George W. Bush s’est envolé hier soir pour une tournée de six jours en Afrique destinée à rehausser son bilan international. Mais, le président en fin de mandat reste confronté à des soupçons sur sa stratégie. Le Bénin, la Tanzanie, le Rwanda, le Ghana et le Liberia ont été soigneusement choisis pour l’itinéraire du second voyage de Bush sur le continent et le quatrième de son épouse Laura. Tous recèlent un message positif sur lequel la Maison-Blanche compte insister.

En Tanzanie, dont le président, Jakaya Kikwete, est présenté comme un progressiste modèle, sera signé un contrat d’aide au développement de 698 millions de dollars. Au Rwanda, Bush passera en revue les 7 000 soldats formés par les États-Unis pour participer à la force ONU-Union africaine au Darfour. Au Liberia, il saluera la première femme du continent élue présidente, Ellen Johnson Sirleaf, et le seul pays enclin à accueillir le quartier général du Commandement Afrique de l’armée américaine (Africom).

 

« Un boulot remarquable »

 

La visite de Bush vise surtout à mettre en relief « les progrès importants réalisés dans la lutte contre le sida et la malaria. » Son plan d’urgence contre le sida (PEPFAR), lancé en 2003 avec 15 milliards de dollars, a permis de soigner 1,4 million de malades en Afrique et en Asie, de traiter préventivement 6,5 millions de personnes (dont 2,7 millions d’enfants) et de tester 33 millions de sujets à risques. Une révolution par rapport à sa dernière visite en 2003, où à peine 50 000 malades étaient soignés.

Même ses adversaires lui font crédit d’un « boulot remarquable », selon l’appréciation du chanteur Bono, dont l’acolyte irlandais Bob Geldof accompagnera le président au Rwanda et au Ghana. Bush a demandé au Congrès une rallonge de 30 milliards de dollars pour les cinq prochaines années, chiffre que les démocrates voudraient porter à 50 milliards.

À cause de cette dimension humanitaire, le chef de la Maison-Blanche bénéficie d’une image plus positive en Afrique que dans le reste du monde. Selon le Pew Global Attitudes Project, sa cote atteint même 88 % en Côte d’Ivoire. Mais ce que certains analystes décrivent comme un « tour d’honneur » n’évitera pas les épines. Une manifestation a eu lieu hier à Dar es-Salam, au cours de laquelle des islamistes ont brûlé le drapeau américain en scandant : « Bush vole notre pétrole. »

La Maison-Blanche fait valoir que son intérêt pour l’Afrique procède « d’un impératif moral », qui rejoint ses préoccupations sécuritaires depuis les attentats du 11 septembre 2001. Mais « les vrais enjeux de cette visite sont la quête d’énergie, la lutte contre le terrorisme et la concurrence avec les Chinois », estime Jennifer Cooke du Centre d’études stratégiques (CSIS).

La recommandation du con-seiller à la sécurité nationale, Steve Hadley, à tous les partenaires de l’Afrique de « se conduire de manière responsable » et de chercher, au-delà des « opportunités commerciales, à accélérer son développement et à sortir sa population de la pauvreté », vise clairement la Chine. En tenant ce discours moral, la Maison-Blanche ne saurait ignorer les crises au Darfour, au Kenya, au Tchad, en Somalie, où on lui reproche de ne pas faire assez.

Rejetant cette critique, George Bush dépêchera lundi son secrétaire d’État, Condoleezza Rice, à Nairobi pour appuyer la médiation de l’ancien secrétaire général de l’ONU Kofi Annan dans ce conflit. Et il promet d’utiliser « toutes les ressources diplomatiques » pour accélérer le dé-ploiement d’une force d’interposition au Darfour.