Publié par Guy Millière le 12 novembre 2010

Il vous manque ?

George Walker Bush a été le Président des Etats-Unis le plus détesté, le plus critiqué, le plus haï. Il a été traîné dans la fange par la gauche américaine parce que celle-ci a tourné le dos aux valeurs qui ont fait des Etats-Unis ce qu’ils sont et parce qu’elle est, en fait, profondément anti-américaine. Il a été mis plus bas que terre par la gauche et les bien pensants européens qui exècrent et méprisent les Etats-Unis, lorsque ceux-ci sont conformes à leurs idéaux, et ne se conduisent pas en pays décadent et pusillanime. Il a été vomi par les islamistes, les ressentimentaux, les bilieux de toute la planète.  

J’ai tenté, dans plusieurs livres, d’expliquer ce qu’il était, ce qu’était son action, ce qui constituait la doctrine Bush. Et j’ai découvert assez vite que c’était peine perdue, sauf pour les dix ou quinze mille personnes qui m’ont lu. J’ai, à cette occasion, perdu mes dernières illusions sur la bonne foi de nombre de gens qui ont des mots tels que « droits de l’homme » et « liberté » plein la bouche, mais qui, dès qu’il s’agit de défendre concrètement les implications de ces mots, s’empressent d’oublier leur sens.

J’envisage toujours néanmoins d’écrire un livre sur ces années, 2001-2009. Je l’écrirai moins pour les lecteurs du présent (même s’ils m’importent) que pour ceux du futur, lorsque le temps de l’histoire viendra, car je ne doute pas qu’il viendra. Les phases de déclin, de tourmente et de décombres comme celle en laquelle nous sommes ne durent pas, car la stérilité ne produit que davantage de stérilité, et il vient toujours un temps où un recommencement se dessine.  

Je pense qu’en écrivant ses mémoires, George W. Bush a songé lui-même surtout au futur et au temps de l’histoire. Je pense qu’il sait ce qu’il a accompli, ce qui lui donne une sérénité inébranlable. Je pense qu’il sait ce qui se murmure, ce qui va s’écrire, et ce qui s’écrit déjà le concernant, aujourd’hui, parce qu’il sait ce qui s’est murmuré et ce qui s’est écrit quand il était Président, et je pense que cela lui importe peu. Il a une vie après la présidence, sous la forme de la fondation George W. Bush, créée au Texas l’an dernier. Il a fait ce qu’il avait à faire. Il a écrit ce qu’il devait. Il fera, dans le futur proche, ce qu’il devra.  

Lire « Decision Points », noterai-je, ce sera, pour ceux qui le feront avec honnêteté (il y en aura beaucoup aux Etats-Unis, il y en aura quelques-uns en France) découvrir, au travers des yeux et de l’esprit d’un homme, qui a occupé la Maison Blanche dans une période particulièrement dure, et particulièrement âpre, ce qu’ont été ses décisions, ce qui les ont motivées, ce qu’ont pu être ses doutes parfois. Ce sera aussi découvrir un homme à proprement parler, car George W. Bush ne cache rien de ses émotions, de la tristesse et de la douleur qu’il lui a fallu souvent assumer.

Le livre commence avec la chute et la rédemption, le glissement vers la déchéance qui aurait pu se poursuivre, et la possibilité offerte de se retrouver soi-même par l’éthique, la transcendance et la foi en Dieu. Il se poursuit par la carrière professionnelle, le passage à la politique, la préparation minutieuse aux fonctions de Président. Il traite du onze septembre, et narre en détail ce que ce fut d’apprendre les attentats du onze septembre lors d’une visite dans une école maternelle, rappelant avec des mots simples le sang froid qu’il a fallu pour ne pas effrayer les enfants, et commettre des gestes précipités.

Bush explique pourquoi il a dû être dès lors un Président de guerre, avec tout ce que cela implique, et pourquoi la guerre implique parfois de ne pas avoir à choisir entre la bonne et la mauvaise solution, mais entre la mauvaise solution et une solution qui serait bien pire encore. La stratégie de renversement du régime taliban en Afghanistan, et de destruction des bases arrières d’al Qaida, est exposée sans fard : al Qaida devait être mis hors d’état de nuire, et l’Afghanistan devait être rebâti de façon à ce qu’il ne puisse plus abriter de groupes terroristes. La stratégie de changement de régime en Irak est exposée aussi : tous les pays occidentaux, absolument tous, savaient que Saddam Hussein disposait d’armes de destruction massive, et que le maintien d’un embargo envers l’Irak était intenable. Des erreurs ont été commises dans la gestion de l’après guerre, et Bush les reconnaît et les assume : quand bien même il était prévisible que les djihadistes du reste de la planète viendraient se battre en Irak, ce qui impliquait de les éliminer à mesure de leur arrivée, leur degré de déferlement et leur acharnement barbare sur la population irakienne avaient été mal anticipés. Mais, comme le dit Bush, une guerre sans erreurs n’existe pas. 

