« Jésus quitta la région de Tyr ; passant par Sidon, il prit la direction du lac de Galilée et pénétra en territoire de la Décapole.
Là, on lui présente un homme, sourd et muet. On le prie de lui donner la bénédiction de D.ieu par l’imposition des mains.
Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule. Il lui posa les doigts sur les oreilles, et de sa salive, il lui toucha la langue.
Ensuite, les yeux levés vers le ciel, Jésus exprima son souffle en lui disant : effata ! c’est-à-dire ouvre-toi !
Ses oreilles s’ouvrirent, sa langue se délia. L’homme pouvait s’exprimer et communiquer ».
EFFATA !
Etonnant, ce petit mot-clé araméen, venu de la langue de Jésus et conservé à travers les siècles, comme le témoignage souvenir d’un événement. Effata signifie : ouvre-toi, mais évidemment, cela n’a rien à voir avec le code magique des Mille et une nuits, Sesame, ouvre-toi !
Cet homme qui n’entend rien et ne peut s’exprimer reçoit la guérison dans la rencontre avec le rabbi Jésus. Dans le récit évangélique, on comprend que ce n’est pas qu’un individu, et qu’il représente l’être humain livré à lui-même dans un contexte indifférent ou hostile aux valeurs spirituelles.
Récemment, certains sociologues et spécialistes du langage se désolaient de constater l’appauvrissement du vocabulaire dans certains milieux de jeunes. Ceux-ci disposent en effet d’un nombre de plus en plus réduit de mots et d’expressions dans leurs échanges quotidiens habituels, et le problème ne semble pas seulement culturel, il est sans doute aussi spirituel : manque d’idéal, manque de convictions, de vision d’avenir, manque d’espérance, influences de régressions diverses.
EFFATA, ouvre-toi, ce n’est donc pas seulement cette formule baptismale symbole d’ouverture à une Parole qui vient de Dieu, c’est aussi un message qui rejoint l’actualité.
Il y a là l’urgence d’une ouverture intérieure des consciences à une formulation de destinée humaine, à un projet personnel et communautaire de vie fondé sur les valeurs basiques des commandements et qui concernerait tous ceux et celles n’ayant pas perçu l’appel de D.ieu à vivre aux dimensions de l’amour, ce qui explique qu’ils aient tant de peine à exprimer autre chose que des sons vides de sens.
Le sourd-muet de l’évangile illustre en fait l’état déficient de l’être humain livré à lui-même, une situation critique qui correspond tout à fait à ce que Jésus pouvait voir autour de lui, mais aussi à ce que nous constatons aujourd’hui autour de nous, et parfois, en nous.
Jésus, souvent saisi de compassion devant des foules errantes comme des brebis sans berger… Combien de personnes manquent visiblement d’inspiration dans leur existence ! Aucun souffle ne les anime, c’est la routine, le conformisme. Aucune motivation qui les pousserait en avant, donc pas de vraie communication avec leurs proches ou avec leurs voisins.
Dans certaines familles, et dans certains milieux, il est reconnu que les échanges sont superficiels : on a vraiment rien à se dire, à part quelques phrases convenues et formelles…Un vide sidéral et sidérant !
Il est vrai qu’avec la culture qui nous environne de plus en plus, on se demande en voyant certains émissions de télé ou certaines publications : à quoi bon toutes ces futilités ? L’appauvrissement de l’horizon culturel, l’absence de grandes passions en dehors de la violence, l’abrutissement par la marchandisation des produits culturels, un vrai problème.
Rien de significatif donc, qui puisse apporter une quelconque valeur à l’existence humaine, ou qui puisse encourager l’envie de vivre au vrai sens du mot…
C’est bien face à ce même manque profond et mortifère que l’évangile présente Jésus et son enseignement de vie. Et voici qu’il dit à un homme en état d’autisme : effata, ouvre-toi! (Ou plus exactement, puisque le verbe est au passif: sois ouvert…) Et Jésus effectue de la part de Dieu quelques gestes de guérison, imposition des mains en signe de berakha, envoi du souffle recréateur, gestes qui signifient l’aptitude rendue à cet homme dans sa faculté d’entendre pour pouvoir s’exprimer.
