Publié par Gilles William Goldnadel le 7 janvier 2014

Goldnadel

Qu’on ne compte pas sur moi pour écrire un énième article assassin sur M. Dieudonné M’bala M’bala. Je ne mange pas de cette quenelle là. Car la recette indigeste, nauséeuse, écœurante de ce plat gonflant et étouffe-juif a été concoctée dans les cuisines de la meilleure société.

D’abord, par un maître queux hors-pair, adepte de la nouvelle cuisine antisémite française dont on ne saurait contester la modernité : un chef idéal : artiste, noir, antisioniste, venu de l’extrême gauche antiraciste et anti lepéniste. On l’a oublié peut-être un peu vite, mais la gauche -Mme Taubira en tête- aura mis beaucoup de temps avant que de le condamner sans appel et sans invocation de la « liberté d’expression » qui n’est sainte et sacrée que lorsque l’on est dans le bon camp.

Je ne suis pas le plus mal placé pour le savoir, puisque lorsqu’il m’a fallu, pour le démasquer, réclamer des comptes judiciaires à l’histrion qui considérait le judaïsme comme la première des escroqueries, la Cour d’appel de Paris crut devoir le relaxer en lui décernant un brevet « d’universalité ». Il fallut attendre que la Cour de Cassation casse cette décision digne d’un mur syndical et magistral. Il faut dire qu’entre-temps notre pitre avait accompli sa révolution copernicienne pour se placer cette fois à l’extrême droite du planisphère politique. Autrement dit, à 1 cm de son point de départ. Ce qui est exactement la distance qui sépare l’impunité de la culpabilité politique et judiciaire.

Un maître saucier talentueux, pas seulement en raison de la dose idoine d’adrénaline que confère sa méchanceté naturelle, mais encore parce qu’il a su se hisser légitimement au sommet des grands empoisonneurs antisémites qu’a donnés le pays des Drumont et Daudet. Un art certes assez facile, assorti à son public, ou le faux courage et la fausse rébellion de révolutionnaires en peau de lapin anti ploutocrates et anti système, concilie les aigris de la droite sinistre et les médiocres de la gauche sinueuse, de Jules Guérin à Jules-Guesde. À cette belle époque d’avant le grand carnage, un antisémite ne risquait rien, ni socialement, ni moralement, ni politiquement, ni judiciairement à se revendiquer comme tel.

Aujourd’hui, le facétieux M. Hitler se dirait philo sémite et pro palestinien.

Mais sans vouloir en rien altérer les mérites du créateur de l’ananas chaud, il me faut faire observer que celui-ci ne serait rien ou pas grand chose sans les gâtes sauce de l’antisionisme et de la haine pathologique d’Israël qui l’ont précédé.

Ainsi, Radio France a pris la décision, de mon point de vue assez salutaire, de saisir la justice française d’une réclamation concernant les propos du précité sur Patrick Cohen et les chambres à gaz. Toujours de mon point de vue, notre radio nationale de service public aurait été moralement plus crédible dans son indignation si elle avait été moins permissive envers l’un de ses appointés par notre redevance, M. Daniel Mermet, qui, je ne me lasserai décidément jamais de le rappeler, aura laissé obsessionnellement ses auditeurs ou ses invités, nazifier pêle-mêle Israël, Sarkozy ou Claude Lanzmann.

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A tout prendre, la quenelle d’un pitre largement déconsidéré qui va mendier sa farine à Téhéran me pèse moins sur l’épigastre, pour peu qu’on cesse d’en faire la réclame, que l’ingurgitation récurrente d’une pâtée antisioniste estampillée « Voix de la France ».

Ainsi encore, comme je l’écrivais dans une précédente chronique, Edwy Plenel, sur France Culture, a cru devoir profiter des obsèques de M. Mandela pour identifier l’État juif à l’Afrique du Sud de l’apartheid. Pour preuve, le responsable de Médiapart, rarement en reste d’une leçon de déontologie journalistique, a sorti une lettre du défunt héros noir accablant Israël… qui s’est révélée être un faux grotesque. M. Plenel s’est donc fendu d’excuses tout en expliquant qu’il avait néanmoins raison.

Dans un ordre d’idées assez voisin, M. Valls a eu raison de reprocher au parti de Mme Le Pen et plus encore de son président d’honneur sa délicate modération et même son inquiétante ambiguïté à l’égard de l’homme de la Main d’or. Mais le ministre de l’intérieur socialiste eût été, lui aussi, plus crédible dans son intransigeance, si il avait condamné symétriquement les menées de ses alliés communistes à Bagnolet qui viennent de faire citoyen d’honneur Ibrahim Abdallah, l’assassin de deux diplomates américain et israélien, qui purge sa peine dans une prison de la république (ma chronique précédente : « l’anticommunisme est un humanisme »).

Pas davantage, Mme Taubira, qui vient de se réveiller de son profond sommeil après avoir été secouée cette semaine par le Canard enchaîné pour son inaction envers le comique quenellier, n’a cru devoir demander à son parquet de poursuivre le maire de Bagnolet pour apologie du crime.

Enfin, il y a quelques mois, la France enterrait en grande pompe un faux rédacteur de la déclaration des droits de l’homme qui, deux ans auparavant, avait déclaré au Frankfurter Allgemeine Zeitung, qu’en comparaison avec l’occupation israélienne, l’occupation nazie avait été inoffensive.

En dépit de cette knödel dont M. Dieudonné régale ordinairement ses chalands, l’homme de la gauche indignée a fait l’objet d’une béatification laïque.

L’enfer antisémite est décidément très proche du paradis antisioniste, et le monstre aujourd’hui abominé a été enfanté par des parents très convenables.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Gilles-William Goldnadel. Publié avec l’aimable autorisation de Valeurs actuelles.

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