Publié par Guy Millière le 15 avril 2017

Régulièrement, Donald Trump dit que son prédécesseur lui a laissé une situation de désordre.

C’est vraiment le moins qu’on puisse dire. Après la Deuxième Guerre Mondiale, l’ordre du monde a été structuré par la “guerre froide” et par la prééminence américaine sur le monde libre. Après la chute de l’empire soviétique, cet ordre a reposé sur l’hégémonie américaine. Celle-ci a duré jusqu’à la présidence Obama, sous laquelle Obama s’est efforcé de dissoudre et de détraquer l’ordre. Le résultat est celui que Donald Trump a trouvé en arrivant.

Donald Trump présentement entend procéder à un retour à l’ordre. Il sait que l’ordre ne peut régner que si les Etats-Unis retrouvent leur place, et il a commencé à redonner leur place aux Etats-Unis.

Ceux qui l’ont pris pour un incompétent ont oublié, je l’ai dit et je dois le redire, qu’il a dirigé une entreprise planétaire pendant quatre décennies, et ont fait preuve de cécité. Ils continuent en disant qu’il a fait volte-face, et est passé de l’isolationnisme à l’interventionnisme : Trump n’a jamais été isolationniste, et ses discours ont toujours été clairs sur ce point, mais la cécité rend sourd, semble-t-il.

Ceux qui imaginent que la Maison-Blanche est dirigée par d’autres que lui n’ont pas compris qu’un homme tel que Donald Trump prend les décisions essentielles lui-même, et s’attachent à des rumeurs débiles pour journaliste en mal de copie. Jared Kushner et Steve Bannon peuvent avoir des positions différentes sur divers sujets, ils ne sont pas le Président.

Ceux qui pensent que Trump n’a pas une vision pour l’Amérique et le monde n’ont pas écouté ses discours et n’ont pas encore lu mon prochain livre. Et ceux qui pensent qu’il change de ligne avec les circonstances imaginent qu’il est dogmatique et aussi aveugle qu’eux : avoir une vision et, ce faisant, prendre en compte l’irruption de données nouvelles relevée la logique la plus élémentaire.

Les dossiers essentiels en politique étrangère auxquels Trump doit se consacrer pour le retour à l’ordre sont d’une part la situation au Proche-Orient et d’autre part la situation en Asie.

Le premier dossier implique la destruction de l’Etat Islamique, la stabilisation de la situation en Irak et en Syrie, et l’endiguement du régime iranien.

  • Son premier but en ce cadre est de pouvoir coopérer avec la Russie pour détruire l’Etat Islamique, d’obtenir la neutralité de la Turquie qui, sous prétexte de combattre l’Etat Islamique entend s’en prendre aux zones autonomes kurdes.
  • Son deuxième but est de parvenir à un règlement de la question syrienne, qui devrait conduire à un morcellement du pays, entre une zone kurde autonome, une zone sunnite qui reste à définir, et une zone alaouite, régie par le clan Assad et alliée de la Russie.
  • Son troisième but est de parvenir à un règlement du même type pour la question irakienne.
  • Son quatrième but est d’endiguer l’Iran en constituant une coalition de pays sunnites alliés à Israël pour mettre en place l’endiguement, et d’obtenir que la Russie s’éloigne de l’Iran.

Bachar al Assad ne veut pas du règlement de la question syrienne voulu par Trump. L’Iran n’en veut pas non plus. Bachar al Assad, poussé par l’Iran entend mener une politique de terreur et d’épuration ethnique anti-sunnite sur le territoire syrien, et placer la Russie devant le fait accompli. Le recours à l’arme chimique il y a quelques jours entrait en ce cadre. Il est désormais avéré que l’armée russe a coopéré avec l’armée syrienne dans le bombardement chimique (cf. atimes.com).

Poutine est vexé que les Etats-Unis aient montré qu’ils sont une grande puissance et que la Russie est désormais une moyenne puissance déclinante

Pour le moment, Poutine semble rester allié d’Assad quoi que fasse ce dernier, et allié de l’Iran. Pour parvenir à ses fins, Trump doit exercer des pressions accrues sur la Russie et sur l’Iran. Il en a les moyens. Rex Tillerson est allé à Moscou demander à Poutine de choisir son camp, et lui dire que s’il choisit Assad et l’Iran, il y aura des conséquences. Il est allé lui dire aussi que l’intérêt de la Russie est de coopérer avec les Etats-Unis, et que s’il coopère avec les Etats-Unis, toute sanction sur la Russie sera levée, et l’annexion de la Crimée sera entérinée.

