Publié par Guy Millière le 21 mai 2013

GM1

Monsieur,

C’est avec stupeur et colère que j’ai, grâce à l’article publié sur Dreuz vous concernant, découvert le texte de Leila Babès1 sur le « racisme arabophobe ».

Ce texte me met très gravement en cause et contient des affirmations diffamatoires inadmissibles. Il repose sur la calomnie, l’amalgame, la distorsion de mes idées et des valeurs qui sont les miennes. Il porte atteinte à mon honneur et à ma réputation. Je n’aurais pas nécessairement réagi à son sujet s’il ne figurait pas dans le « Dictionnaire historique et critique du racisme » publié sous votre direction et votre responsabilité. Ou bien vous n’avez pas lu ce texte avant qu’il ne soit publié, et en ce cas, vous êtes incompétent. Ou bien vous l’avez lu et avez accepté qu’il soit publié, ce qui est indigne.

Vous êtes bien placé pour savoir qu’un travail universitaire, a fortiori un dictionnaire, doit reposer sur un minimum de rigueur et d’honnêteté intellectuelle. Laisser passer ne serait-ce qu’un seul texte ne répondant pas à ce critère entache ce travail d’une manière préoccupante, et vous pourrez arguer que les centaines de pages du livre sont, par ailleurs, impeccables, ce que j’ignore dès lors que je ne l’ai pas lu : il n’en reste pas moins qu’une page au moins n’aurait jamais du avoir sa place dans le livre.

Je peux d’autant moins vous pardonner d’avoir laissé passer cette page que vous me connaissez et que vous êtes fort bien placé pour savoir que mes idées et mes valeurs ne sont pas celles décrites dans le texte de Leila Babès. Non seulement vous avez accepté ce texte, mais vous l’avez accepté en sachant parfaitement qu’il était très éloigné de la vérité, et la trahissait.

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Je vous pardonne moins encore dès lors que, lorsque vous avez été vous-même attaqué, j’ai pris votre défense, ce que vous savez parfaitement, puisque vous m’en avez personnellement remercié lors d’un salon du livre auquel nous participions : vous avez pour le moins, une façon très curieuse d’exprimer vos remerciements dès que les gens ont le dos tourné. Je ne veux employer le mot de trahison, bien qu’il me passe par la tête.

Je pense que les réponses que vous avez adressées à Dreuz et à d’autres jusqu’à présent, et qui m’ont été communiquées, ne sont pas convaincantes.

Engager à lire le livre en faisant comme si ce qui le frappe d’indignité en au moins une de ses pages n’existait pas est une façon de biaiser que je trouve peu courageuse : comment réagiriez-vous si je publiais un livre collectif dont un des auteurs vous insulterait et si, après que vous ayez réagi, je vous conseillais de lire le reste du livre en évitant de poser vos yeux sur les passages pour vous insultants ?

Prétendre vous situer au dessus des « extrémistes » en plaçant d’un côté Dreuz, web magazine auquel vous avez longtemps collaboré, et de l’autre oumma.com, n’est pas très honorable.

Oumma.com défend des thèses que vous avez longtemps combattues et vous accuse de « sionisme », l’article publié dans Dreuz vous accuse de fluctuer étrangement. En lisant l’entretien que vous avez donné à Marianne et que cite l’article publié dans Dreuz, je constate que vous condamnez l’« antisionisme radical ». Il fut un temps où vous condamniez l’« antisionisme » tout court. Vous me parlerez peut-être de nuances subtiles et userez de circonlocutions alambiquées : ne pensez pas me tromper avec de tels subterfuges. Pas moi.

Je dois constater une série de coïncidences : vous demandez à ne plus apparaître en photo sur Dreuz un mois avant la publication du livre. Au moment de la publication du livre, vous semblez vous rapprocher du « politiquement correct », et vous paraissez songer que personne ne lira le texte de Leila Babès. Quand le texte de Leila Babès est lu quand même, vous traitez Dreuz de site publiant des « extrémistes ». Je ne veux en tirer aucune conclusion.

