Publié par Guy Millière le 14 août 2012
 

Ceux qui douteraient des sympathies islamiques de Barack Obama devraient prêter attention au repas de rupture du jeune de ramadan qu’il a organisé à la Maison Blanche vendredi soir dernier.

Etaient invités tous les ambassadeurs des pays membres de l’Organisation de la Conférence Islamique à Washington, sans exception, les deux membres musulmans du Congrès, Andre Carson (je ne connais pas son prénom musulman, pris depuis sa conversion) et Keith Ellison, tous les membres musulmans de l’administration Obama (et il y en a un nombre certain, à commencer par Dalia Mogahed, « responsable du dialogue religieux auprès d’Obama, adepte fervente de la charia, artisane du rapprochement entre le Département d’Etat américain et les Frères Musulmans, et Huma Abeidin, première assistante d’Hillary Clinton au même département d’Etat, ancienne de l’Institute of Muslim Minority Affairs, organisation elle-même liée aux Frères Musulmans et codirigée par elle et Abdullah Omar Nasseef, ancien président de la Muslim World League, fondateur du Rabita Trust, dissous après qu’il ait été découvert par la justice américaine qu’il finançait le terrorisme djihadiste).

Lors de ce dîner, Barack Obama a réitéré ses propos sur les immenses apports de l’islam aux Etats-Unis depuis leur fondation et a tenu à souligner que Thomas Jefferson lisait le « Saint Coran », et avait organisé le premier dîner de rupture du jeune à la Maison Blanche, voici plus de deux cent ans. Obama reconstruit l’histoire, et il ment sur Thomas Jefferson, qui avait convoqué l’ambassadeur de Tripoli, Rahman Adja, à la délégation américaine des Etats-Unis tout juste nés à Londres, aux fins de lui demander des explications sur les actes de pirateries venus des côtes algériennes, et qui aboutissaient à la mise à sac de navires commerciaux américains, lui avait offert à dîner (sans que ce soit un repas de rupture de jeune) et s’était vu remettre par lui un Coran qui, selon l’ambassadeur, lui permettrait de comprendre pourquoi des musulmans pensent légitime de pratiquer la rapine contre des bateaux non musulmans. Obama n’a pas dit que Thomas Jefferson était un admirateur de l’islam ou s’était converti, mais il n’en était pas très loin.

Je sais qu’Obama a été musulman pratiquant jusqu’à l’âge de vingt ans, ce qui ne l’empêchait pas de toucher à de multiples drogues), mais tout de même : il n’y a rien d’étonnant à ce qu’Obama voie en Recep Tayyip Erdogan son princpal partenaire et homme de confiance au Proche-Orient et pose un regard sympathique sur Mohamed Morsi, bientôt en visite officielle à la Maison Blanche où il expliquera à Obama que la purge qu’il est en train d’organiser dans l’armée égyptienne en usant du prétexte de l’attaque terroriste menée voici peu contre Israël dans le Sinai permet de faire avancer la « démocratie » islamique en Egypte.

Ceux qui comprendront les sympathies islamistes d’Obama comprendront son action, et je l’ai déjà expliquée ici (j’y reviens en détail dans mon prochain livre, Le désastre Obama) : jamais depuis leur fondation, les Frères musulmans n’avaient accédé au pouvoir politique, et ils ont maintenant le pouvoir au Maroc, même si le roi est toujours là, en Tunisie, en Libye (moyennant quelques subterfuges qui trompent les idiots inutiles), en Egypte (où Morsi avance effectivement ses pions), au Yemen, en Turquie (où l’AKP a des positions très proches de celles des Frères musulmans et joue le rôle de parti « ami »).

Après avoir longuement hésité, Barack Obama semble pencher du côté des Frères musulmans en Syrie aussi, sans s’impliquer dans une guerre civile qu’il a laissé monter en puissance : ce qui ne signifie pas une fin du conflit rapide pour autant (je l’ai déjà écrit). Outre les Frères musulmans, jamais des factions plus radicales encore, al Qaida en particulier, n’ont connu une telle influence (j’explique dans mon prochain livre pourquoi éliminer Ben Laden n’était pas une opération anti al Qaida), puisqu’elles sont au cœur du soulèvement sunnite syrien, disposent de bases arrière au Yemen, en Somalie, au Pakistan, en Afghanistan (le gouvernement afghan « ami » des Etats Unis est d’ailleurs en train de pencher vers des positions pas très amicales envers l’Occident), en Libye, et dans la jeune république islamique de l’Azawad au Nord du Mali, utilisant pour tout cela les armes venues des arsenaux de Kadhafi grâce à la géniale intervention libératrice dont BHL fut le prophète.

