Publié par Guy Millière le 26 mai 2010

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Je n’ai pu que me réjouir du retour de Clotilde Reiss en France voici quelques jours. Cette jeune femme a été victime d’une prise d’otage et, comme au temps de Joseph Staline en Union Soviétique, contrainte de s’accuser de délits qu’elle n’avait pas commis. Ce qui lui est arrivé est le résultat des risques qu’on prend lorsqu’on se rend dans un pays à régime totalitaire, et sur ce plan, elle a incontestablement fait preuve d’imprudence.


Ceci précisé, les discours tenus par les dirigeants français à ce sujet ont été ineptes et ridicules, et ce doit être souligné. L’assassin de Chapour Bakhtiar a été réexpédié en Iran où il a reçu un accueil triomphal. Une somme de deux cent cinquante mille dollars a été versée au gouvernement iranien. Plus grave encore, comme je l’ai noté ici voici peu : un  homme accusé de détournement de matériel sensible par la justice américaine et dont celle-ci demandait l’extradition, Majid Kakavand, a été lui-même renvoyé vers Téhéran, alors même que le matériel qu’il a détourné par le biais d’une société fictive créée en Malaisie peut servir à l’acquisition de l’arme atomique.

 

La France a bel et bien acheté la liberté de Clotilde Reiss. Elle s’est bel et bien couchée. C’est une fois de plus un comportement qui n’a rien de glorieux, et qui aurait pu, au moins, être accompagné de davantage de discrétion et d’humilité.

 

Si on regarde les détails, on voit que, de toute façon, la France, comme l’Allemagne, n’ont cessé, ces dernières années de commercer avec l’Iran. Les propos parlant de « sanctions » contre Téhéran aux Nations Unies, les déclarations d’ « inquiétude » et de « préoccupation » quant à ce que va décider Ahmadinejad relèvent en ces conditions des paroles verbales, du théâtre, et, pourrais-je dire, de la farce. Le malheur est que la farce peut s’achever tragiquement.

 

Je ne pense, cela dit, pas que l’Iran se dotera de l’arme nucléaire : Ahmadinejad n’en a nul besoin pour parvenir à ses fins.

 

Il assoit en ce moment sa domination sur toute la région, du Liban à l’Afghanistan, en passant par la Turquie. Il se crée des alliés jusqu’en Amérique latine : non seulement Hugo Chavez, mais, on l’a vu récemment, Lula da Silva. On peut ajouter à la liste l’Equateur ou la Bolivie, pays riche en uranium où des « experts » iraniens s’affairent beaucoup ces temps derniers.

 

Ahmadinejad peut s’appuyer sur la Russie qui reprend pied dans toute la région en profitant de la déliquescence de l’Europe et de la complicité tacite de Barack Obama, qui rêve d’un monde régi par des gouvernements autoritaires et par les Nations Unies. La Russie n’a à vendre que des armes et des matières premières : en vendant des armes à des régimes douteux, elle accroît les tensions, ce qui fait monter le prix des matières premières.

 

Ahmadinejad peut compter sur la Chine, qui est en train de construire en Iran les raffineries qui manquent au régime : et la Chine a elle aussi intérêt à un monde de tensions où les démocraties s’asphyxient.

 

Il peut compter non seulement sur le Hezbollah et le Hamas ou sur les taliban, qui reçoivent désormais d’Iran l’essentiel de leurs supports logistiques, mais aussi sur ce qui reste d’al Qaida, dont tout semble montrer que les principaux dirigeants sont désormais installés à demeure à proximité de Téhéran.

 

Ahmadinejad n’est qu’un des éléments du dispositif planétaire qui se met en place, et qui ressemble à un cartel de dictatures.

 

J’ai écrit de nombreuses fois que, lorsque les Etats-Unis se retiraient des affaires du monde, les tyrans et seconds couteaux de tous ordres relevaient la tête, les prédateurs et les truands se sentaient des appétits  féroces. Avec Barack Obama, les Etats-Unis, aujourd’hui, font bien pire que se retirer des affaires du monde : ils encouragent tyrans et seconds couteaux, prédateurs et truands.

 

On ne peut, de manière générale, pas compter sur un gouvernement européen pour adopter une attitude vraiment digne. On le peut bien moins encore en ces circonstances : l’Europe meurt doucement, entre banqueroute et désastre démographique, entre faiblesse militaire et pusillanimité diplomatique.

 

Si, au moins, certains dirigeants, tels ceux de la France, pouvaient éviter de brandir un sabre de bois et de prendre une pose soi disant glorieuse pour camoufler un comportement pitoyable, cela commencerait à ressembler un peu moins à de l’imposture. Et cela pourrait, peut-être, redonner aux populations le sentiment qu’elles sont gouvernées par des gens qui restent capables d’autre chose que de comportements consternants.

 

Je sais qu’en rentrant de Münich en 1938, Daladier avait été acclamé. La légende veut que, face aux acclamations, il ait murmuré, « les imbéciles ».

 

Hitler, à l’époque, prenait effectivement les dirigeants des démocraties pour des imbéciles. Ahmadinejad pense avoir affaire à des imbéciles lui aussi. Il n’est pas le seul. C’est d’une évidence flagrante.

 

Des dirigeants tels que les dirigeants français prennent eux-mêmes les populations qu’ils gouvernent pour des imbéciles. Je ne suis pas certain que cela leur vaudra des acclamations. Je ne suis, hélas, pas certain non plus que les populations concernées mesurent la gravité de la situation.

 

Guy Millière

 

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