Publié par Guy Millière le 2 août 2012

Le discours prononcé par Mitt Romney à Varsovie sera sans doute moins commenté que celui qu’il a prononcé à Jérusalem. Il n’en est pas moins important, car il vient compléter les contours de la politique étrangère qui serait celle d’une administration Romney.

Face à la désinformation ambiante, j’ai décidé de le traduire aussi.

Les points les plus notables sont une réaffirmation de l’importance et du rôle de l’OTAN, un soulignement de ce que les alliances pour les Etats-Unis sont basées sur la défense de la liberté, un rappel très net de ce que la défense de la liberté repose sur des racines juives et chrétiennes, une définition claire de ce qu’est l’ennemi, à savoir le jihad et les tyrannies, une position ferme face à la Russie définie comme pays où la quête de liberté a échoué. On peut ajouter une affirmation des liens indissociables entre liberté économique, liberté politique et valeurs éthiques.

Aucune de ces dimensions n’a été relevée par les commentateurs français, qui cachent à peine leur mépris pour le candidat républicain, qui ne partagent visiblement aucune de ses idées, et qui ne semblent avoir d’autre but que de le dénigrer.

Romney entendait par ce voyage poser ses marques en matière internationale. C’est fait. Romney n’est pas un candidat faible, comme j’ai pu le lire. Il lui reste des déficits à combler, et j’y reviendrai. Mais il est bien entouré. Il tient des propos nets et précis, qui l’engagent et le démarquent nettement du présent occupant de la Maison Blanche, qui parle rarement de liberté, qui ne sait pas s’il y a des ennemis, qui se plait à invoquer le Coran, et qui entend se montrer « flexible » vis-à-vis de la Russie. Je pense que le discours de Romney est trop teinté d’illusions concernant l’évolution possible du monde arabe. Mais lorsque je le compare à celui d’Obama, je ne puis hésiter une seule seconde.

Czeslaw Nowak, cité dans le discours, est Président de l’association des anciens de Solidarité.
Guy Millière

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Je vous remercie tous beaucoup pour l’accueil chaleureux que vous m’avez réservé dans cette belle et grande ville.

Cela a été un privilège pour moi de rencontrer le président Komorowski, le Premier ministre Tusk, le ministre des Affaires étrangères Sikorski, et l’ancien président Walesa.

La Pologne est un pays qui a un patrimoine extraordinaire et un avenir remarquable. En une époque de ralentissement économique généralisé et de stagnation, l’économie polonaise l’an dernier a dépassé, en termes de croissance, toutes les autres économies d’Europe.

J’ai commencé ce voyage en Grande-Bretagne et je l’achève ici en Pologne : les deux extrémités de l’OTAN, la plus grande alliance militaire de l’histoire, une alliance qui a préservé la paix pendant plus d’un demi-siècle. Quand j’étais au 10 Downing Street, je repensais à l’époque de Winston Churchill, l’homme qui le premier a parlé du rideau de fer descendu au milieu de l’Europe. Quel honneur pour moi d’être en Pologne, parmi les hommes et les femmes qui ont contribué à faire lever le rideau.

Après mon séjour en Angleterre, j’ai visité l’Etat d’Israël – un ami de votre pays et du mien.

Ce voyage n’a conduit à trois endroits éloignés sur la carte.

Mais pour un Américain, il n’est pas possible de trouver des endroits plus proche des idéaux et des convictions de son propre pays. Nos pays appartiennent à la grande communauté des démocraties. Nous parlons la même langue de liberté et de justice. Nous défendons le droit de toute personne à vivre en paix.

Je crois qu’il est essentiel d’être au côté de ceux qui se tiennent au côté de l’Amérique. Solidarité a été un grand et noble mouvement qui a libéré un pays. Et c’est dans la solidarité que l’Amérique et la Pologne regardent l’avenir.

Hier, je suis allé au mémorial de Westerplatte et devant la porte au chantier naval de Gdansk, où les citoyens polonais se sont tenus debout avec courage et détermination, contre vents et marées. Et aujourd’hui, à la veille du 68e anniversaire du soulèvement de cette ville contre les nazis, je vais rendre hommage à ce combat historique devant le monument qui lui est dédié. Plus de 200.000 Polonais ont été tués dans cette période, et cette ville a été presque entièrement détruite. Mais votre esprit de résistance a survécu.

Les hommes et les femmes libres partout dans le monde, qu’ils soient venus ici ou non, le savent déjà : au cours des heures désespérées du siècle dernier, les Polonais étaient les témoins de l’espérance, poussés par la force du cœur et la foi en Dieu. Par la force des armes, mais aussi par la puissance de la vérité, dans les villages et les paroisses de ce pays, vous avez combattu l’oppresseur et fait vivre la lumière face à l’obscurité.

Maintes et maintes fois, l’histoire a vu s’embraser la flamme de la liberté, propulsée par des âmes qui aspirent à la justice. L’ancienne secrétaire d’Etat américaine, Condoleezza Rice a fait remarquer que ce sont souvent des gens simples mais braves qui disent « non » à l’oppression, et qui, ce faisant, provoquent un élan de courage chez des centaines, des milliers ou des millions d’autres.