Bush explique pourquoi l’Irak se porte mieux sans Saddam Hussein, et regrette une stratégie d’abandon précipité du pays, susceptible de déboucher sur un retour à la violence (et sur ce plan, les faits lui donnent effroyablement raison). Il explique, sans insister, son intense déception face aux mensonges de dirigeants européens, tels que Gehrard Shröder et Dominque de Villepin qui, après avoir promis leur soutien, ont changé d’attitude, et se sont livrés à de très sombres manœuvres, et il explique brièvement les effets de ces mensonges et de ces manoeuvres, qui ont été de compliquer les opérations à mener, et de les différer. Il note sa colère, lorsqu’il fut informé de ce que l’essentiel des stocks d’armes de destruction massive avait disparu. Il se contente, pour Jacques Chirac, de quelques notes : un homme « peu attaché à la liberté et à la morale », écrit-il. Il expose ce que j’ai expliqué dans mes propres livres, et qui a constitué la doctrine Bush : l’objectif était effectivement de faire tomber le régime iranien, en accentuant la pression sur lui, et en encourageant les forces de résistance intérieure ; cet objectif n’a pas été atteint parce que certains alliés des Etats-Unis (l’Allemagne en particulier) ne se sont pas comportés comme des alliés, et ont continué à commercer avec l’Iran. Il souligne sa certitude de ce que le monde musulman doit pouvoir se voir offrir une autre voie que le choix entre des dictatures créatrices de frustration, et le fanatisme islamique. Il expose, en des mots émouvants et limpides, son amitié pour Israël (et Bush a incontestablement été le plus grand ami qu’Israël ait jamais eu à la Maison blanche), mais aussi son amitié pour les peuples arabes, qu’il pense capables d’accéder à la liberté et à la prospérité.  Il assume ses décisions concernant Guantanamo, car les membres des groupes terroristes qui ont été arrêtés présentaient des problèmes spécifiques, en ce qu’ils n’étaient pas des soldats d’une armée, mais des gens formés au mensonge, et prêts à toutes les ruses et duplicités. Il assume aussi le recours à des pratiques d’interrogation impliquant le waterboarding, simulation de noyade : quand il s’agit de sauver des vies et d’éviter des attentats, se donner les moyens d’obtenir des informations est un impératif justifiant ces moyens, note-t-il.  

Il reconnaît des échecs : ne pas avoir obtenu la chute du régime des mollahs, ne pas avoir pu aller plus loin dans la transformation du Moyen Orient. Des échecs ont eu lieu aussi dans le secteur de la politique intérieure : ne pas avoir obtenu du Congrès l’abolition du Community Reinvestment Act d’où sont sortis les prêts subprime, qui ont joué un rôle de déclencheurs dans la crise financière, ne pas avoir réussi à assainir les pratiques des deux organismes para-publics de rachat d’hypothèques, Fannie Mae et Freddie Mac, qui ont eux-mêmes joué un rôle crucial dans le gonflement de la bulle immobilière. Néanmoins, certains décisions relèvent du Congrès, et si le Congrès ne les prend pas, le Président ne peut les imposer.

Pour répondre à  l’avance à ceux qui, reconstruisant les faits, l’accusent d’avoir creusé démesurément les déficits publics, il rappelle les coûts des guerres qu’il a fallu mener, et qui sont effectivement infimes et sans comparaison avec ceux de la guerre du Vietnam. Il rappelle aussi les chiffres des dépenses du gouvernement fédéral en proportion du PIB : celles-ci s’élevaient à 19,8% sous Bill Clinton, et à 19,6% sous sa Présidence à lui, George Walker Bush. Le déficit budgétaire en proportion du PIB a été en moyenne de 2% pendant les années 2001-2008. Le chiffre, depuis, a explosé. Les baisses d’impôts sous sa présidence sont expliquées de manière simple : laisser l’argent dans la poche des créateurs de richesse permet que ceux-ci investissent et créent des emplois, laisser l’argent dans la poche des contribuables leur permet de dépenser et d’épargner. Les années Bush ont été, malgré les effets du onze septembre, des années de croissance et de chômage faible. La crise, souligne-t-il, n’a pas été due à une absence de régulations, mais une crise due à des incitations perverties par de mauvaises décisions politiques. Lorsque celle-ci s’est déclarée, le plan de refinancement des banques en urgence était, assure Bush, le seul moyen d’éviter une crise bien plus grave et bien plus profonde, où les banques auraient fait faillite les unes après les autres, et le Fed a joué son rôle de prêteur en dernier ressort.  

Avec une élégance dont son successeur est totalement dépourvu, et avec des scrupules qui l’honorent, George Walker Bush se garde de juger de la politique suivie par Barack Obama. N’étant pas tenu par les mêmes scrupules, j’ai exposé abondamment comment, et pourquoi, Barack Obama a utilisé une crise provoquée par les démocrates du Congrès, ceux-là même qui ont voté le Community Reinvestment Act, et qui ont couvert les pratiques les plus douteuses de Fannie Mae et de Freddie Mac, pour tenter de transformer radicalement les Etats-Unis : cette transformation radicale a été refusée par le peuple américain le 2 novembre dernier. J’ai exposé aussi comment, et pourquoi, Barack Obama avait replacé la doctrine Bush par une doctrine Obama, très favorable aux dictateurs et aux islamistes. J’aurai, hélas, amplement l’occasion d’y revenir.  

Ici, aujourd’hui, je voulais seulement rétablir certaines vérités, et parler d’un Président qui aimait et aime toujours son pays, qui a été digne des fonctions de Président, et qui, parce que pour lui le mot « liberté » voulait dire quelque chose, a été traité de manière infâme.

Guy Millière

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