Publié par Guy Millière le 14 février 2011

La justice en France fonctionne mal. Très mal. Une large proportion de gens condamnés à de petites peines (moins de deux ans), ne sont pas emprisonnés. Des condamnés à des peines plus lourdes bénéficient de mesures de liberté conditionnelle, ou d’aménagements qui impliquent un suivi par des juges d’application des peines, dont le rôle a des ressemblances frappantes avec celui d’une assistante sociale. Le nombre de places en prison est très insuffisant.

Aux juges proprement dit, et aux juges d’application des peines, s’ajoutent les juges d’instruction, chargés de mener les enquêtes. Les lois, chaque année, s’ajoutent aux lois, et complexifient ce qui est déjà complexe. 

Les membres de la magistrature, comme tant de gens, sont fonctionnaires, et sortent d’une école spécialisée, l’Ecole Nationale de la Magistrature. Comme tous les fonctionnaires, ils ont des syndicats très politisés, et très à gauche, qui renforcent le discours du prêt-à-penser juridique, selon lequel le criminel est avant tout une victime de la société qu’il faut soigner et réinsérer. Ce prêt-à-penser s’intégrant parfaitement au politiquement correct des milieux journalistiques et intellectuels, celui-ci ne se trouve remis en cause par quasiment personne.

Depuis son arrivée au pouvoir, Nicolas Sarkozy a tenté, directement, ou par ses ministres de la justice successifs, de procéder à des changements. Ceux-ci se sont révélés insuffisants, et n’ont remédié à rien ou presque, pour des raisons très explicables : le changement, s’il devait avoir lieu, devrait être un changement total. 

Chaque signe de dysfonctionnement grave, et il y en a beaucoup, conduit, bien sûr, Nicolas Sarkozy à faire des constats sévères et justifiés. C’est ce qu’il a fait à nouveau avec le meurtre de la jeune Laetitia, violée, assassinée, et découpée en morceaux par un multirécidiviste. 

Comme à chaque fois, les journalistes ont adopté une attitude critique vis-à-vis des propos de Nicolas Sarkozy. 

Mais cette fois, il y a eu, en supplément, une réaction corporatiste. Les membres du personnel juridique se sont déclarés « offusqués », « indignés », et se sont mis en grève. On aurait porté atteinte à leur indépendance. On aurait remis en cause la séparation des pouvoirs. Le budget de la justice serait insuffisant.

Divers sondages ont montré que la population a, par une majorité supérieure à soixante pour cent, approuvé ce mouvement de grève. 

La gauche, irresponsable comme à son habitude (mais écrire « gauche irresponsable » relève depuis longtemps du pléonasme), a elle-même apporté son entier soutien au mouvement.  

Je l’ai écrit plus haut : c’est un changement total qu’il faudrait. J’ai publié, avec trois amis juristes, un livre appelé « Avancer vers l'état de droit ». Je lui ai donné ce titre parce que je pense que la France n’a jamais été un état de Droit, et que tout pas dans la bonne direction serait le bienvenu. Je pense aussi que la situation est si grave que quelques pas ne suffiraient pas. 

Il importerait en tout premier lieu de réformer l’enseignement du droit dans les universités et les écoles spécialisées, en partant de la philosophie du droit naturel, et en rétablissant une compréhension des notions de bien et de mal, de crime et de châtiment, de coupable et de victime, de coercition légitime et de coercition illégitime. 

Il importerait de pouvoir, au bout de cette réforme, rétablir une perception de ce que doit être la justice dans une société de droit : un moyen de sanctionner les crimes et délit, d’exclure, voire d’éliminer de la société ceux qui nuisent à autrui, et de prononcer des châtiments proportionnels au crime commis. 

On pourrait à partir de là  instaurer un système juridique reposant pleinement sur la présomption d’innocence (qui, quoi qu’on dise, n’existe pas en France) et sur l’existence d’une échelle des peines digne de ce nom, qui irait, pourquoi pas, jusqu’au rétablissement de la peine de mort. 

On pourrait aussi se débarrasser d’un ensemble de lois liberticides qui aboutissent à demander à des magistrats de juger des crimes qui n’en sont pas, tels l’essentiel des délits de presse et d’opinion. 

Il resterait à éliminer de la justice les fonctions d’assistance sociale qui ne sont pas les siennes, à supprimer l’Ecole Nationale de la Magistrature, qui n’a pas son équivalent dans nombre de sociétés démocratiques, et de faire que les juges et les procureurs qui, dans chaque département, traitent des délits les plus banals, soient élus au suffrage universel.

En ces conditions, les assassins pourraient être condamnés à la perpétuité réelle. Les violeurs pourraient être condamnés à des peines jamais inférieures à vingt ans incompressibles, et à la perpétuité en cas de récidive. Les pédophiles pourraient être exclu de la société à jamais. Pour les autres crimes, une règle telle celle faisant qu’à la deuxième récidive, la condamnation devient une condamnation à perpétuité (règle en vigueur dans plusieurs états des Etats-unis) pourrait être établie. 

Les lois sur la légitime défense devraient, bien sûr, être réécrites. 

Les tâches confiées à la police devraient être revues, et dirigées davantage vers la lutte contre la criminalité qu’en direction des contrôles d’identité et du rackett exercé sur les automobilistes. 

Cela ne coûterait pas plus cher, et même s’il fallait construire des prisons supplémentaires, on pourrait faire songer à faire travailler les prisonniers : avoir commis un crime ne devrait pas donner le droit d’être nourri, logé, gardé gratuitement. En privatisant les prisons et en faisant travailler les prisonniers, on pourrait même dépenser moins.

Je sais que ce que je propose là est impensable en ce pays. Proposer un dixième de ce que je propose suffirait à déboucher sur une grève bien plus grave que celle qui vient d’avoir lieu : une grève illimitée de toutes les professions juridiques. Cela déboucherait aussi sur des campagnes de presse incendiaires, une levée de bouclier de toute la gauche, et de toutes les associations prétendant défendre les droits de l’homme. 

Il en est ainsi dans les sociétés atteintes d’une maladie mortelle. 

Des hommes tels que Nicolas Sarkozy peuvent tout juste faire des réformes insuffisantes, et procéder à des constats. Ceux qui pourraient remplacer Nicolas Sarkozy ne pourraient faire mieux que lui, et feraient sans doute pire. 

Dans les sociétés mortellement malades, les dirigeants politiques peuvent accompagner la maladie en tentant tant bien que mal d’en atténuer les effets, mais sans pouvoir la soigner. Ils peuvent aussi aggraver la maladie. Ils ne peuvent rien de plus. 

Et des jeunes femmes comme Laetitia sont condamnées à être violées, tuées et découpées en morceau par des multirécidivistes censés avoir été « soignés », ou « avoir payé leur dette à la société ».

Les familles des victimes, elles, sont priées de rester « dignes », autrement dit, de se taire et de souffrir en silence.

Guy Millière

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