Publié par Ftouh Souhail le 27 décembre 2012

aydin

Aydin Matlabi, un jeune photographe iranien, vient de présenter sa première exposition de photographies dans le musée des Beaux-arts de Montréal (MBAM) intitulée « Paysage, Révolution, Peuple. »

Installée au Centre des arts graphiques du MBAM jusqu’au 17 mars 2013 et composée de 33 photos, celle-ci retrace la quête identitaire de l’artiste né à Téhéran et élevé à Montréal.

Le photographe a rapporté des photos spontanées d’une société stéréotypée par la Révolution islamique depuis 1979, en montrant ses individus, ses paysages et ses scènes de rues.

Sous le joug d’une lourde dictature religieuse des mollahs

La société iranienne, qui est en quête d’une nouvelle voie, vit sous le joug d’une lourde dictature religieuse des mollahs et du clan politique de Khomeiny, le fondateur de ce régime autoritaire et théocratique.

En 2009, la réélection douteuse du président iranien Mahmoud Ahmadinejad avait provoqué un soulèvement populaire, baptisé le «mouvement vert». Le 25 Khordad (en référence au 15 juin 2009) des millions de personnes avaient manifesté pour protester contre le maintien au pouvoir du président Mahmoud Ahmadinejad.

À mort le coup d’État ! »

A Téhéran et dans d’autres villes, les slogans éclataient : « À mort le coup d’État ! » contre la tyrannie du pouvoir et son assujettissement aux barbus, fervents défenseurs du président réélu.

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Durant ce soulèvement populaire (qui a inspiré deux ans plus tard les révolutions tunisiennes et égyptiennes) qui avait connu une répression sévère et un durcissement du régime, les jeunes sont allés plus loin en exigeant l’annulation du vote, la démission d’Ahmadinejad, mais aussi ils avaient réclamé la fin du sacro-saint principe du « velayat-e faghi » – la souveraineté du guide suprême – qui accorde les quasi-pleins pouvoirs à celui-ci.

En effet, des millions d’Iraniens avaient osé descendre dans la rue pour dénoncer la fraude électorale massive qui a marqué le scrutin du 12 juin 2009. Plus de 5 000 personnes ont été arrêtées, torturées, d’autres blessées ou tuées. Parmi elles, figurent certains ténors du camp réformateur : collaborateurs de Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karroubi, anciens ministres, journalistes, universitaires, défenseurs des droits de l’homme. Certains d’entre eux, comme l’ayatollah Montazéri, avaient appelé à trois jours de deuil national en mémoire des manifestants tués.

Le photographe iranien honoré à Montréal, Aydin Matlabi, était parmi les voix de milliers d’habitants de la capitale, de milliers d’habitants de Chiraz (sud-ouest du pays), Mashhad (nord-est), Ispahan (centre), Tabriz (nord-ouest) et de Kermanshah (ouest, frontalier avec l’Irak) qui se sont élevées contre l’Iran de l’ayatollah Khomeyni qui est enfermé, depuis 33 ans, dans une coquille islamique.

Malgré la crainte de la répression, beaucoup avaient lutté avec résolution et acharnement pour faire ne serait-ce qu’un seul pas de plus, pour se rapprocher un peu de la liberté. Dans la capitale, le lieu choisi pour la manifestation se situait entre les lieux symboliques de la place Enghelab (place de la Révolution) et de la place Azadi (place de la Liberté), en plein centre de Téhéran.

Durant les événements de 2009 en Iran, personne n’avait le droit de filmer les manifestations. Les seuls films qui sortaient du pays étaient des vidéos réalisées à l’aide de téléphones portables, avec le risque pour leurs auteurs de se faire frapper ou arrêter par les forces de sécurité.

Aydin Matlabi devient l’un des seuls photographes occidentaux et de la diaspora iranienne à documenter la mobilisation sociale – le Mouvement vert – qui se manifesta dans la foulée de la réélection contestée d’Ahmadinejad.

« J’étais un des seuls photographes extérieurs sur place. Plusieurs photographes ou journalistes se sauvaient de peur de se faire arrêter. Par respect pour les gens, je voulais rester jusqu’à la fin. Mais à un certain moment, les autorités m’ont fait comprendre que je devais sortir du pays le plus vite possible. Si j’étais resté, ça aurait été à mes risques et périls. » a-t-il expliqué en marge de l’ouverture de l’expo photo.

Il ajoute : « à la recherche d’un récit et d’une source d’équilibre dans une société chaotique, j’ai été confronté à la fraude électorale controversée qui a secoué le peuple iranien. J’ai été témoin de violence, d’injustice et de censure des droits de la personne, et en même temps surpris par la force de la mobilisation des masses en quête de liberté… ».

Cette fraude historique de 2009 a révélé, selon le jeune photographe, l’existence de deux Iran ; d’un côté un Iran passéiste prôné par Ahmadinejad, qui se réfugie dans un discours fondamentaliste et belliqueux ; et de l’autre un pays moderne, celui des jeunes qui se reconnaissent dans l’esprit d’un Iran plus démocratique, qui s’ouvre sur le monde.

Aydin Matlabi, a présenté cette cohabitation des deux Iran. D’un côté, raconte t-il « il y a une certaine noirceur et une froideur. De l’autre, il y a la chaleur et la délicatesse des visages, des paysages. La réalité se trouve entre les deux. Partout où j’allais, c’était fascinant de voir comment la noirceur n’arrivait pas à effacer la beauté »

« J’ai voulu retourner en Iran pour comprendre la réalité politique et sociale de mon pays natal, et j’y ai découvert une société marquée par des idéologies très conflictuelles » indique t-il.

Les partisans du Mouvement vert ne s’arrêteront pas avant d’atteindre la liberté, selon lui.

Durant les nombreux voyages de Matlabi dans son pays d’origine – en 2006 et 2009 notamment – il a été interpellé par la beauté des paysages et pense que beaucoup de ses compatriotes ont trouvé refuge dans la splendeur de cette nature, seul espace de liberté. Selon lui, l’Iran semble encore loin d’une seconde révolution… Et pourtant, la grogne est en train de déteindre progressivement sur les provinces, emportant dans sa vague des personnes restées, jusqu’ici, apolitiques. Les partisans du Mouvement vert ne s’arrêteront pas avant d’atteindre la liberté, selon lui.

Matlabi a passé plus de cinq années à mener des recherches, à photographier et à faire la chronique des problèmes sociaux, des conflits et des révolutions du Moyen-Orient. L’an dernier, le Festival Photo de Scotia Bank lui a fait l’honneur d’une exposition vedette. D’autres expositions antérieures méritent d’être mentionnées : Came Like Water, Like Wind I Go à la galerie FOFA de l’Université Concordia, en avril 2011. Le photographe met actuellement la dernière main à un ouvrage qui illustrera sa vision de l’Iran moderne.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Souhail Ftouh pour www.Dreuz.info

La télévision canadienne rapporte cette exposition sur la « Révolution avortée »

http://fr-ca.actualites.yahoo.com/video/iran-la-voix-du-peuple-020000953.html

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