A vouloir traiter le MNLA avec angélisme au lieu de les traiter comme des terroristes, à leur avoir livré le nord du Mali, et surtout Kidal d’où sont parties les révoltes séparatistes et islamistes, à mépriser la réalité – une caractéristique profonde des socialistes, lorsqu’elle ne cadre pas avec leur agenda, RFI et la France ont jeté leurs journalistes dans la gueule du loup.
S’ils avaient tenu compte de ce qui suit, Ghislaine Dupont et Claude Verlon seraient encore vie. Juste un rappel, l’armée française avait refusé de les escorter à Kidal et leur avait dit de ne pas y aller. RFI a passé outre et leur a donné l’ordre de ne pas en tenir compte.
Nous avons été, sauf erreur, le premier média à affirmer que les deux journalistes ont été assassinés la gorge tranchée. Quatre jours plus tard, le New York Times publiait la même information.
Nous avons été, sauf erreur, le premier média à soupçonner le MNLA, et à mettre en doute les déclarations d’Ambéry Ag Rhissa, qui affirmait que l’enlèvement avait eu lieu devant chez lui.
Nous pensons pouvoir affirmer, aujourd’hui, que le MNLA est bien derrière cet assassinat, et que la revendication par Aqmi ne colle pas à la réalité du terrain.
1er constat :
• Bayes Ag Bakabo, le Touareg soupçonné d’avoir planifié l’enlèvement de Ghislaine Dupont et Claude Verlon, les deux journalistes français de RFI tués à Kidal, et propriétaire de la voiture qui a servi au rapt, « a fréquenté assidûment [AQMI] un moment », selon une source malienne, mais il ne les « fréquentait plus ».
• En revanche, Bayes Ag Bakabo appartient à la même tribu qu’Ambéry Ag Rhissa, et ce sont des proches. Les deux journalistes venaient d’interviewer Rhissa. C’est devant son domicile qu’ils ont été enlevés, et il est difficile d’imaginer Bakabo devant chez Rhissa sans qu’il le sache ou connaisse la raison de sa présence.
• Il est encore plus douteux de croire que les hommes de Bakabo, ou Bakabo lui-même, aient donné l’ordre à Rhissa de rentrer à l’intérieur, quand celui-ci, c’est son propre témoignage, est sorti sur le pas de sa porte lorsqu’il a entendu du bruit dehors. Qu’il n’ait pas reconnu Bakabo semble encore plus invraisemblable, dit une source.
• Selon une source militaire africaine à Kidal, « Bayes Ag Bakabo s’est recyclé un moment dans le MNLA après son engagement auprès d’Aqmi ».
• Autant dire que Bakabo est très proche du MNLA et bien plus loin d’AQMI, qui ne sont, cependant, pas très éloignés l’un de l’autre.
• Et même le témoignage de Ag Rhissa est battu en brèche, selon iTélé, qui affirme que les deux journalistes ont été enlevés chez lui, et non pas à l’extérieur de sa maison. Comment expliquer, après cela, que le MNLA n’a rien à voir avec l’assassinat ?
2e constat :
• Au printemps 2012, le MNLA avait annoncé sa fusion avec les terroristes d’Ansar Dine pour créer « l’Etat islamique d’Azawad ». Le 1er novembre 2013, Mali Actu indiquait que Alghabass Ag Intallah et Bilal Ag Acherif travaillent sur la fusion du MNLA, du HCUA* et du MAA, afin de créer une organisation civile unique capable de défendre les intérêts de la population de l’Azawad. Et nous savons maintenant que trois des quatre personnes soupçonnées de l’enlèvement sont membres du HCUA (Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad), lequel n’est rien d’autre que le faux nez d’Ansar Dine, et qu’ils vivaient dans un camp du HCUA à Kidal. Seuls les « experts » du nord Mali ignorent que tous les groupes armés du Nord (MNLA, AQMI, Ansar Dine, MUJAO, HCUA, MAA) sont de près ou de loin, à un moment ou à un autre, affiliés à AQMI.
• D’ailleurs, hier, avant que l’on apprenne l’appartenance des suspects au HCUA, ce dernier a fermement condamné l’assassinat des journalistes, et a « proposé son aide dans la recherche des assassins ». Le MNLA a fait le même communiqué il y a 4 jours.