Je vous demanderai néanmoins ici explicitement et sans détour si oui ou non vous approuvez le contenu du texte de Leila Babès, si vous le trouvez admissible, si vous considérez qu’il correspond à vos critères de rigueur intellectuelle et si vous trouvez qu’il a sa place dans un dictionnaire universitaire. Et s’il vous plait, ne vous réfugiez pas derrière le « pluralisme conscient et assumé » ou la « liberté de traitement » laissée aux rédacteurs d’articles, car je vous renverrai immédiatement au fait que vous affirmez que les textes constitutifs du livre reposent sur des « informations vérifiées » et des « références solides ». Où sont, dans le cas précis qui me concerne, les « informations vérifiées » et les « références solides » ? Où ? J’attends. Et je considérerai une non réponse de votre part comme une réponse. Je considérerai une réponse vague comme une non réponse.

Je vous demanderai aussi très explicitement, cela découle, si vous considérez que je suis un « raciste arabophobe » (et sans doute « islamophobe »), puisque c’est ainsi que je suis désigné dans le livre, et je veux, si vous répondez par l’affirmative, des éléments probants, précis, argumentés, dépourvus de citations tronquées aux fins de leur faire dire le contraire de ce qu’elles disent en réalité. Pour vous aider dans vos réflexions, je pourrai vous renvoyer au livre d’entretien que j’ai réalisé avec Daniel Pipes, et vous signaler que la distinction entre islam modéré et islam radical, que je reprends à mon compte, m’a valu des remarques féroces de contempteurs de l’islam.

Vous comprendrez que je n’aie, en les circonstances présentes, aucune envie de vous transmettre les salutations d’usage.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière pour www.Dreuz.info

PS. J’aurai préféré ignorer le texte de Leila Babès et le dictionnaire que vous publiez pour me consacrer à d’autres activités plus dignes d’attention. Je n’avais, aujourd’hui, plus le choix. Au vu d’un courrier qui m’a été transmis dans lequel vous dites que je ne suis pas « irréprochable », j’y vois un peu plus clair dans vos pensées, et dans votre franchise quand vous avez pu être en face de moi. Je ne doute pas que, puisque vous trouvez par ailleurs que ce que j’écris sur Obama n’est pas « nuancé », vous avez lu l’intégralité des documents que je cite dans mes deux livres sur Obama : un universitaire sérieux ne peut avancer des arguments infondés, j’en suis sûr. Ce qui vous dérange peut-être est que j’appelle un chat un chat, un mensonge un mensonge, un socialiste un socialiste. A la différence de Leila Babès, je n’avance rien qui ne repose sur des éléments vérifiables.

1Arabophobie – Leila Babès (in Dictionnaire historique et critique du racisme) :

[…] Selon un rapport du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP), il existe une alliance entre des extrémistes se disant “sionistes” et des mouvements d’extrême droite, parmi lesquels des militants du Front national, des royalistes et des intégristes catholiques. Il n’est pas exclu cependant que certains de ces sites instrumentalisent l’inquiétude des Juifs pour dresser les communautés les unes contre les autres.

L’arabophobie touche également des milieux cultivés. S’appuyant sur une lecture caricaturale du “choc des civilisations”, Guy Millière, universitaire proche des milieux néo-conservateurs américains et défenseur inconditionnel d’Israël, prône la guerre totale contre les Palestiniens. Prenant comme exemple les émeutes des banlieues, ce théoricien néo-conservateur tend à voir la France, à ses yeux en passe de devenir musulmane, comme un ennemi de la civilisation occidentale. Nombre de clichés racistes se retrouvent dans son discours: xénophobie, haine antimusulmane et amalgames entre maghrébins, délinquants et terroristes. Quant à l’islam, il “n’a, écrit-il, aucunement participé de façon positive à l’histoire et à la culture du pays”. Les Arabes sont vus comme nombreux et violents. On retrouve la même vision raciste chez la journaliste italienne Oriana Fallaci dont l’ouvrage, encore plus virulent, est cité par tous les sites extrémistes.[…]

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