Publié par Mireille Vallette le 20 mars 2017

La biographie d’Oskar Freysinger donne une idée du genre d’attitudes totalitaires auxquelles le politicien a été confronté. La presse et le milieu culturel en sont les vedettes.

L’éjection d’Oskar Freysinger du Conseil d’État valaisan m’a rappelé la biographie du politicien publiée en 2010, «Oskar et les minarets*». Elle illustre magnifiquement la manière dont il a été traité, notamment par l’élite culturelle de notre pays. Les médias ayant commis leur habituelle censure sur cette bio à l’époque, il est toujours temps de découvrir quelques reflets de la vie qui va… quand on est un brillant UDC.

L’ouvrage est signé Slobodan Despot, écrivain, traducteur et éditeur, devenu le porte-parole d’Oskar durant son mandat à l’exécutif. Il dresse un portrait très vivant du politicien, entre récit, citations et longue interview sur l’islam. J’ai choisi quelques épisodes de ce passionnant livre.

Oskar est licencié en littératures allemande et française, il a été longtemps professeur d’allemand. Il est aussi écrivain, chanteur, bateleur… Il rédige des pamphlets politiques, fait des poèmes rimés pour les fêtes, crée des dizaines de chansons, musique et parole, qu’il joue avec sa guitare. Ce n’est pas du grand art, et il tombe parfois dans la vulgarité, mais pour animer des soirées, c’est top.

L’enseignant tombe dans la politique par hasard en se lançant dans un combat contre une réforme scolaire. Elle est refusée par 73% des votants. Il entre dans l’arène politique en 1997 sous les couleurs démocrates-chrétiennes et en 1998, le polyglotte est sollicité pour traduire une conférence de Christoph Blocher à Conthey. Il répond : «Je ne veux rien avoir affaire avec les nazis !»

«Je ne connaissais le parti de Blocher que par le filtre des médias. J’ai donc été de l’autre côté de la barrière. Voilà pourquoi je comprends très bien, aujourd’hui, comment se forme l’image monstrueuse de l’UDC et de ses personnalités dans la tête des gens ordinaires.» Il lit le programme du parti UDC une année plus tard et constate qu’il n’a «aucun rapport avec les accusations de racisme, de haine de l’étranger, d’antisémitisme qu’on adressait à ce parti.» Son programme : défense de la famille, de la souveraineté, des petites entreprises, attachement aux racines chrétiennes du pays, méfiance à l’égard de l’immigration incontrôlée et des sirènes de la globalisation, droit à la vie. Il implante l’UDC en Valais et est élu en 2003 député au Conseil national.

Le journal Le Confédéré le compare à Hitler. Or, son père que le nazisme «débéquetait» a appris à ses enfants à se méfier des idéologies et à rejeter les totalitarismes. Ses références ? «Des textes essentiels pour l’humanité», dont les auteurs se nomment Platon, Shakespeare, Goethe, Tolstoï, Nietzsche… Lecteur boulimique, il devenu un fou de littérature grâce à un prof.

L’ouvrage de Despot décrit minutieusement la campagne sur l’interdiction des minarets, les entorses à la liberté d’expression, les pièges, l’attitude des journalistes qui refusent de voir que les minarets comptent peu devant le désir de stopper l’emprise de l’obscurantisme qui s’étend.

Sur le plan littéraire, Oskar rédige un premier recueil de nouvelles, Bruchige Welten (Mondes friables) qui paraît en novembre 2004. La polémique autour du «Pissoir-Poet» déferle. L’éditeur reçoit des menaces et des centaines de lettres d’insultes de la part de non-lecteurs. Le livre est refusé par les libraires. Il ne fera l’objet d’aucun compte-rendu du cercle vertueux des médias. L’auteur en vendra quand même 3000 exemplaires.

Le Blick, qui faisait déjà passer Freysinger pour «un facho, un menteur et un obsédé sexuel» dénonce ses Mondes friables «comme un répugnant ouvrage de pornographie». Sur 170 pages, le recueil comporte deux scènes de sexe : un viol et une scène de lesbianisme entre deux femmes musulmanes auxquelles leur liaison vaudra la mort. Despot observe : «Si son livre devait choquer quelqu’un, pensait Oskar, ce serait par le sort horrible infligé par la charia aux deux amantes qu’un patriarcat écrasant a poussées dans les bras l’une de l’autre. Et pourtant non : ce n’est pas sur leur lapidation que les médias suisses vont se répandre en anathèmes, mais sur la description de leurs amours !»