3e constat :
• L’amateurisme de l’enlèvement ne cadre pas avec Aqmi: l’identification des quatre membres du commando aurait été facilitée par la découverte, dans le 4X4 abandonné, de numéros de téléphone de plusieurs proches. Et si, comme le prétend la revendication par Aqmi, il s’était agi de « punir » la France, les terroristes n’avaient pas besoin d’emmener les journalistes en dehors de la ville pour les abattre. Il semble en fait plus vraisemblable qu’Aqmi ait choisi, par opportunisme ou pour couvrir le MNLA, de revendiquer cette attaque, et de lui donner sa dimension politique. Ce scénario pourrait être renforcé par la rivalité qui oppose Aqmi à la mouvance al-Mourabitoun, née l’été dernier du rapprochement entre Mokhtar Belmokhtar, dissident d’Al-Qaïda, et le Mujao. On pourrait, également, tourner les yeux du coté de l’Algérie…
4e constat :
Fait plus qu’étrange, c’est sur la page Facebook d’un commandant du MNLA qu’a été annoncé l’enlèvement des deux journalistes moins d’une heure après les faits. C’est sur cette même page Facebook qu’il déclarait, bien avant tous les médias : « Ils ons ete execute par les raviseures a 18 kms a l est de kidal. Les 2 journalistes de rfi » puis il ajoutait quelques minutes plus tard : « Ils son mort egorger » alors que l’information n’était encore publiée nulle part…
Ceci ne fera hélas pas revenir les deux journalistes à la vie. Nous pensons, en revanche, que l’établissement de la vérité est un dû à leurs proches.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Hervé Roubaix pour Dreuz.info.
* Pour aller plus loin sur l’HCUA :
- Dimanche 21 Mai 2013, une réunion a eu lieu à Kidal autours de la famille Intallah. L’objectif était de mettre en place les instances du Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad (HCUA), organisation crée en début du mois par Mohamed Ag Intallah. Selon cet ancien membre du CTEA, le HCUA a pour objectif de fédérer l’Azawad autour de lui afin de «faire la paix avec le sud» du Mali.
- Afin de mieux réussir ses objectifs, Mohamed Ag Intallah a fait appel à son père Intallah Ag Attaher, le chef de la tribu (aménokal) Ifoghas.
- Intallah Ag Attaher, ancien soutien du MNLA contre la secte terroriste Ansar Adine, semble changer de position après que la famille Intallah a réussi à chasser le turbulent Iyad Ag Ghaly de la course à la chefferie locale.
- La chefferie locale Ifoghas est réservée à Alghabass Ag Intallah, deuxième fils d’Intallah Ag Attaher. Alghabass Ag Intallah est rentré dans l’histoire de l’histoire de l’Azawad comme le plus grand nomade politique. Au tout début en fin 2011, il rejoint le MNLA. Quelques mois plus tard, au vu du réservoir presqu’alors intarissable d’Iyad Ag Ghaly en dinars, il le rejoint dans la secte Ansar Adine pour devenir son Vice-président. Après avoir assisté à la débandade d’Iyad Ag Ghaly en 2013 suite à l’opération serval, Alghabass Ag Intallah démissionne d’Ansar Adine pour créer son propre mouvement, le MIA (Mouvement Islamique de l’Azawad).
- Afin de continuer l’opération blanchiment, Alghabass Ag Intallah a affirmé ce soir dissoudre le MIA afin de rejoindre intégralement le HCUA et se mettre à la disposition de son père (Intallah Ag Attaher qui devient président) et de son grand-frère (Mohamed Ag Intallah qui devient Secrétaire Général).
- En somme, la famille au complet afin de préserver un intérêt vital. Quel est cet intérêt vital? Sans doute la place de choix de la famille dans la région de Kidal depuis la pénétration française.
- Lors de la pénétration française, la famille Intallah comme le reste de la tribu Ifoghas était dominé par les Imouchaghs de Fihroune Ag Alanessate à qui elle payait des biens pour assurer sa sécurité.
- Après avoir été pratiquement la seule tribu Touareg de l’Azawad qui a soutenu la pénétration française contre le reste du peuple Touareg, la France a accordé une place de choix à la tribu dont elle a fait la plus puissante de la région de Kidal. La région de Kidal qui s’appelait justement l’Adagh fut rebaptisé en «Adagh des Ifoghas» comme récompense à l’aide des Ifoghas.
