Publié par Guy Millière le 8 février 2012
« La France tente de surmonter la paralysie à l'ONU », titrait hier le Figaro. On lisait plus loin : « impératif catégorique : ne pas former un « front occidental », mais laisser les pays arabes en première ligne. » 
 
Utiliser un vocabulaire kantien pour habiller une lâcheté constitue un abus, mais qui sait encore la « Fondation de la métaphysique des mœurs » du sage de Königsberg de nos jours ?
 
Dans Le Monde, journal officiel de l’Autorité Palestinienne en France, c’était « L'UE et les Etats-Unis promettent d'augmenter la pression sur la Syrie » : Bashar Al Assad a dû en frémir. Libération avait choisi un autre angle : « Syrie: la Russie et la Chine critiquées ». Les dirigeants chinois et russes doivent avoir les larmes aux yeux en imaginant qu’on les critique.
 
En attendant, Bashar al Assad reste au pouvoir. 
 
Et il est très vraisemblable qu’il y restera. L’Europe est impuissante et la France, avec ses petits bras et sa petite armée, l’est encore plus, et ni l’Europe ni la France ne feront quoi que ce soit qui ne soit pas approuvé par les pays de l’Organisation de la Coopération Islamique ou qui puisse vraiment fâcher la Chine et la Russie. Dès lors qu’il n’y a plus d’abonné au numéro qu’on pourrait demander à la Maison Blanche, et que l’occupant des lieux est lui-même un grand ami de l’Organisation de la Conférence Islamique, et a des conseillers si compétents, qu’ils confondent Perestroika et Peregruzka, il n’y a rien à attendre de ce côté là. Bernard Henri Levy qui avait si bien su trouver un taxi pour Tobrouk et poursuivre la route jusqu’à Benghazi n’a pas su trouver le chemin de Damas et ne sera pas, cette fois, partisan de l’islam radical et de la guerre sans l’aimer. 
 
La différence entre Kadhafi et Assad fils est que Kadhafi coopérait avec les Occidentaux, n’était plus en odeur de sainteté chez les islamistes sunnites, n’avait pas d’alliance avec l’Iran, et pas de relations étroites avec la Chine et la Russie. Très mauvais choix de la part de Kadhafi. 
 
Assad fils lui, a contre lui les islamistes sunnites, mais il a l’Iran de son côté, la Russie qui lui fournit tout l’armement dont il a besoin, la Chine aussi. Très bons choix de la part de Assad fils. 
 
Kadhafi a fait tirer dans la foule quelquefois. Bashar Al Assad peut organiser une boucherie et se faire grossiste. Il pourra faire comme son père, et rayer des quartiers entiers d’une ville. Il en est à plus de cinq mille morts, et on ne compte pas les blessés, mutilés ou torturés. Il ne lui arrivera vraisemblablement rien. Les pays sunnites aimeraient le voir partir et souhaiteraient son remplacement par un gouvernement centré sur les Frères musulmans. Ils souhaiteraient briser l’alliance chiite qui va de Téhéran à Beyrouth, et endiguer l’Iran, mais sans forces supplétives occidentales, ils ne peuvent pas grand chose.
 
Ce qui devrait être flagrant si les journalistes en ce pays se comportaient en journalistes, est que les Nations Unies sont en eux-mêmes une horreur. 
 
Cette organisation est une imposture coûteuse et le plus souvent obscène. Il n’est pas un seul conflit que les Nations Unies aient arrêté. Il n’est pas une intervention efficace qu’on puisse leur attribuer. Il y existe en assemblée générale une écrasante majorité de dictatures, de tyrannies et de satrapies. Au Conseil de Sécurité, deux membres permanents sont les alliés des dictatures, tyrannies et satrapies, et sont des régimes de type fasciste ; un membre est encore un peu porteur des valeurs de liberté, puisqu’Obama n’a pas encore pu complètement trahir les idéaux américains, quels que soient ses désirs, et deux membres oscillent et vacillent, la France et le Royaume-Uni.
 
Le mot « paralysie » est adéquat. Et la paralysie est ce qui peut sortir de mieux des Nations Unies. Souvent, il en sort bien pire. Si les Etats-Unis retrouvent un Président digne de ce nom, il devra prendre les mesures qui s’imposent. Et la réalité est que quand les Etats-Unis ne font rien pour que la barbarie s’arrête quelque part sur terre, la barbarie se poursuit. C’est une démocrate, Madeleine Albright, qui avait parlé de « puissance indispensable » : c’était avant la dérive gauchiste du parti démocrate. 
 
Ce qui devrait être dit est que la motion présentée à l’ONU était totalement éviscérée, et ressemblait à une enveloppe vide, puisqu’elle appuyait juste la mission d’observation arabe dirigée par le général soudanais Mohammed Al Dabi, organisateur des massacres du Darfour. Le veto de la Russie et de la Chine était un geste strictement symbolique. Que la France, le Royaume-Uni et Obama aient proposé une motion éviscérée montre que ces pays sont dirigés aujourd’hui par des paillassons : que la Russie et la Chine s’essuient les pieds sur les paillassons en fait seulement des paillassons piteux.
 
Ce qui devrait être expliqué est que la Syrie est un allié stratégique crucial pour l’Iran et pour la Russie, et que la Chine a intérêt elle-même à ce que la Russie et l’Iran gardent un pouvoir de nuisance important. La Russie a, en supplément, un intérêt très net aux tensions au Moyen-Orient, qui font monter le prix du gaz et du pétrole. 
 
Ce qui devrait être dit est que l’alternative en Syrie est de toute façon pas beaucoup mieux que ce qui est en place. Des islamistes sunnites seraient-ils plus doux et fréquentables que des alliés de l’islamisme chiite ? 
 
La communauté alaouite, branche du chiisme à laquelle appartient Assad, représentent douze pour cent de la population, et si Assad tombe, ce sera un bain de sang dans une autre direction. Pour l’heure l’armée constituée de déserteurs syriens réfugiés en Turquie est très mal organisée et ne peut, de toute façon, en aucun cas faire tomber Assad : tout juste peut-elle entretenir des foyers d’insurrection et de guerre civile. 
 
Ce qui pourrait arrêter le bain de sang serait une véritable force d’interposition. Celle-ci, si cela se produisait, serait « unilatérale » comme on dit en France. Mais cela ne se produira pas. 
 
Quand il n’y a pas d’intervention « unilatérale », on peut voir des images de massacre à la télévision le soir en prenant son dîner. Et puis on passe à autre chose. 
 
Au temps de Bush, on vociférait contre les Etats-Unis. Aujourd’hui, on ne vocifère contre personne. Bush a été remplacé par un prix Nobel de la paix. Cela force le respect, non ? 
 
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© Guy Millière pour www.Dreuz.info

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