Lori Borgman, auteur et journaliste américaine, décrit, dans ce texte que j’ai modifié et traduit, la mort du bon sens. Nous voyons comment cette mort a atteint la France.
Aujourd’hui, nous pleurons le décès d’un vieil ami très cher, le bon sens, qui nous a accompagné pendant de nombreuses années.
Personne ne sait vraiment quel âge il avait, car son acte de naissance a été depuis longtemps perdu dans la paperasserie administrative.
On se souviendra d’avoir cultivé des précieuses leçons telles que : Savoir à quel moment il faut se protéger de la pluie, pourquoi l’oiseau du matin attrape tous les vers, et pourquoi il faut boire un jus amer avec du sucre.
Le bon sens reposait sur des idées simples, des politiques financières saines (ne pas dépenser plus que vous gagnez) et des règles d’éducation prudentes (les adultes dirigent, pas les enfants).
Sa santé a commencé à se détériorer rapidement à la fin des années 60 quand il a été infecté par des virus comme « si ça fait du bien, faites-le », « il est interdit d’interdire », et « profitez aujourd’hui, vous ne savez pas de quoi demain sera fait ».
Les décennies suivantes, il a continué à s’affaisser sous l’affluence de lois et de règlements et un code des impôts oppressant. Sa force fut sabotée quand les 10 commandements commencèrent à devenir un produit de contrebande, et quand les criminels reçurent un meilleur traitement que les victimes.
Sa détérioration s’accéléra quand des garçons de 6 ans furent poursuivis en justice pour harcèlement sexuel parce qu’ils avaient embrassé des filles, un enfant de 10 ans fut renvoyé parce qu’il avait utilisé un rince-bouche après la cantine. Quand des adolescentes furent renvoyées parce qu’elles avaient sur elles des pilules pour calmer les douleurs des règles, cela n’a fait qu’aggraver son état.
Le bon sens perdit encore du terrain lorsque les parents attaquèrent des enseignants qui faisaient le travail de discipline qu’eux-mêmes avaient renoncé à faire auprès de leurs enfants indisciplinés.
Il diminua encore davantage lorsque les écoles exigèrent le consentement des parents pour mettre de la crème solaire ou donner de l’aspirine à un élève, mais qu’en même temps il leur était interdit d’informer les parents s’ils apprenaient qu’une élève est tombée enceinte, où qu’elle voulait se faire avorter.
Le bon sens perdit sa volonté de vivre quand les églises devinrent politisées.
Et il prit un gros coup lorsqu’il fut décidé que vous ne pouvez pas vous défendre contre un voleur dans votre propre maison, et que le voleur peut vous poursuivre pour agression.
Le bon sens a finalement abandonné toute volonté de vivre, quand une femme n’a pas réalisé qu’une tasse de café était chaude, qu’elle en a renversé sur ses genoux, s’est brûlée, et qu’elle a obtenu du restaurant une grosse somme en réparation de son préjudice.
Le bon sens est mort, mais ses parents, la vérité et la confiance, étaient morts avant lui.
Sa famille ne survécut pas non plus :
- Sa femme, la discrétion
- Sa fille, la responsabilité
- Son fils, la raison ; tous furent emportés.
Il a été remplacé par ses demi-frères :
- Je connais mes droits
- J’ai le droit
- Je veux tout et maintenant
- Je suis une victime
- Payez-moi à ne rien faire.
Peu de gens ont assisté à ses funérailles, car très peu se sont aperçu de sa disparition.
Si vous vous souvenez encore de lui, transmettez ce message. Si non, faites comme tout le monde : ne faites rien.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour www.Dreuz.info pour la version française, et loriborgman.com pour le texte original.
Le bon sens ? Mais c’est une bataille au quotidien pour le faire reconnaître et l’utiliser sans se faire moquer.
Nous sommes sous le règne du fric et du « je veux tout, tout de suite et sans rien donner en contre partie ». Alors au risque de passer pour rétrograde, j’essaie d’utiliser le bon sens que m’ont légué mes deux grand-mères et une de mes arrière-grand-mère (qui m’a en partie élevée). Et j’essaie aussi de le développer chez mes petits-enfants !
Il y a confusion sur le « sens » de bon sens!
Savoir quand il faut moissonner ou retirer la poële du feu avant que le frichti ne brûle, ça n’est pas du bon sens; c’est du sens pratique, issu de l’expérience, de l’observation, de l’apprentissage.
Le « bon sens » cartésien, cette du monde la plus mal partagée, c’est tout le contraire du « sens » qu’on lui attribue.
La majorité, celle qui se contente de croyances et d’idées reçues croit que le bon sens** c’est précisément le partage d’idées toutes faites, nécessairement majoritaires puisque les ignorants sont de loin les plus nombreux.
Le bon sens défini par René Descartes, c’est « l’aptitude à bien juger, à distinguer le vrai d’avec le faux, qui est proprement ce qu’on appelle la raison » .
Qui peut oser prétendre que le rationnel et la raison sont les choses du monde les mieux « partagées » dans ce monde où l’obscurantisme militant gagne chaque jour du terrain sur la science et la raison?
** Poids des médias et « sagesse des foules »!
Il y a quelques années un sociologue américain avait établi une statistique sur ce « bon sens » dévoyé.
Il avait interrogé quantité de gens rassemblésdans diverses manifestations. A toutes les questions posées, il obtenait des réponses majoritairement dans la norme et il avait nommé ce résultat statistique la « sagesse des foules »!
Faute de « penser », la pensée dominante devient la pensée unique. C’est ça, le « bon sens » populaire!
Comme le disait Sénèque: La preuve du pire, c’est la foule.
Qui ? Comment ? Pourquoi ?
N’est-ce pas 3 questions de bon sens ?
Trois questions simples pour tenter de répondre aux raisons qui ont fait que le bon sens, apanage des anciennes classes dirigeantes, ait disparut de notre horizon….
J’ai bien peur que les réponses soient bien plus compliquées à developper clairement que les questions, même si l’on peut tout de même imaginer, que comme les pantins, le monde est actionné par des ficelles dont certaines sont plus grosses que d’autres…
Si le bon sens n’est pas autre chose que la raison est-il concevable que la raison puisse être instinctive ? D’autre part la Science est-elle devenue folle a-t-elle perdue la raison ?..
« cette chose du monde la plus mal partagée »
Son frère, la « décence ordinaire »(la « Common decency » chère à Orwell), peut être également classé dans la catégorie: « en voie de disparition ».
Vous souvenez vous dans les années 80 le parti « Union des Français de Bon sens » de Gérard Furnon ?
Et ce sont encore et toujours ceux qui ont « un gros bon sens » qui se font tasser et ridiculiser… très dangereux.
Pour moi, le bon sens ou common sense, est lié à la coutume, cette chose étrange qui disparaît sous les lois sous prétexte de tout codifier.
Le bon sens serait un concept un peu flou qui relèverait plus du juste milieu (mediocritas) que d’une formalisation absolue.
Quand j’entends bon sens, je pense à des phrases de mon enfance, comme par exemple : « que l’on soit riche ou pauvre cela n’empêche pas d’avoir un minimum d’éducation ».
C’est un outil qui fait appel à la raison, comme support généralement à la morale. Il intègre des règles de vie en société dont la pertinence devrait nous épargner leur codification.
Mais tenter de le définir crée surtout de la confusion.
Parce que ce common sense, bien qu’issu en partie de la coutume, tend à rejoindre une certaine uniformisation de comportements.
L’éducation anglaise en est une expression qui a fait ses preuves.
Elle est critiquée comme rétrograde mais fascine en modèle recherché.