L’auteur se souvient de l’origine de sa nouvelle : «Je tombe un jour sur un site appelé «femmes afghanes». On y trouve un catalogue des horreurs commises par les talibans sur les femmes, documenté par des vidéos de lapidations, d’exécutions dans des stades, des photos de femmes brûlées à l’acide. De ma vie, je n’avais jamais vu un tel cabinet d’horreurs. J’étais dans un état indescriptible en sortant de cette séance. Il me fallait réagir, n’importe comment, par pure solidarité humaine. Je me suis précipité sur mon ordinateur pour écrire cette histoire.»

Le politicien est en fait attaqué sur des scènes de sexe –bien anodines– pour éviter qu’on parle du fond : la terreur religieuse, la cruauté des châtiments des textes islamiques. Et parce qu’agonir d’insultes un UDC est toujours jouissif. Mais cette réaction conduira Oskar à s’intéresser de plus près à l’islam et à la complaisance dont il fait l’objet dans notre société. Avec une lucidité rare, comme l’illustrent ces quelques citations :

«A mon avis, l’opposition entre le modèle totalitaire socialiste et le modèle islamique n’est qu’apparente. Il n’y avait pas de laïcisme en URSS : on divinisait les dirigeants et les maîtres à penser, de Marx à Staline, et l’on posait le «grand soir» comme un événement eschatologique, comme la fin des temps de l’Evangile. Dans l’islam, d’autre part, le royaume qu’on bâtit est purement de ce monde. On n’a aucun contact avec Allah, tout est immanent, y compris ce paradis qui n’est qu’une version «cinq étoiles» de la vie sur terre.
Le socialisme est donc moins matériel et l’islamisme moins spirituel qu’ils ne semblent. Les deux sont des systèmes dogmatiques et collectivistes, allergiques à la liberté individuelle que porte le christianisme dans son essence.»

«L’islam est un formalisme extrême. On y exprime sa fidélité par des rites et ces rites suffisent. C’est un kit de survie : ablutions, prières, pèlerinage à La Mecque et le croyant est en règle. L’introspection n’existe pas, ou en tout cas n’est pas requise. On devient un automate de la foi, comme un soldat dressé à faire son école de section les yeux fermés.»

Voilà les gens de gauche «prêts à renier tous leurs combats post-soixante-huitards : féminisme, égalitarisme, mouvement gay… Tout passe à la trappe. Face au modèle de société islamique, leur système de valeurs s’évapore, ils ne se demandent pas une seconde comment ils vont concilier la carpe et le lapin. Ils sont comme des chiots qui frétillent de la queue devant leur maître. (…) C’est alors que deviennent acceptables, sous le drapeau de l’islam et sous prétexte d’ouverture à l’autre, des valeurs qu’ils auraient vomies venant de la religion chrétienne. (…) Au nom du multiculturalisme, ils épousent la plus dictatoriale des monocultures.»

«(…) dans l’islam, la morale se fonde sur la loi alors que dans notre conception du droit, la loi se fonde sur la morale. Un exemple pour illustrer ce propos : chez nous, un principe moral décrète qu’il est mal de tuer. Cependant, la loi résultant de ce principe moral doit prendre en considération qu’en cas de légitime défense il peut arriver qu’un humain en tue un autre sans être puni par la suite. Il est toujours mal de tuer, mais le législateur admet une légitimité dans certains cas d’urgence.

Il en est tout autrement dans l’islam. La charia prescrit en effet précisément quand, dans quelles conditions et comment exactement certaines personnes peuvent être tuées ou non. La morale exige simplement que ce catalogue soit respecté ; à l’inverse, il est immoral de ne pas respecter ce catalogue. La morale est déduite de la norme légale, intervient donc après la loi, ce qui est d’ailleurs logique dans la conception de l’islam, puisque la loi est divine et non créée et vaut donc une fois pour toutes.»