Devant ce miracle, on ne peut s’empêcher de penser au texte d’Isaïe qui annonçait que D.ieu viendrait dans les temps messianiques rendre les hommes sensibles à sa présence en ce monde: alors les oreilles des sourds entendraient et les muets auraient enfin quelque chose à dire…
L’évangile de Marc décrit en même temps l’itinéraire de Jésus : il se trouve en territoire de la Décapole, à l’extérieur d’Israël. Il est dans un pays limitrophe marqué par les coutumes païennes. C’est donc grâce à la rencontre avec le rabbi Jésus porteur de sa tradition hébraïque qu’un homme jusqu’ici limité dans son entendement et dans son expression va développer ce qui est le plus important pour lui : entendre une Parole de sens et communiquer…
Cet homme – jusqu’ici limité par les croyances du paganisme – accède ainsi à un nouvel état de conscience. Son existence s’ouvre à une dimension, une orientation de vie, une Parole qu’il accueille au fond de lui-même, et qui lui permet de communiquer avec les autres sur l’essentiel.
En guérissant cet homme, Jésus l’a fait rentrer dans le cercle de la vie. Cela correspond à l’attitude permanente de Jésus qui fait tomber les obstacles entre les hommes : nous le voyons se déplacer en Judée, en Galilée, en Samarie, en Phénicie, en Syrie et ici en Décapole, c.a.d. le Liban actuel et la Jordanie. Il y côtoie des croyants et des incroyants, des pratiquants et des non pratiquants. Il est celui qui sait reconnaître en chacun l’étincelle de vérité qui peut changer la vie.
Jésus s’intéresse en effet à tout ce qui rend l’homme plus humain. Fidèle à la tradition d’Israël, il montre évidemment l’importance fondamentale de la relation à D.ieu qui est la base de tout, mais il prend en compte toute la dimension de l’être humain. C’est ce qui le pousse à être proche de celles et ceux qui souffrent dans leur chair ou leur esprit. Jésus éduque ses disciples à ne pas oublier cet aspect concret de la vie. Il précise même: si je leur parle en paraboles, c’est parce qu’ils regardent sans regarder, et écoutent sans entendre et sans comprendre.
Mais vous, mes disciples, heureux vos yeux parce qu’ils voient, vos oreilles parce qu’elles entendent.
L’homme est un tout, il y a l’écoute, le regard, la parole. Alors, l’enseignement de Jésus enraciné dans la tradition d’Israël vient guérir toutes ces fonctions interactives, profondément humaines et spirituelles! Il y a autour de nous tellement d’oreilles bouchées, tellement de bouches cousues, que la Parole de Dieu se heurte souvent à des murs d’incompréhension et de silence.
Les exemples ne manquent pas de personnes essoufflées, à court d’idéal, sans perspectives, vivant au jour le jour, de plus en plus repliées. Venez à moi, vous tous qui peinez, je vous apporterai l’apaisement et la sérénité…
Parce que Dieu est amour, il nous offre à chaque étape de notre vie la possibilité d’être plus proche de lui, et à partir de là, d’être plus proche des autres.
L’Esprit qui murmure en nos cœurs nous dit et nous redit sans cesse: effata! Sois ouvert, ouvre-toi!
Reproduction autorisée et vivement encouragée, avec la mention suivante et le lien ci dessous :
© Abbé Alain René Arbez pour www.Dreuz.info
Lire votre texte ce matin m’apporte un rappel à m’ouvrir moi qui me suis réplié en moi-même depuis trois ans. J’étais révolté contre tout ce qui se passe dans le monde, la montée de l’intégrisme, les politiciens corrompus et cyniques finalement tout ceci est peut-être dans le but de réveiller la torpeur de l’homme d’aujourd’hui qui se goinfre de comfort et de matérialisme et oublie les plans, les desseins de D.ieu?
Quel beau texte et quelle belle explication ! Merci !
Amen !
Le Christ est venu, non pour détruire la Loi, mais pour l’accomplir. Né Juif, en Israël, il s’étend au Monde entier et lui dit : “ouvre-toi” !
tres agreable texte. oui, une fois qu on aura atteint le fonds, il n y aura plus qu a remonter.
