Publié par Gilles William Goldnadel le 24 septembre 2012

Et aussi, Marine Le Pen qui demande l’interdiction du port du voile et de la kippa en villes, l’article du Nouvel obs consacré “aux néo-fachos” et une “conférence de consensus” lancée par Christiane Taubira.

La semaine qui vient de s’écouler n’aura pas été plus raisonnable que celle qui l’a précédée.

Ce sont donc les caricatures d’un journal satirique à la diffusion médiocre qui auront succédé à la bande annonce d’un navet jamais diffusé, n’ayant évidemment tué ni même blessé personne, si ce n’est moralement, qui auront alimenté le débat de Paris jusqu’à Rawalpindi en passant par la Maison-Blanche. Pendant ce temps, le massacre continuait, mais sans bruit, à Alep et ailleurs.

Difficile d’illustrer davantage l’ineptie de la période.

Quelques observations, puisqu’il le faut bien, sur ces caricatures, ne serait-ce que pour contribuer à empêcher la folle confusion :

Première observation : la liberté d’expression est, Dieu merci si j’ose dire, sacrée en France. Toute atteinte doit être une exception. L’éventuel blasphème, pour choquant qu’il soit, n’en est pas une.

Pour tenter de contourner ce lieu commun juridique, Gilles Kepel, sur France Inter lundi, a tenté de suggérer, contre l’évidence, que les caricatures seraient « racistes » et rappelleraient même la pire époque brune…

Tout en ayant tort, le discours de l’islamologue officiel ne fait que révéler l’inconscient de l’idéologie dominante, tel que je l’interroge depuis trop longtemps. On peut se moquer du Dieu du Couchant, mais pas de celui de sa prétendue victime d’Orient, au risque de porter le label infamant.

Deuxième observation : On a également le droit de critiquer la critique ou la caricature. Dans l’affaire de Charlie hebdo, on peut parfaitement dire sans être taxé d’intolérant, qu’on considère l’initiative inopportune et opportuniste, ou qu’on trouve les impertinents manquer de pertinence.

Et quand, de manière particulièrement écœurante, Charlie hebdo met dans la même brouette de prétendus intouchables, musulmans et juifs, ces derniers sont bien inspirés de dire leur écœurement, d’autant plus que personne ne l’a dit à leur place.

Drôles d’intouchables que ces juifs touchés jusqu’au corps de leurs enfants à Toulouse et qui ne se vengent sur personne, pas plus qu’ils ne descendent dans la rue sans y être autorisés.

En l’espèce, je n’aime pas Charlie Hebdo et il me le rend bien. Il m’a consacré récemment un article encore plus bête que méchant.

Quand des responsables musulmans, aussi responsables précisément que le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur ou mon cher imam Chalgoumi critiquent les caricatures, ils ne sortent pas de leur rôle.

Troisième observation : la vraie défense de la liberté d’expression, ça n’est pas quand ça arrange, mais quand ça dérange. C’est pourquoi, alors même que je n’aime pas Charlie hebdo, je suis prêt à le défendre bec et ongle contre toute atteinte à l’intégrité du journal et plus encore, est-il besoin de le dire, à l’intégrité physique de ses membres pour lesquels j’ai, je le répète, une estime très mesurée.

Quatrième observation : ceux qui défendent aujourd’hui à juste titre la liberté d’expression de Charlie Hebdo, auraient dû le faire avec autant de pugnacité lorsque d’autres idées les dérangeaient plus encore, comme celle d’un Robert Ménard, d’un Richard Millet ou d’un Renaud Camus condamnés à une sorte de mort civile qui ne dit pas son nom, comme l’a encore prononcée le Nouvel Obs cette semaine. Et inversement, ceux qui aujourd’hui  critiquent vertement les caricatures de Charlie, comme je l’ai entendu jeudi sur France Inter, en invoquant, qui le moment, qui le mauvais goût, auraient été plus crédibles en condamnant tout aussi fermement ceux qui plongent l’effigie de Jésus-Christ dans l’urine ou ceux qui nazifient Israël et les juifs.

Jamais peut-être autant qu’aujourd’hui, la gauche, empêtrée dans ses contradictions, n’aura fait un usage aussi sélectif d’une liberté d’expression qu’elle invoquait hier encore outrancièrement.

Cinquième et dernière observation : je ne suis pas particulièrement choqué par le fait que le président du CRIF ait considéré comme inopportunes les caricatures incriminées pour apaiser l’ire musulmane. J’eusse seulement souhaité qu’il réclame l’élémentaire réciprocité, car je n’ai pas encore vu les organes représentatifs musulmans déplorer la grande tradition de caricatures antisémites dans la presse du Caire ou les prédications antijuives enflammées que l’on peut entendre chaque jour sur les télévisions de Doha ou d’ailleurs, dans l’indifférence générale.

J’observe enfin que l’on applaudit les organisations musulmanes françaises, qui, plutôt que d’enflammer les foules, préfèrent s’en remettre sagement à l’arbitrage de la justice d’Etat.

