Publié par Magali Marc le 28 mars 2017

Ça ne s’invente pas. Bernie Sanders a été interviewé par The Guardian, et après avoir éviscéré Trump qu’il traite sans arrêt de «menteur pathologique», il fait un procès sans merci du Parti démocrate.

Ancien maire de Burlington où il a revitalisé le centre-ville, équilibré le budget et lancé un programme municipal de logement social, le socialiste Sanders est un authentique gauchiste-écolo, qui s’est greffé sur le Parti démocrate à l’occasion des primaires de 2015 pour la présidentielle Américaine.

  • En 2010, il s’oppose à Obama concernant sa décision de reconduire les exemptions d’impôts décidées par George W. Bush. Il prononce un discours pendant huit heures et demie, tentant ainsi de faire obstruction au vote par la technique parlementaire dite du «filibuster».
  • En 2011, alors qu’il estime que le premier mandat de Barack Obama «a déçu des millions d’Américains qui pensent que, sur un certain nombre de sujets, il a dit des choses comme candidat mais il a agi de façon très différente une fois élu», il déclare souhaiter qu’un candidat se présente contre lui lors de la primaire destinée à désigner le candidat démocrate pour l’élection présidentielle de 2012.

Ses critiques convenues à l’égard de Donald Trump semblent destinées à masquer les critiques très dures qu’il assène contre le Parti démocrate, son parti d’adoption, lui qui a toujours été un candidat indépendant «socialiste».

Dans l’interview qu’il a accordée le 10 mars dernier au journal britannique The Guardian, il commence par son habituelle critique de Trump :

«Il ment afin de saper les fondements de la démocratie américaine. L’une de mes préoccupations n’est pas seulement son programme économique réactionnaire d’allègements fiscaux pour les milliardaires et les compressions dévastatrices pour les programmes qui touchent la classe moyenne, les familles qui travaillent, les personnes à faible revenu, les enfants, les personnes âgées, les pauvres, mais aussi ses efforts afin de miner la démocratie américaine en attaquant sauvagement les médias (sic !), prétendant que pratiquement tout ce que les grands médias disent est mensonger».

Plus loin, il reconnaît que Trump –ce «menteur pathologique»– a dit vrai quand il a parlé des pertes d’emplois aux États-Unis :

«… l’un des faits, tout à fait véridique, que Trump a souligné dans son discours, c’est que, dans ce pays, nous avons perdu quelque 60 000 usines depuis l’an 2000.

Des millions de bons emplois dans le secteur manufacturier ont disparu dû à cause de l’automatisation. Cela a beaucoup à voir avec des politiques commerciales désastreuses qui ont été bénéfiques pour les PDG des grandes entreprises aux dépens des travailleurs américains. C’est la réalité dans de nombreuses parties du monde.

Trump a recueilli le soutien de personnes qui pensaient que les élites économiques, les élites politiques, les avaient oubliés. Et la vérité c’est que les élites économiques et politiques les ont effectivement oubliés.»

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«… l’inflation ajustée aux salaires de millions de travailleurs aujourd’hui est plus faible qu’elle ne l’était il y a 40 ans. Donc, vous avez des millions de personnes qui occupent aujourd’hui deux ou trois emplois, des gens qui travaillent plus longtemps pour des salaires plus bas. La moitié des travailleurs âgés de 55 à 64 ans en Amérique n’ont littéralement rien en banque lorsqu’ils font face à la retraite. Nous avons le taux le plus élevé de pauvreté chez les enfants de presque tous les grands pays de la planète. Nous avons des inégalités de revenus massives.

Donc, ce qui s’est passé en Amérique et dans de nombreuses parties du monde, c’est la mondialisation qui a été bénéfique pour les gens qui se réunissent à Davos, pour l’élite économique dirigeante du monde. Dans ce seul pays, vous avez vu une multiplication par dix du nombre de milliardaires.»

Face à une question du Guardian sur le fait que les démocrates ont «permis» l’émergence de Trump, Sanders se lâche :

«Je pense que beaucoup de gens dans ce pays comprennent certainement que ce que nous avons vu au cours des 30 ou 40 dernières années est un parti démocrate qui s’est transformé. Alors que c’était le parti de la classe ouvrière– travailleurs blancs, travailleurs noirs, travailleurs immigrés– il est devenu un parti contrôlé de façon significative par une élite libérale qui s’est éloignée des besoins de la classe moyenne et des familles ouvrières de ce pays.

Si vous sortiez dans la rue aujourd’hui dans n’importe quel endroit du pays et que vous demandiez aux travailleurs s’ils pensent que le parti démocrate est le parti de la classe ouvrière américaine, très peu diront oui. Si vous aviez fait cela dans les années 1930 sous Franklin Delano Roosevelt, ils auraient dit oui. La distinction est claire.

N’oublions pas que c’est un président démocrate, Bill Clinton, qui a déréglementé Wall Street ; un président démocrate, Clinton encore, qui a poussé NAFTA (North American Free Trade Agreement, l’Accord de Libre Échange Nord-Américain). C’est un président démocrate, Barack Obama, qui a poussé aussi fort que possible pour le Partenariat transpacifique».

Et le coup de grâce au Parti démocrate duquel Sanders dit sensiblement la même chose que disait Michael Goodwin, un chroniqueur au New York Post, sympathique à Trump et que je cite souvent (il y en a si peu) :

«… Fondamentalement, nous devons reconnaître que la stratégie du parti démocratique a été un échec horrible, il n’y a pas de “si”, de “mais” ou de “peut-être”.

Ce n’est pas seulement l’élection présidentielle, ce n’est pas seulement la perte du Sénat et de la Chambre des Représentants des États-Unis, ce n’est pas seulement la perte de sièges de gouverneurs.

Dans tout le pays, les Républicains contrôlent près des deux tiers des sièges des gouverneurs– les Démocrates ont perdu plus de 900 sièges législatifs dans les États de tout le pays. Il y a des États où le parti démocrate est pratiquement absent. Lorsqu’une élection a lieu, les Démocrates ne sont même pas capables de présenter un candidat au Sénat américain.

C’est aussi pathétique que cela. Il faut comprendre que ce qui a été fait par le passé a été un échec horrible et qu’il doit y avoir une restructuration fondamentale.»

Un Républicain qui dirait des choses pareilles se ferait hacher menu par les gauchistes, mais Bernie Sanders –le socialo– est très populaire chez les Démocrates. Il est intouchable !

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

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