Poutine tient, surtout, aux bases russes de Lattaquié et de Tartous. Il n’ira pas jusqu’à la guerre avec les Etats-Unis. Il est, pour l’heure, vexé que les Etats-Unis aient montré qu’ils sont une grande puissance et que la Russie est désormais une moyenne puissance déclinante. Il sait qu’il ne peut pas aller trop loin.

  • Il n’y aura pas d’intervention militaire américaine en Syrie par des troupes au sol : en Syrie, outre l’armée syrienne, il y a des troupes iraniennes, mais aussi des chiites venus d’Afghanistan et du Pakistan par dizaines de milliers pour servir de chair à canon, Trump le sait.
  • Il n’y aura pas de renversement d’Assad par l’armée américaine pour les mêmes raisons. Les Etats-Unis exigeront le départ d’Assad et son remplacement par un membre du clan alaouite. A terme, les buts que Trump veut atteindre seront atteints, et il sera important qu’ils le soient.

Une Syrie reprise en main pleinement par Assad impliquerait une multiplication de crimes de guerre, une poursuite de l’épuration ethnique en cours. Un Iran non endigué impliquerait une région allant de l’Afghanistan à Beyrouth aux mains d’un régime fanatique aux intentions génocidaires. Une Russie entérinant cela serait un pays à ranger plus encore qu’aujourd’hui dans la catégorie des Etats voyous.

Trump parle durement à Poutine : il a raison. Il qualifie Assad de criminel contre l’humanité et Poutine de complice : il a raison encore. Trump offre à Poutine une issue honorable. Trump vient de montrer que sa volonté d’en finir avec l’Etat Islamique était inébranlable : avec l’usage d’une seule bombe, celle appelée GBU-43/B Massive Ordnance Air Blast, la plus puissante bombe conventionnelle de l’arsenal américain, il a anéanti la principale base arrière de l’Etat Islamique hors de Syrie, celle située dans la province de Nangarhar en Afghanistan.

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Le deuxième dossier auquel Trump doit se consacrer est l’expansionnisme chinois et la situation en Corée du Nord.

Trump a parlé à Xi Jinping. Il a obtenu des concessions commerciales de la Chine, et une promesse d’arrêt des tentatives d’expansion des eaux territoriales de la Chine en mer de Chine du Sud. Il a aussi demandé à la Chine d’endiguer fortement le régime nord-coréen et d’exiger de celui-ci l’arrêt de son programme nucléaire. Il a dit à la Chine que si elle n’agissait pas les Etats-Unis s’en occuperaient, et qu’il y aurait des conséquences là aussi.

  • La Chine a cessé d’acheter du charbon à la Corée du Nord, ce qui est une façon de couper les vivres à celle-ci.
  • Elle a annulé tous les vols de la compagnie nationale Air China vers la Corée du Nord à partir de lundi 17 avril, ce qui est une façon de l’isoler un peu plus.
  • Une flotte américaine est partie d’Australie et vient renforcer la flotte américaine déjà en place au large de la Corée du Nord.
  • Cent cinquante mille soldats chinois sont sur les frontières de la Corée du Nord.
  • La flotte américaine est là pour montrer que toutes les options sont sur la table, que les Etats-Unis sont là et n’entendent pas laisser la mer de Chine être une mer chinoise.

Le régime nord-coréen sera fortement endigué, voire asphyxié. S’il choisit la guerre, la riposte sera rapide et foudroyante. Une intervention militaire contre Kim Jong-Un serait délicate car le régime s’en prendrait immédiatement à la Corée du Sud et à Séoul. Kim Jong-Un n’en est pas moins sur un siège éjectable désormais. Il ne peut ignorer que la Chine prend Donald Trump au sérieux, que les missiles anti-missiles américains sont à même de détruire tout missile nord-coréen tiré vers les Etats-Unis ou vers un allié des Etats-Unis, et que les Etats-Unis ont d’autres GBU-43/B Massive Ordnance Air Blast en stock.

Trump n’est pas isolationniste, non, je le redis, et il ne l’a jamais été. Il n’est pas néo-conservateur et n’entend pas procéder à des changements de régime. Il entend néanmoins sanctionner et mettre au pas les régimes dangereux pour la paix du monde. Il entend rétablir l’ordre.

Il sait, ai-je dit, que l’ordre ne peut régner que si les Etats-Unis retrouvent leur place. Il sait que les Etats-Unis sont la première puissance du monde et une puissance au service de la liberté, et il n’entend pas s’excuser d’être à la tête de la première puissance du monde et d’une puissance au service de la liberté.

Des explications plus détaillées figureront dans La révolution Trump ne fait que commencer.

Nombre de commentateurs français auraient un besoin urgent de me lire.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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