En 1955, dans mon pays, Rosa Parks a dit « non » à un chauffeur de bus qui lui demandait de céder sa place à une personne blanche, et, ce faisant, a commencé une révolution de la dignité et l’égalité qui se poursuit jusqu’à ce jour. Mohamed Bouazizi, un vendeur de rue en Tunisie, a été privé de ses marchandises par un fonctionnaire du gouvernement, et, en signe de protestation, s’est suicidé en s’immolant. Par cet acte de défiance, le soulèvement du monde arabe est né.

Nicolai Ceausescu parlait devant un public de 200.000 personnes, et exposait ses accomplissements. Une femme âgée a crié ce que les autres pensaient. « Menteur », a t-elle dit. D’autres ont fait écho à ses paroles, des centaines, puis des milliers de gens. Et avec la chute de Ceausescu quelques jours plus tard, le pays tout entier s’est réveillé et un peuple a été libéré.

Ici, en 1979, un fils de la Pologne, le pape Jean-Paul II, a prononcé des paroles qui ont contribué à faire tomber un empire et à apporter la liberté à des millions de personnes qui vivaient dans la servitude. « N’ayez pas peur » : ces mots ont changé le monde.

Moi et mes compatriotes américains, sommes admiratifs du chemin vers la liberté tracé par le peuple de la Pologne.

Bien longtemps avant les temps modernes, le peuple polonais et le peuple américain n’étaient pas étrangers l’un à l’autre. Le nom « Pulaski » est honoré jusqu’à ce jour en Amérique, et avec lui l’est la mémoire des Polonais qui nous ont rejoint dans notre lutte pour l’indépendance. Deux ans plus tard, notre jeune république a donné au Nouveau Monde sa première constitution écrite et librement adopté. La Pologne a fait de même pour le Vieux Monde, avec un préambule qui a appelé la liberté comme « nous étant plus chère que la vie elle-même ».

A chaque tournant de notre histoire, par delà les guerres, les crises, les changements géopolitiques, nous nous sommes retrouvés en tant qu’amis et alliés. Cela a été vrai pendant la guerre révolutionnaire américaine. Cela a été vrai dans les jours sombres de la Seconde Guerre mondiale. Et cela a été le cas en Irak et en Afghanistan. Il n’y a jamais eu un moment où nos peuples ont ressenti l’un envers l’autre quelque chose d’autre que le respect mutuel et la bonne volonté, et ce n’est pas commun dans l’histoire.

Les Américains ont observé avec étonnement et admiration, comment un simple électricien a pu conduire un soulèvement pacifique contre un régime brutal et oppresseur.

Comme le Président Walesa l’a récemment déclaré, « la philosophie du mouvement Solidarité a été très simple. Lorsque vous ne pouvez pas soulever un poids tout seul, vous demandez à quelqu’un d’autre de vous aider pour le soulever avec vous. »

Parmi les millions de Polonais qui ont dit « oui », il y avait celui qui occupe une place unique et spéciale dans nos cœurs: le pape Jean-Paul II. Quand il est apparu sur le balcon de la place Saint-Pierre, un correspondant présent sur les lieux a écrit à son rédacteur en chef : « Ce n’est pas seulement un pape de Pologne. C’est un pape de Galilée ».

En 1979, le Pape Jean-Paul II a célébré la messe avec vous sur une place qui n’est pas très loin d’ici. Il a rappelé au monde qu’il n’y aurait pas de justice en Europe sans une Pologne indépendante, et il a rappelé au peuple polonais, longtemps privé de son indépendance, d’où il tirait sa force.

Tout en saluant une foule assemblée le long d’une clôture, il a rencontré une petite fille. Il s’est arrêté et lui a demandé: « Où est la Pologne? » . La petite fille, prise au dépourvu – n’a pas pu répondre. Elle a ri nerveusement jusqu’à ce que le grand pape mette sa main sur son cœur et dise: « La Pologne est ici ».

Jean-Paul II comprenait qu’un pays, ce n’est pas un drapeau ou un lopin de terre. C’est un peuple, une communauté de valeurs. Et la valeur la plus élevée en Pologne – pour la chance du monde – est le désir inné de l’homme d’être libre.

Malheureusement, il y a des parties du monde aujourd’hui où le désir d’être libre se heurte à l’oppression brutale : Juste à l’Est d’ici, les gens du Bélarus souffrent sous le poids de la dictature. Le monde arabe est l’objet d’un bouleversement historique, riche de promesse, mais aussi de risques et d’incertitude. Un dictateur sans pitié en Syrie a tué des milliers de ses propres citoyens. En Amérique latine, Hugo Chavez conduit un mouvement caractérisé par l’autoritarisme et la répression. Des peuples en Afrique se battent pour résister à la menace du jihad radical et violent. Et en Russie, les avancées prometteuses vers une société libre et ouverte ont échoué.

