Publié par Guy Millière le 28 novembre 2012

Tout se passe au Proche-Orient comme l’administration Obama le souhaite.

Israël a dû arrêter ses opérations contre le Hamas à Gaza, ce qui permet à celui-ci de crier victoire, de se réapprovisionner en armes, et de bénéficier d’une légitimation internationale de plus en plus visible : dans tous les pays occidentaux, il se murmure maintenant que, dès lors que des négociations ont été menées avec le Hamas pour obtenir l’accord d’armistice, d’autres négociations avec le Hamas doivent avoir lieu (il se dit même que des négociations se mènent présentement entre le gouvernement israélien et le Hamas).

Mohammed Morsi, conforté par le rôle clé d’intermédiaire qui lui a été confié par Obama lors des négociations entre les Etats-Unis et le Hamas, et conforté aussi par les aides financières qu’il a reçu en récompense, s’est arrogé les pleins pouvoirs et instaure en Egypte la dictature des Frères musulmans : des manifestations et des émeutes ont lieu, mais il va de soi que manifestants et émeutiers recevront aucun appui et aucun soutien de qui que ce soit.

Erdogan en Turquie reçoit un appui militaire de plus en plus net de la part des Etats-Unis, et des engrenages se mettent en place aux fins d’accentuer la pression sur le régime Assad en Syrie : l’objectif est de dessiner les contours d’une arrivée au pouvoir dans le pays des islamistes sunnites, menés par les Frères musulmans là encore. Ce qui se trouve négocié, avec Morsi et Erdogan, par l’entremise du Qatar est le sauvetage des alaouites et la préservation de la base russe de Tartous.

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Ce qui se trouve négocié aussi, par l’entremise du Qatar, toujours, est la préservation des intérêts iraniens et de ceux du Hezbollah au Liban.

Quand la Syrie aura basculé, il ne restera plus qu’un seul pays modéré sur le flanc Est d’Israël, la Jordanie, mais une entente entre le roi et les Frères musulmans semble être sur l’horizon.

La continuité qui se dessine prend les contours d’une sorte de califat sunnite ressemblant à celui auquel aurait pu rêver Hassan El Banna.

Cette continuité, dès lors que les intérêts iraniens seraient préservés en Syrie, et que les intérêts du Hezbollah seraient préservés au Liban, permettrait, songe-t-on à la Maison Blanche, de surmonter l’hostilité entre shiites et sunnites au nom de la souveraineté de l’islam sur ses terres et d’une victoire de l’islam radical.

Des négociations, directes celles-là, sont menées par Valerie Jarret au nom d’Obama avec des dignitaires iraniens : au Qatar, bien sûr.

Mohammed Morsi s’est déjà rendu à Téhéran. Les dirigeants du Hamas remercient l’Iran pour son aide et le régime iranien félicite le Hamas pour son glorieux combat.

Le régime iranien est ami de la Russie et de la Chine. Mohammed Morsi fait son possible lui-même pour se rapprocher de la Chine.

Cela ne fait pas l’affaire des Etats-Unis, direz-vous, et les positions de l’administration Obama sont étranges. N’avez-vous pas compris qu’Obama veut un monde post-américain et pense qu’un monde post-américain serait un monde meilleur ?

Cela ne fait pas l’affaire d’Israël, direz-vous aussi. Et Israël a concédé une victoire au Hamas, sous pression des Etats-Unis. C’est exact. Et je ne sais ce qui se prépare autour de Netanyahu. J’aimerais le savoir. Et si des négociations ont effectivement lieu entre Israël et le Hamas, je crains qu’elles ne soient un marché de dupes pour Israël.

Le durcissement de l’aile droite du Likoud qui s’est mis en place dans la perspective des élections de janvier me laisse penser que des Israéliens partagent mes craintes et, tout en continuant à penser que Netanyahu fait au mieux avec la situation effroyable du moment, je pense que ce durcissement est une excellente nouvelle.

Ce que je viens de décrire ne fait pas l’affaire de l’Arabie Saoudite ? L’Arabie Saoudite est effectivement sur la défensive présentement et se sent trahie par Obama. Les dirigeants saoudiens craignent une déstabilisation. Ils craignent les Frères musulmans d’une part, l’Iran d’autre part.

Ce que je viens de décrire ne fait pas l’affaire de l’Autorité Palestinienne non plus, ajouterez-vous. Les positions de l’Autorité palestinienne sont affaiblies, effectivement, mais l’administration Obama garde en tête la possibilité d’un rapprochement entre celle-ci et le Hamas. Je dirai que le Hamas pourrait s’accommoder des gens de l’Autorité palestinienne si ceux-ci font acte d’allégeance. Des gestes en direction de l’allégeance se sont faits ces derniers jours, de la part de dirigeants du Fatah, principal composante de l’Autorité palestinienne. Le Hamas soutient la démarche de Mahmoud Abbas parti aux Nations Unies obtenir la position d’Etat associé. Les dirigeants du Hamas ont même dit être prêts à accepter, transitoirement, les « frontières de 1967 ». Exactement les frontières dont veut Mahmoud Abbas, et exactement les « frontières » évoquées plusieurs fois par Obama.

Obama a des réserves sur la démarche de Mahmoud Abbas aux Nations Unies : c’est simplement parce qu’il voudrait être celui qui apporte la paix au Proche-Orient, celui qui fait plier Israël, celui qui fait naître un Etat palestinien dans le cadre d’un nouveau califat.

Ce nouveau califat ne prévoirait pas de place pour Israël ?

Les dirigeants israéliens le savent, tout particulièrement les dirigeants de l’aile droite du Likoud. J’y reviendrai.

Obama le sait. Mais il fera comme s’il ne savait pas. Les électeurs juifs américains votent pour lui.

Les dirigeants européens le savent. Ils feront eux aussi comme s’ils ne savaient pas. Pour eux, l’électorat juif est quantité négligeable, même s’ils ne veulent pas adopter ouvertement un attitude salissante. L’électorat musulman, lui, est une force qui monte.

Et puis, croyez-vous que le Qatar se contente de tirer les ficelles au Proche-Orient ?

Vous me pensez pessimiste ? Il y a des gens qui me pensaient pessimiste au début de 2009, quand Obama est arrivé au pouvoir.

Tout ou presque s’est passé au Proche-Orient depuis 2009 comme l’administration Obama l’a souhaité, jusqu’à présent, et mes descriptions du début de 2009 se sont avérées pertinentes.

Seul Binyamin Netanyahu est parvenu à déjouer les projets d’Obama : jusqu’à présent.

Et à présent, je suis inquiet.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière pour www.Dreuz.info

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