- Comme Il y a plus de 100 ans, rien n’est à écarter, même des affrontements tribaux entre Touareg, créé et soutenu par le HCUA afin de préserver et de renforcer sa place dans la région de Kidal. Dans le plan qui se trame à Kidal, c’est surtout le Mali qui se frotte les mains car le HCUA lui est dévoué et est surement prêt à tout pour lui plaire.
Article très précis ! Mais je ne comprends pas pourquoi ces deux journalistes ont été tués plutôt qu’échangés contre une rançon (puisque la France, « secrètement », paye les rançons).
Pour compléter l’article de Hervé Roubaix, ce petit complément issu de la plume de l’un des meilleurs historiens de l’Afrique ! …… Il s’appelle Bernard LUGAN ! …… Ne cherchez pas son nom sur vos programmes de télévision ! …… Il n’est jamais invité à « C. dans l’R » ni sur aucun autre plateau où l’on préfère la présence de tonton Pascal Boniface, l’auto proclamé géopoliticien aux analyses qui n’analysent rien :
[ Kidal : morts par imprudence
par Bernard Lugan
Parlons clair : le drame humain qui ne peut laisser insensible ne doit pas faire oublier que Ghislaine Dupont et Claude Verlon sont morts en raison de leur imprudence.
Comme Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier qui, en Afghanistan, n’avaient pas tenu compte des mises en garde de l’armée française, ils furent pareillement prévenus des risques. Ils avaient demandé à la force Serval de les conduire à Kidal et ils avaient essuyé un refus doublement justifié :
1) Parce que les groupes touareg s’y combattaient et que la situation y était totalement anarchique.
2) Parce qu’il n’y avait qu’un effectif français insuffisant pour y garantir la sécurité. En raison de la saignée que subit l’armée française depuis plusieurs années, il avait en effet fallu dégarnir la zone pour pouvoir mener plus au sud l’opération Hydre. Or, la « pacification » du Mali exige d’occuper le terrain, ce que, faute de moyens en hommes et en matériel, nos troupes ont de plus en plus de mal à faire.
Ghislaine Dupont et Claude Verlon ne sont cependant pas partis pour Kidal de leur propre initiative. Ils furent envoyés dans le nord du Mali par la direction de RFI. Comme le Code du travail fixe les obligations du chef d’entreprise à l’égard de ses collaborateurs, ils furent donc nécessairement informés des risques ; d’autant plus que le ministère des Affaires étrangères lui-même avait mis en garde contre un tel voyage.
Au-delà de la tragédie humaine, l’assassinat des deux malheureux journalistes est le révélateur de l’échec malien où la parfaite réussite militaire de l’Opération Serval fut gâchée par le pouvoir politique français. Paris permit en effet à Bamako de « réoccuper » le nord Mali d’où son armée avait été chassée, sans exiger auparavant la mise en œuvre d’une politique fédérale seule susceptible de pacifier le pays. Grands perdants du retour à la situation antérieure, tôt ou tard, en masse ou en petits groupes, seuls ou alliés à Aqmi, les Touareg reprendront donc les hostilités.
Les responsables de ce naufrage sont ces idéologues qui gouvernent la France et qui, prisonniers de leur religion universaliste, refusent de voir qu’il est impossible de faire vivre dans un même Etat artificiel les agriculteurs noirs sédentaires du sud et les nomades berbères ou arabes du nord. D’autant plus que le contentieux les opposant s’inscrit dans la nuit des temps et que la variante africaine de la démocratie qu’ils proposent comme seule solution n’est qu’une ethno-mathématique donnant automatiquement le pouvoir aux plus nombreux, en l’occurrence les sudistes… ]
…… et tout d’un coup, expliqué comme ça, tout devient plus clair !
Que vont faire les journalistes si près du danger ? Nous informer sur ce qui se passe réellement,j’en doute fort !!!!!!
Oui j’ai lu aussi l’analyse intéressante :blush: de Lugan.
cette idéologie qui nous fait envahir notre pays!!!!!!!!!
Egorgés,ou tues par balles ?
Ils ont été égorgés alors que Fabius avait vu 2 tirs de bals pour l’un et 3 pour l’autre ….. Alors ?…….
m enfin toujours responsable mais pas coupable !!! mmmffffff
mrc
c est avec plaisir