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Et sa lucidité porte aussi sur l’Etat hébreu : «… la haine incroyable dont on accable l’Etat d’Israël dépasse largement ses méfaits réels. Aux yeux de la gauche européenne, le juif n’est acceptable qu’en tant que victime. Une victime qu’on célèbre par des exercices de contrition qui servent à établir le règne de la culpabilité sur la société occidentale. Le juif fort et debout vient brouiller cette image. Il est non seulement inutile mais encore contre-productif dans ce dessein. Lui, l’éternel apatride, a osé s’ancrer dans un territoire, créer une armée, des frontières. Le nomade qui se sédentarise : un cauchemar pour l’idéologie mondialiste qui cherche, elle, à nomadiser les sédentaires. L’islam, qui transcende les frontières et soumet toutes les nations à un projet sans autre limite que la planète entière, correspond mieux, dans son idée, à l’horizon mental de nos internationalistes.

Il est visionnaire sur ce qui se produit aujourd’hui : «Le plus grand problème des Etats européens modernes provient du fait que l’immigration incontrôlée et l’affaiblissement, voire la suppression des frontières extérieures provoque l’émergence de nombreuses frontières intérieures, parfois invisibles. Si nous refusons de chercher des réponses valables à ces problèmes, si nous en faisons un tabou pour ne pas devoir les aborder, l’espace UE prometteur d’une grande liberté risque fort de devenir un espace de sociétés en conflit.»

Après son premier roman, «La Spirale», Oskar demande son adhésion à la Société suisse des auteurs, financée par l’État, qui s’engage dans ses statuts à œuvrer en faveur de la liberté d’expression. Refus. Ses membres musulmans et socialistes (sic !) ne comprendraient pas. La polémique enfle et l’association finit par lui proposer de signer un document d’allégeance à ses thèses. «Des thèses de gauche, bien entendu.» On imagine sa réponse. «Police de la pensée ! Je les appelle policiers de la pensée, ils me répondent : nous vous sommons de penser comme nous ! Comment font-ils, ces apparatchiks, pour ne pas voir l’absurdité de leur situation ? Et ont-ils seulement pensé à faire signer à leurs membres musulmans une déclaration d’allégeance à notre Etat de droit ?»

Après une alerte cardiaque, en 2000, Oskar écrit son meilleur texte, «Le nez dans le soleil, un petit bijou poétique inspiré par la figure de son grand-père. Jacques Chessex qui l’a lu sans en connaître l’auteur, déclare à l’éditrice qu’il est splendide et révèle une écriture «typiquement féminine». Encore une fois, les médias ne pipent mot sur cette œuvre. Les médias adorent l’inviter pour animer leurs débats, mais les mêmes s’interdisent de mentionner ses ouvrages.

En 2009, le Prix Rilke propose le thème «Frontières». Oskar envoie un poème classique en alexandrins sur la notion de frontière et de liberté. Les candidatures sont anonymes. Fin juillet, il apprend qu’il est le lauréat du Grand prix de poésie décerné aux pièces isolées. Les médias lui tombent dessus. A la remise officielle, les acteurs de la compagnie «Opale» qui lisent un extrait des œuvres primées refusent celle d’Oskar, sans que cette «grève» soit signalée à Freysinger. C’est la fille de la secrétaire qui s’y colle maladroitement. Lorsqu’ils apprennent la raison de cette étrange prestation, durant la soirée, on imagine ce qu’Oskar et sa femme ressentent.

«Quelle est leur vision du monde s’ils n’arrivent pas à accepter un homme qui ne pense pas comme eux ? Au nom de la tolérance, ces gens pratiquent l’intolérance la plus étroite. A nous la peur si on leur confiait un jour le pouvoir sur autrui… La liberté artistique qu’ils invoquent à tout bout de champ est l’instrument de leur répression envers ceux qui ne dansent pas sur la même musique.» L’épisode ne dérange pas les journalistes.

Et Despot de conclure l’épisode : «Comme elle est plus vaste, comme elle est plus grave, la question que soulève ce petit incident mondain ! C’est l’art qui s’abolit en devenant politique, ce sont les prétendus disciples de Voltaire troquant les Lumières pour des œillères.»

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Mireille Vallette pour Dreuz.info.

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