 Ceux qui comprendront les sympathies islamistes d’Obama comprendront qu’il a choisi une forme d’équilibre entre d’une part Al Qaida et les Frères musulmans, et d’autre part l’Iran, quitte à fâcher les dirigeants saoudiens. Comme nous l’expliquons, Daniel Pipes et moi dans Face à l’islam radical, l’Arabie Saoudite est fondamentaliste et propage un islam fondamentaliste, mais elle n’est pas un pays djihadiste et se défie des Frères musulmans, et plus encore d’Al Qaida.

Ceux qui comprendront pourront comprendre qu’Obama entend à la rigueur endiguer l’Iran, mais eu aucun cas le frapper ou faire tomber le régime que dirige l’ayatollah Khamenei. Obama, depuis près de quatre ans, a évité toute mesure de sanction efficace contre le régime iranien. Il faudrait qu’il soit dans une position absolument désespérée électoralement pour envisager de frapper l’Iran, et même en ce cas, je doute qu’il le ferait. Il entend, je l’ai déjà écrit, laisser l’Iran aller aux portes du nucléaire, pour passer à l’étape suivante (demande de dénucléarisation régionale).

Ceux qui comprendront pourront comprendre que lorsqu’Obama embrasse des dirigeants israéliens, il s’agit d’un « baiser de la mort » digne de la mafia, destiné à tromper les riches juifs américains à même de le financer et à satisfaire les imbéciles de gauche (pléonasme) façon Alan Dershowitz (qui appelle à voter pour Obama en novembre) : Israël, si Obama est réélu, aura intérêt à compter sur un Congrès moins hostile qu’Obama et sur de nouveaux alliés, tels l’Inde.

Cela renvoie à la question posée au gouvernement israélien face à la nucléarisation de l’Iran.

Je ne sais si le gouvernement israélien entend frapper ou non, et si je le savais je ne le dirais pas. J’écrirai juste que c’est un choix très difficile à faire : il reste peu de temps avant qu’il ne soit trop tard et qu’Israël doive vivre avec le nucléaire iranien, mais on peut raisonnablement se demander si Israël peut vivre avec le nucléaire iranien.

Un Iran sanctuarisé n’attaquerait pas Israël, je l’ai dit, mais compter sur la rationalité de Khamenei (le vrai décideur) est compter sur quelque chose qui n’existe pas vraiment : Khamenei n’est pas un acteur pleinement rationnel : un article de Reuel Marc Gerecht dans le dernier numéro du Weekly Standard, The Most Dangerous Man in the World donne les détails.

Netanyahou n’ignore pas les sombres projets d’Obama (dénucléarisation régionale, volonté de reconnaissance d’un « Etat palestinien » dans les « frontières de 1967 »).

Une frappe israélienne contre l’Iran déboucherait sans doute sur une guerre plus vaste, et obligerait inéluctablement les Etats-Unis à s’impliquer. J’ai écrit qu’une fenêtre d’opportunité existait avant le 6 novembre, puisqu’Obama ne peut pas lâcher Israël avant l’élection, mais je pense utile de nuancer mon propos : une frappe avant le 6 novembre pourrait aussi renforcer les chances de réélection d’Obama. Les multiples émissaires envoyés par Obama en Israël pour demander au gouvernement israélien d’attendre et de ne rien faire pour le moment ont transmis un message d’hostilité à toute frappe, mais si des frappes avaient lieu quand même, Obama pourrait se déclarer au côté d’Israël, provisoirement, et compter sur le fait que l’électorat américain, quand le pays est en guerre, ne change pas de « commandant en chef », ce que montre l’histoire électorale.

Alors, une frappe juste après le 6 novembre ? Une autre issue ? Je l’ai noté : l’Iran soutiendra Assad jusqu’au bout, et les effets du conflit syrien commencent à peine à se faire sentir, ils pourraient fragiliser l’Iran et entraîner de multiples effets secondaires.

Un dernier point : la presse de gauche israélienne ces derniers jours a fait preuve d’une très grave irresponsabilité, et démontré que la gauche israélienne pouvait frôler la haute trahison. Des journaux comme Haaretz ont donné des dates possibles de frappe israélienne contre l’Iran, ce qui équivaut à tout faire pour déjouer une action israélienne et à donner des informations à l’Iran. Outre les dates de frappe, ces journaux ont prétendu dévoiler des éléments de stratégie israélienne concernant d’éventuelles frappes : cela frôle la haute trahison. Dans le passé, lorsqu’Israël a été confronté au danger et à des décisions délicates, un front uni se faisait face au danger. La gauche israélienne a perdu quasiment toute possibilité de gagner des élections en ayant défendu des politique qui se sont révélées délétères, et si elle devait passer de la crispation sur des positions délétères à des comportements allant dans la direction que je viens de décrire, je pense qu’elle en porterait une marque d’infamie pour longtemps. La marque d’infamie m’a semblé se dessiner ces derniers jours.

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© Guy Millière pour www.Dreuz.info

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