Dans un monde turbulent, la Pologne est un exemple et un défenseur de la liberté.

Le mois dernier, à Gdansk, une sculpture a été dévoilée montrant le Président Reagan et Jean-Paul II. Quand il était Président, Lech Walesa a dit à un journaliste, « Reagan devrait avoir un monument dans chaque ville ».

Czeslaw Nowak, a rappelé les jours de 1981 quand lui, Lech Walesa, et d’autres ont été emprisonnés par le régime communiste. Juste au moment où on avait l’impression qu’ils pourraient être oublié par le reste du monde, ils ont appris qu’à la Maison Blanche, le Président des États-Unis était avec eux et allumait des bougies. C’était une démonstration d’amitié, un signe de solidarité. « Quand Reagan allumé les bougies », a rappelé Czeslaw Nowak, « nous avons su que nous avions un ami aux Etats-Unis ».

Ce pays est celui qui a fait d’un prisonnier un président, celui qui est passé de la domination étrangère à la fière indépendance que vous incarnez aujourd’hui. Et maintenant, pour nos deux pays, le défi est d’être digne de cet héritage et de nous donner les moyens d’avancer. Les faux dieux de l’Etat tout-puissant ont demandé l’allégeance à quelques-uns, prétendant tenir tous les pouvoirs. C’est à nous, dans cette génération et au-delà, de montrer au monde ce que des peuples libres et des économies libres peuvent réaliser pour le bien de tous.

Peut-être parce qu’ici, en Pologne, le contrôle centralisé n’est pas lointain souvenir, vous avez apporté une détermination particulière à aller vers une économie libre. Quand l’empire soviétique a expiré, l’économie polonaise était dans un état de crise profonde. Quand les économistes étrangers ont analysé la situation, ils ont évoqué la perspective de la famine dans les grandes villes.

Mais l’essor de ce pays depuis les profondeurs de ces temps obscurs, est un brillant exemple de la prospérité que les perspectives de la liberté économique peuvent apporter. Votre pays est passé d’un monopole d’État sur l’économie, du contrôle des prix, et des restrictions commerciales à une culture de l’esprit d’entreprise, une responsabilité financière, et une insertion dans le commerce international. En conséquence, votre économie a connu une croissance positive dans chacune des vingt dernières années. En ces vingt ans, la taille de votre économie a doublé. Le secteur privé est passé de 15 pour cent de l’économie à 65 pour cent. Et alors que tant d’autres pays sont entrés en récession au cours des années récentes, vous avez résisté à la tempête et continué à prospérer.

Quand les économistes parlent de la Pologne d’aujourd’hui, ce n’est pas des problèmes chroniques qu’ils évoquent, mais comment ce pays, par l’initiative de ses individus, a soulevé la main trop lourde du gouvernement, et est devenu l’économie à la plus forte croissance de toute l’Europe.

Hier, l’un de vos dirigeants a partagé avec moi une vérité économique qui s’est perdue dans une grande partie du monde : « C’est simple. Vous ne devez pas emprunter ce que vous ne pouvez pas rembourser ».

Le monde doit prêter une attention particulière à la transformation de l’économie de la Pologne. Une marche vers la liberté économique et vers la diminution de la taille du gouvernement s’est traduite par une marche vers un niveau de vie plus élevé, une force militaire qui défend la liberté dans le pays et à l’étranger, et un rôle important et croissant sur la scène internationale.

Plutôt que de céder à la fausse promesse d’une économie dominée par le gouvernement, la Pologne a voulu stimuler l’innovation, attirer les investissements, développer le commerce, et vivre selon ses moyens. Votre réussite aujourd’hui est un rappel que les principes de la libre entreprise peuvent propulser une économie vers le haut, et transformer une société.

En une époque de difficulté et le doute dans toute l’Europe, la transformation économique de la Pologne au cours de ces 20 dernières années est un tournant mérité pour votre pays. Dans les années 1980, quand les autres pays doutaient que la tyrannie politique puisse jamais être surmontée, la réponse était : « Regardez la Pologne ».

Et aujourd’hui, quand certains s’interrogent sur le moyen de sortir de la récession économique et de la crise financière, la réponse est encore une fois « Regardez la Pologne ».

Il n’est pas étonnant que des gens qui ont attendu si longtemps la liberté, et qui ont tant souffert, jouissent aujourd’hui pleinement de celle-ci.

La Pologne n’a pas de meilleur ami et allié que les gens des États-Unis.

Vous nous avez aidé à gagner notre indépendance, votre bravoure a inspiré les alliés dans la Seconde Guerre mondiale, vous avez contribué à faire tomber le rideau de fer, et vos soldats ont combattu côte à côte avec les nôtres en Irak et en Afghanistan.

Ils ont combattu et sont morts ensemble.

Nous partageons une cause commune, à l’épreuve du temps, et l’ennemi ne peut nous séparer.

En temps de trouble et en temps de paix, nous avançons ensemble.

Que Dieu vous bénisse, que Dieu bénisse l’Amérique, et que Dieu bénisse la Pologne.

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