Publié par Guy Millière le 27 août 2010

L’armée américaine quitte donc l’Irak. Barack Obama avait promis de faire rentrer les troupes au pays et il le fait. Moins de cinquante mille soldats resteront sur place, annonce triomphalement le journal Le Monde. Les commentateurs en France le répètent en chœur : cela ne pouvait pas finir autrement. Et, ajoutent-ils, « c’est un échec ».  Ils n’ajoutent pas que c’est la validation de la politique arabe de la France et du tandem Chirac-Villepin, mais il doit leur arriver de le penser.

Ce qui est clair, et ne sera dit par personne, c’est que les groupes terroristes voient dans la décision d’Obama un signe d’encouragement qu’accompagne une nette recrudescence des attentats : dans la presse française, je sais, on ne dit pas « terroristes », on dit « insurgés », et à ce compte, ceux qui posent des bombes dans un marché sont sans doute des insurgés contre le marché.

Ce qui est révoltant est que la décision d’Obama est prise contre la volonté du peuple irakien qui se sentait protégé par la présence des troupes américaines, comme le montrent des enquêtes d’opinion sérieuses dont nul en France ne parlera, mais aussi contre l’avis des responsables de l’armée irakienne, et contre l’avis, aussi, de nombreux responsables militaires américains, qui apprécient peu qu’Obama transforme une victoire obtenue au prix de l’opiniâtreté en ce qui ressemble à une retraite peu glorieuse.

Ce qui est inquiétant est qu’un pays qui aurait pu devenir un allié solide des Etats-Unis se trouve ainsi abandonné à une situation précaire. Derrière l’opposition Alawi-Maliki, il y a, en fait, l’affrontement entre ceux qui agissent pour le compte de l’Iran, le clan Maliki appuyé par le clan Chalabi, et ceux qui sont plus proches de l’Arabie Saoudite et d’une alliance sunnite chiite, le clan Alawi. Derrière les attentats, il y a, selon toutes les données disponibles, l’Iran, qui entend vassaliser l’Irak et le maintenir dans une vulnérabilité continuelle.

Ce qui est plus inquiétant encore est que cela correspond à ce que j’ai déjà appelé, en divers textes, la « stratégie Obama ».  A l’échelle planétaire, cette « stratégie » vise à affaiblir les Etats-Unis, à leur retirer leur statut de puissance hégémonique pour confier toujours davantage de pouvoir de décision aux Nations Unies et aux puissances qui y ont l’ascendant, la Russie, la Chine, les pays de l’Organisation de la Conférence Islamique, et leurs alliés, tels le Venezuela et le Brésil.

Au Proche-Orient, cette « stratégie »  entend entériner la domination régionale de l’Iran, ainsi que son accès au nucléaire militaire, maintenir un « équilibre » en donnant des moyens de dissuasion à l’Arabie Saoudite et en permettant à la Turquie de devenir puissance islamique,et tout faire pour « régler » le conflit israélo-palestinien en réduisant Israël à un minimum pour, ensuite, soutenir une dénucléarisation généralisée de la région qui concernerait les armes atomiques dont est censé disposer Israel, aussi bien que celles dont l’Iran pourrait être doté bientôt.

Tout cela bénéficie, bien sûr, de l’assentiment global de ceux à qui Obama entend laisser le pouvoir de décision.

L’Arabie Saoudite, l’Egypte, les émirats, ne voient, cela dit, pas  d’un bon œil la domination accordée à l’Iran et souhaiteraient visiblement une autre issue : Obama, je pense, n’agira pas dans le sens que souhaiteraient l’Arabie Saoudite, l’Egypte et les émirats, et fera tout pour empêcher une action israélienne.

L’Autorité Palestinienne ne voit pas non plus d’un bon œil les projets d’Obama : un Etat d’Israël réduit au minimum, dénucléarisé, puis avalé au sein d’un Etat palestinien réduisant les Juifs subsistant au statut de dhimmi, elle ne détesterait pas, mais elle ne veut pas, je l’ai déjà dit, d’une domination iranienne, qui reposerait sur le Hamas.

Israël ne peut, c’est une évidence, que porter un regard très circonspect sur la « stratégie » : les dirigeants israélien ne peuvent pas ne pas constater qu’Obama entend en finir, à moyen terme, avec Israël, quitte à cacher ses actes assassins sous des passages de la douche froide à la douche tiède, sous de fausses marques d’affection, ou sous des négociations destinées à ressembler à une partie de poker menteur où le perdant serait désigné d’avance et aurait une forte ressemblance avec Binyamin Netanyahu.

Non seulement les dirigeants israéliens vont devoir sortir du piège des négociations sans trop apparaître comme les fautifs, en un contexte où la presse internationale s’apprête d’ores et déjà à redoubler de condamnations d’Israël, mais ils risquent fort d’avoir à gérer, après les négociations, une situation tumultueuse ( les négociations précédentes se sont à chaque fois achevées par un déferlement de violence arabe palestinienne), tout en devant se confronter au danger absolu qui monte à Téhéran. C’est une tâche difficile et âpre.

Les dirigeants européens, eux, et c’est pour cela que je n’en ai pas parlé, sont à peine des acteurs de ce drame. Ils ne peuvent agir qu’en sous-main, et verbalement. Ils sapent Israel de l’intérieur en y finançant des organisations antisionistes, et de l’extérieur, en finançant l’Autorité Palestinienne. Ils sont hostiles à Israël, comme Obama, mais plutôt dans le camp arabe. L’affaiblissement du camp arabe qui résulte ne devrait pas les enchanter, mais ils sont, je pense, prêts à s’en accommoder : s’accommoderont-ils de l’islamisation de la Turquie et de la nucléarisation de l’Iran ? Sur le continent que gèrent les dhimmis, tout est possible.

La presse française se félicite du retrait d’Irak par réflexe conditionné anti-américain (le chien de Pavlov salivait en entendant la sonnette, les journalistes français frétillent en voyant les mots « échec américain » et seuls les mots « échec israélien » les font frétiller davantage) : se félicite-t-elle de la recrudescence d’attentats ? Sans doute. Se félicite-t-elle aussi de l’affaiblissement de l’Irak, et, elle-même, de l’islamisation de la Turquie et de la nucléarisation de l’Iran qui se profile si Israël n’est pas en mesure d’agir ? Dans une presse soumise, c’est tout à fait possible, et s’ils apprécient l’islam arabe, les journalistes soumis  se feront aussi aux charmes de l’islam iranien et à ceux d’une Turquie islamique aussi anti-israélienne qu’eux.

Nombre d’Américains s’inquiètent de la « stratégie d’Obama » en laquelle ils voient l’abaissement de leur pays, la destruction de sa puissance, la trahison d’alliés des Etats-Unis, et, au premier chef, d’Israël. Les analystes s’inquiètent des conséquences et craignent un monde moins sûr pour la liberté économique et politique, plus sûr pour les dictatures plus susceptible de connaître des turbulences et des violences graves, moins porteur de perspectives de prospérité. La population juive américaine, elle-même, se détourne d’Obama, constatant que non, vraiment non, il n’est pas du tout un ami d’Israël : mieux vaut tard que jamais.

Guy Millière

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