Il a dit aussi
” Ne croyez pas que je suis venu vous apporter la paix, mais le glaive.
Que celui qui n’a pas d’épée vende son manteau et se la procure puis il est allé virer les mendiants et commerçants du temple.
Cette phrase de Jésus est couramment citée, avec jubilation, par tous les « experts » en religion qui se pavanent sur les plateaux de télévision, pour expliquer que le Christ et le Christianisme incitent aussi à la violence, et ainsi dédouaner la violence inhérente à l’islam. Ces prétendus experts n’ont pas compris que Jésus s’exprimait le plus souvent à l’aide de paraboles.,
L’épée ou le glaive dont parle Jésus n’est pas l’arme qui tue, mais celle de l’Esprit, qui est la Parole de D.ieu, la Vérité et cette Vérité peut provoquer la division, même au sein même d’un famille, quand elle se heurte à l’ignorance et au mensonge.
Lors de son arrestation, dans le jardin de Gethsémané, Pierre voulut défendre Jésus et ayant une épée, il la tira et frappa un serviteur du sacrificateur et lui coupa l’oreille droite.
Mais Jésus, prenant la parole, lui dit : Arrête-toi, et ayant touché l’oreille de cet homme, il le guérit. – Jésus ne voulait pas être défendu par l’épée, l’arme. Puis Il lui adressa une réprimande : « : Remets ton épée dans le fourreau, car tous ceux qui prendront l’épée, périront par l’épée »
Etrange comme certains adorent ressortir la phrase de Jésus sur l’épée et le glaive,mais oublient comme par enchantement ce passage des Evangiles, dans lequel Jésus réprouve l’utilisation de l’épée, l’arme qui tue.
Quant à l’indignation de Jésus envers les marchands du Temple, elle est justifiée, car comme Il l’enseignait : » N’est-il pas écrit : Ma maison sera appelée une maison de prière pour toutes les nations ? Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs »
La seule personne rencontrée au Temple, dont Jésus chantera les louanges, est une pauvre veuve qui donne là deux piécettes, manifestant que la charité ne consiste pas à donner de son superflu mais de son nécessaire (Lc 21, 1-4).
Pour Jésus, il ne sert à rien à l’homme d’offrir des animaux en sacrifice s’il ne change pas son cœur et ses pensées, d’où sa juste indignation et sa colère devant les marchands du Temple.
Déjà par le passé, les prophètes de l’Ancien testament critiquèrent le système sacrificiel prétendument voulu par Dieu.
Pour Osée: « Oracle du Seigneur: c’est l’amour qui me plaît et non les sacrifices, la connaissance de Dieu plutôt que les holocaustes » (Os 6, 6 ; voir Mt 9, 13).
Du prophète Isaïe : « Écoutez la parole du Seigneur : ( … ) que m’importent vos prières, moi je ne les écoute pas. Vos mains sont pleines de sang, lavez-vous, purifiez-vous ! Otez de ma vue vos actions perverses ! Cessez de faire le mal, apprenez à faire le bien ! » (ls 1, 10-16).
Jérémie n’y va pas non plus par quatre chemins : « Vous vous fiez à des paroles mensongères, à ce qui est vain. Quoi ! Vous volez, vous tuez ! Et ensuite vous vous présentez au Temple et vous dites : ” Nous voilà en sûreté”, pour continuer toutes ces abominations ! À vos yeux, est-ce un repaire de brigands, ce Temple qui porte mon nom ? » (Jer 7, 8-11).
Jésus était juste, tolérant, contre toute violence physique, éprouvait une grande tendresse envers les pauvres, les malades, les parias de la société, mais n’aimait pas l’hypocrisie des riches et des “religieux” qui se présentaient comme saints devant les hommes, mais dont le cœur était sec et aride comme le sable du désert.
Merci monsieur l’Abbé pour votre article.
J’entends bien ici le D.ieu d’Abraham, Isaac et de Jacob. Le D.ieu d’amour. Le D.ieu de la Bible.