Lorsque la communauté juive française y a eu également recours pour se plaindre du déferlement de l’antisionisme radical ou de la diabolisation d’Israël et des juifs, beaucoup au sein de l’idéologie dominante y ont vu à l’inverse, un désir intolérant de censure.

Difficile de ne pas voir dans cette différence d’appréciation antipodique, une prime à ceux qui commencent par la violence colérique sur ceux qui demeurent calmes et rationnels dans les pires circonstances.

C’est donc dans ce contexte confus et délétère, que Marine Le Pen a cru devoir réclamer, au nom de la laïcité républicaine, l’interdiction du port du voile et de la kippa dans les villes et les faubourgs. Et ici encore, comme pour Charlie hebdo, voici un juif mécréant et en cheveux, contraint, au risque d’être taxé de communautariste par quelques niais, de faire observer que la kippa ne porte atteinte à aucune liberté ou dignité particulières.

De manière plus générale, voici Mme Le Pen, à front (national) renversé, enfourcher une sorte de kémalisme à la française, que même le petit père Combes ou la Ligue des Droits de l’Homme, du temps où elle ne faisait pas de l’œil aux musulmans radicaux, n’auraient pas osé exiger.

Mais Marine Le Pen ne devrait pas oublier qu’Atatürk, pour briser l’obscurantisme, avait eu le courage d’appliquer les principes rigides de la laïcité à la religion majoritaire.

Pour sembler seulement cohérente, elle devra donc bannir soutanes, croix de bois et cornettes à Paimpol comme à Strasbourg. Je ne garantis pas le succès chez ses électeurs naturels.

Le Monde, dans son éditorial de samedi, a, lui aussi, été sévère envers les propositions de la présidente du Front National. Selon le quotidien vespéral, le FN ne peut être un parti de gouvernement.

Voilà qui me permet, hélas, d’illustrer une énième fois la morale à géométrie variable de la pensée dominante, qui n’est que l’exacte négation de la morale universelle.

Retour à la fête de l’Humanité de dimanche dernier, à laquelle je faisais allusion dans mon dernier billet, mais avec davantage de précisions encore.

Voici les déclarations mensongères de Patrick Le Hyaric, directeur de l’Huma, proférées lors de son discours de clôture : «Nous condamnons avec la dernière énergie toute provocation comme celle de cet insupportable film politique d’un intégriste israélien diffusé depuis les Etats-Unis sur Internet, qui constitue un insulte abominable contre une religion -l’Islam- et contre les musulmans.»

Lorsque le patron de l’Humanité, devant une foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes, profère ces accusations, cela fait plus de quatre jours que le monde entier sauf lui sait que l’auteur du film n’est ni juif, ni israélien, mais qu’il s’agit d’un copte égyptien.

Pour faire sans doute bonne mesure, le camarade journaliste, lorsqu’il a prononcé son discours, était aux côtés de Salah Amouri, qui venait de purger une peine de sept ans de prison en Israël pour sa participation à un projet d’attentat contre un rabbin, et à qui il déclara noblement : «Salah, nous sommes fiers de te compter parmi nous.»

Hier, les télévisions ont montré des foules encolérées vitupérer le « film des juifs », tout en brûlant le drapeau de l’Etat éponyme.

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Le PCF, un parti de gouvernement, vraiment ?

Dans un ordre d’idées assez voisin, le Nouvel Observateur a donc consacré un article cette semaine «aux neo-fachos». Sans grande crainte de l’amalgame, il mêle dans une même réprobation des personnalités aussi différentes que Robert Ménard, Richard Millet, Alain Finkielkraut, Elisabeth Lévy ou Ivan Rioufol. Que ceux que j’oublie me pardonnent.

Il fait un sort particulier à Jean Robin, responsable du site « Enquêtes et Débats » ainsi qu’à «Riposte Laïque» tous deux taxés «d’extrême droite».

Je me garderais bien de les situer arbitrairement, en cette période d’étiquetage pour exclure.

Ce que je sais, c’est que très curieusement, il s’agit des deux seuls sites qui, à ma connaissance, ont révélé -en en apportant la preuve sonore et filmée- que les islamistes qui se sont invités samedi dernier devant l’ambassade des Etats-Unis à Paris avaient hurlé à la mort des juifs.

Je ne l’ai vu, je ne l’ai entendu, je ne l’ai lu, nul par ailleurs.

Décidément, l’extrême droite n’est plus ce qu’elle était. L’antiracisme non plus.

Enfin, pour nous changer les idées, un mot sur la «conférence de consensus» organisée par ma ministre de tutelle, Mme Taubira et chargée de plancher sur la récidive pénale. Vérification faite, l’immense majorité des participants sont issus du Syndicat de la magistrature ou de l’Observatoire international des prisons.

On peut, sans grand risque, imaginer leurs conclusions.

Avec le même bel esprit consensuel, j’ai décidé d’organiser une conférence sur le multiculturalisme.

Je m’interdis de participer aux débats. Pourraient intervenir notamment, Ivan Rioufol, Elisabeth Lévy et Robert Ménard. Denis Tillinac est pressenti pour leur porter la contradiction.

Ça me plaît bien le consensus.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Gilles William Goldnadel. L’article original peut être consulté sur le Blognadel

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