un signalé service à la France ?

On aura beaucoup disserté sur ses confidences vespérales à deux journalistes d’un quotidien du soir, mais il n’est pas sûr que l’on en ait tiré la leçon principale.

On a vitupéré une incontinence médiatique indigne d’un souverain républicain. Et on a eu raison.

On s’est questionné légitimement sur l’économie de son temps par un homme affairé et dont on imagine qu’il devrait être ménager d’occupations futiles et subalternes.

On a critiqué à juste raison l’insulte faite à une magistrature française taxée de lâche par le premier garant de son indépendance.

On peut, et l’on devrait plus souvent, reprocher à certains juges, syndiqués ou non, leur tropisme idéologique, à d’autres leur obsession pour l’avancement, à quelques-uns encore leur indolence professionnelle. On ne voit pas pour quelle raison magique, ce corps serait préservé d’une maladie nationale qui n’a rien d’orpheline. Et il est vrai encore que ce métier et ses représentants n’ont pas un goût immodéré pour la critique. De là à prétendre, comme le premier des Français, que l’ensemble de celui-ci serait atteint, c’est pratiquer une généralisation erronée et blessante.

On a, également à bon droit, condamné les propos officieux de notre premier officiel sur la débilité intellectuelle de nos footballeurs nationaux. On peut ici encore – c’est même recommandé – considérer certains professionnels du ballon rond comme de parfaits anti- modèles pour la jeunesse française. On peut regretter, comme François Hollande, «une communautarisation, une segmentation, une ethnicisation (sic)» de ce sport, mais Benzema, Cantona, Ribéry, Anelka et quelques autres n’incarnent pas à eux seuls le football tricolore.

En revanche, je n’ai point entendu un concert de protestations touchant à l’expression par le chef de l’État de sa pensée profonde sur l’islam et l’immigration. Alors qu’il s’agit des deux questions qui fâchent le plus, les Français, en ce compris les plus vétilleux, n’ont pas été fâchés des propos officieux et pourtant détonants de leur président.

Je ne me lasserai pas de les reproduire après Vincent Trémolet de Villers (le Figaro du 13 octobre) : «il y a des choses qui les taraudent (les Français), ils arrivent dans un train, ils voient des barbus, des gens qui lisent le Coran, des femmes voilées… Il y a des choses qui marchent très bien et l’accumulation de bombes potentielles liées à une immigration qui continue. Parce que ça continue».

Sur ces déclarations de Nadine Morano, qui lui valurent l’opprobre et la moquerie médiatique et politique en ce compris dans son propre camp : «Je suis convaincu que, quand on interroge les Français, ils sont majoritairement sur sa position. Ils pensent : ‘on est plutôt des blancs, il y a plus de blancs que d’autres’»…

Sur l’immigration invasive : «je pense qu’il y a trop d’arrivées, d’immigration qui ne devraient pas être là.… C’est Sisyphe ! On les fait parler Français, et puis arrive un autre groupe, il faut tout recommencer. Ça ne s’arrête jamais… donc, il faut à un moment que ça s’arrête».

Sur l’islam, et sans craindre l’amalgame devant pourtant deux représentants d’un journal ombrageux : «il y a un problème avec l’islam, c’est vrai. Nul n’en doute». Le voile ?: «Un asservissement»…

Sur la poussée migratoire : «On ne peut pas continuer à avoir des migrants qui arrivent sans contrôle, dans le contexte en plus des attentats».

Enfin, sur le risque d’affrontements ethniques : «comment peut-on éviter la partition ? Car c’est quand même ça qui est en train de se produire: la partition».

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Le plus important habite ici : l’ensemble des propos qui précèdent – s’ils avaient été prononcés par le même ou par quelqu’un d’autre à la télévision auraient fait l’objet d’une déflagration atomique – n’ont pas fait l’objet d’une contestation factuelle, morale ou politique générale.

Celui qui les a prononcés n’est pourtant pas n’importe qui : il est le représentant officiel de la gauche morale, intronisé par le Parti Socialiste, oint par le suffrage universel.

Celui qui les a prononcés ne les a pas contestés. Il ne s’en est pas excusé parce que nul ne lui a demandé de le faire. S’agissant des magistrats ou des footballeurs, le président était coupable d’une généralisation abusive qui lui fut reprochée. Touchant à la question migratoire ou islamique, nul aujourd’hui ne s’est hasardé à lui faire ce mauvais procès qui était de rigueur, il y a encore peu, pour cause de racisme.

François Hollande pouvait dire impunément et sans avoir à le regretter ce qu’officiellement le clergé médiatique, politique et même épiscopal réprouve encore hautement contre l’avis des gens.

L’étrange tragi-comédie des bavardages présidentiels qui aura sans doute épuisé définitivement le crédit d’un responsable déjà largement à découvert, aura eu au moins le mérite d’illustrer la folie de l’époque : il est désormais licite de penser convenablement à condition de ne pas le chanter, ce qui serait inconvenant.

Qu’un maître en hypocrisie ait pu contribuer, à son corps défendant, au dynamitage de la plus formidable et dommageable hypocrisie du temps n’est pas le moindre signe du surréalisme de l’époque.

Les tartuffes et les diafoirus interprètent leur dernier acte. Ils ont déjà modifié les dialogues. Mais le public ne connaît pas encore l’épilogue du drame.

Il sait seulement qu’il a déjà trop payé.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Gilles-William Goldnadel. Publié avec l’aimable autorisation du Figaro Vox.

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