@Mardochée
Vous citez “le D.ieu d’Abraham d’Isaac et de Jacob” certes mais pas seulement pourquoi être si restrictif ; le Dieu dont on parle est le Dieu de tous les hommes et pas seulement de quelques-uns même celui des musulmans et autres religions ou philosophie, attention je ne dis pas que c’est le Dieu de l’islam, allah n’a rien à voir avec notre Dieu d’amour. Donc il me semblerait plus normal de de parler de Dieu tout simplement. C’est en disant oui je crois en Dieu mais pas au même que vous que vous créez des conflits. C’est vrai que il y a un certain temps les chrétiens avaient une certaine réticence envers les juifs mais ce temps est bien passé et nous les considérons maintenant comme nos frères aînés dans la Foi.
PS une question me taraude l’esprit depuis que je lis Dreuz pourquoi écrire D.ieu et pas Dieu tout simplement, quelle est la signification de ce point?
Concernant D.ieu avec un point, l’abbé Arbez vous a donné la signification.
Je confirme D.ieu est bien le D.ieu Créateur et donc de tous les hommes.
Dans mes propos je n’associais pas la religion Chrétienne qui valide ce que vous dîtes dans la lettre de Paul aux Romains chap 11: 16 à 24 … Extrait: ” Ce n’est pas toi qui portes la racine c’est la racine qui te porte “…. .( Nouveau Testament donc les écrits ont pratiquement 2000 ans ).
Le fait est que pour moi l’Islam ne rentre pas dans le shéma de la Révélation Biblique ( malgré que de nombreux musulmans que je crois sincères continuent à associer l’islam avec le Judaïsme et la Chrétienté en parlant de la religion du livre ). L’Islam n’est pas de Révélation Divine mais c’est une religion créee de toute pièce par l’homme.
Abbé Arbez,
Je suis surpris que vous, Chrétien, vous écriviez Dieu avec un point après le D ‘D.ieu) ?
le mot D.ieu n’est pas biblique, comme vous savez.
C’est une manière de rappeler l’impossibilité d’enfermer le Très Haut dans des mots humains.
Cette pratique est plutôt juive, mais aussi comprise dans le même esprit chez les judéo-catholiques.
C’est bon Baron….
Il y a de plus en plus de non juifs qui viennent sur dreuz pour etre informés de la désinformation que l’on subit depuis des années quand on est pas juif.
je pense que l’article de l’abbé, va permettre à de nombreux non juifs de regarder autrement ISRAEL, autrement qu’au travers de la désinformation de nos medias.
Nous sommes 500.000 milles à lire “tous” ensemble dreuz, patrick a raison, demain, nous serons 1 million.
Merci à dreuz pour cet espace, et cet echange, ici, au moins on peut parler, de la christianophobie, de du racisme antiblanc aussi, qui sont le fait des arabes et des musulmans.
MERCI à tous!
Françoise,
Tout d’abord, Je ne suis pas Baron, mais je ne le regrette pas. Mon pseudo est une contraction de mon nom de famille, d’origine polonaise et de mon prénom.
Ensuite ma question à l’Abbé Arbez n’avait rien de discriminatoire envers les juifs. Ma mère a recueilli une famille juive dont la mari avait été déporté pendant la dernière guerre.
Alors, c’est bon Françoise …
[[ Parce que Dieu est amour, il nous offre à chaque étape de notre vie la possibilité d’être plus proche de lui, et à partir de là, d’être plus proche des autres.
L’Esprit qui murmure en nos cœurs nous dit et nous redit sans cesse: effata! Sois ouvert, ouvre-toi! ]]
Après cette belle leçon relative à la chose mentale et comportementale, il ne reste plus qu’à recommander à certains adeptes d’une culture religieuso-politique d’obéir à un respect de la même parabole ! ET à certain(e)s politicien(ne)s de méditer sur la profondeur de la chose. Dans les deux cas, ce parait un exercice dépassant les capacités de leurs empreintes mentales et réflexes (in)conscients…
Merci mr l’abbé vous venez de réveiller un sacré coin du cerveau ! Il est certain que on plonge facilement dans le mutisme et la non communication en plus à l’ère de la com ! Même en famille les conversations peuvent très plates et sans intérêt . Il faut se secouer…encore merci..
vous avez raison!
par exemple, sur mon palier il y a un féru d’internet qui discute avec des Chinois de Hong Kong mais qui ne salue pas son voisin de palier…