Publié par Magali Marc le 5 octobre 2014

Justin Trudeau

Vendredi dernier, Stephen Harper a annoncé que le Canada participera aux frappes aériennes de la coalition en guerre contre l’EIIL, mais n’enverra pas de troupes au sol.

Le premier ministre au eu soin d’expliquer en quoi l’EIIL (Etat islamique) constitue un danger autant pour le Canada que pour les autres pays occidentaux : «L’EIIL … a torturé et décapité des enfants, il a violé des femmes et les a vendues comme esclaves, il a abattu des membres de minorités, fait des prisonniers et capturé d’innocents civils…».

M. Harper ne se fait pas d’illusion sur l’efficacité de ces frappes. Il a bien expliqué qu’elles ne viendront pas à bout des terroristes de l’EIIL mais qu’elles devraient permettre à d’autres sur le terrain de le faire.

Soulignant que le Canada fournit déjà «des abris d’urgence et des soins médicaux d’urgence à des milliers de civils en Irak» M. Harper pensait peut-être répondre aux objections finaudes qu’avait proférées la veille Justin Trudeau, le chef du parti libéral du Canada (PLC).

En effet, jeudi 2 octobre, anticipant l’annonce du premier ministre, Justin Trudeau avait déclaré aux journalistes que le rôle traditionnel du Canada consiste à envoyer des missions de maintien de la paix (comme pendant le génocide rwandais?) et de fournir de l’aide humanitaire. C’est donc là-dessus que les Canadiens devraient faire porter leur soutien et pas sur une intervention militaire.

Autrement dit, il proposait d’envoyer des travailleurs humanitaires, des médecins, des infirmières et des médicaments aux victimes et réfugiés de Syrie et d’Irak. Riche idée quand on voit comment l’EI traite les travailleurs humanitaires comme David Haines ou Alan Henning…

Derrière ce refus de combattre l’EI, on sent la couardise d’un droit-de-l’hommiste qui ne veut pas confronter les terroristes, et l’opportunisme d’un politique qui cherche à plaire aux électeurs gauchistes et pacifistes (aussi froussards que lui).

Mais il y a plus grave.

N’ayant rien trouvé d’intelligent à dire, M. Trudeau s’est permis une raillerie d’un goût douteux. Il s’est gaussé de la virilité du premier ministre Harper en déclarant que ce dernier voulait «… sortir [ses] CF-18 afin de montrer à quel point ils sont gros».

Cet article vous a intéressé ? Inscrivez-vous à notre newsletter pour recevoir les nouveaux articles de Dreuz, une fois par jour en fin d’après-midi.

Cette fine plaisanterie ne trouvera pas vraiment d’écho chez les Québécois qui d’après les sondages, sont au moins 50% à appuyer l’intervention que propose M. Harper. Même le chef du parti libéral du Québec (PLQ), le premier ministre Philippe Couillard, s’est dit d’accord avec M. Harper !

M. Trudeau que les sondages donnent vainqueur lors des prochaines élections fédérales est un homme sympathique, bon père de famille. Il est resté populaire malgré ses gaffes à répétition, telles sa déclaration d’admiration pour la dictature chinoise qui «réussit bien sa gestion économique», ou son empathie pour les terroristes dont on devrait «chercher à comprendre les motivations profondes».

Mais on est de plus en plus obligé d’admettre qu’il n’a pas l’envergure intellectuelle de son père, ni son audace.

Face aux actions terroristes du Front de Libération du Québec (FLQ) dans les années 70, Trudeau père avait proclamé la Loi des mesures de guerre pour mettre un terme à la Crise d’Octobre (enlèvement du diplomate britannique James Richard Cross et enlèvement et assassinat du ministre québécois du travail, Pierre Laporte). Quoi qu’en aient dit certains concernant les abus commis par les policiers qui, d’après les lois spéciales, avaient le droit de procéder à des arrestations préventives, l’attitude énergique de Pierre Elliot Trudeau a permis au Québec d’éviter l’engrenage de la violence. Son attitude ferme s’est révélée décisive pour mettre fin une fois pour toutes aux enlèvements et attentats à la bombe du FLQ, dont certains membres étaient allés s’entraîner en Jordanie avec l’OLP.

D’autres chefs d’État ont fini par l’imiter, comme l’Italie qui attendit néanmoins l’année 1975 pour adopter des lois d’exception permettant des arrestations préventives. Pour mémoire, Aldo Moro fut kidnappé et assassiné en 1978. Et on ne parle pas de la Bande à Baader qui a sévi pendant 20 ans et qui jouissait de l’appui des intellectuels de gauche.

Donnez votre avis, enrichissez le débat, participez aux commentaires, en vous abonnant ici

C’est désopilant de constater que ce sont toujours les intellectuels gauchistes et les milieux étudiants qui soutiennent les terroristes tout en manifestant dans les mouvements «pacifistes».

Mais pour revenir à Justin Trudeau, les commentateurs s’entendent pour dire que pour profiter de son avance dans les sondages, il va devoir montrer qu’il est un remplaçant crédible de M. Harper.

Or il semble croire que ses réflexions naïves sont autant de preuves de sa fraîcheur et de sa spontanéité. Il serait populaire parce qu’il dit ce qui lui passe par la tête et n’utilise pas la langue de bois des politiciens chevronnés. Ses réflexions à ras de terre sont censées refléter le (bas) niveau intellectuel qu’il attribue au bon peuple.

S’il est effectivement la coqueluche des jeunes, il est bon de rappeler que ceux-ci ne vont généralement pas voter en très grand nombre, ce qui pourrait lui causer de mauvaises surprises le soir des élections fédérales d’octobre 2015. On dit qu’un an en politique, c’est une éternité. Peut-être que les Canadiens décideront en fin de compte de laisser Justin Trudeau dans l’opposition pour lui donner le temps de réévaluer sa communication.

En attendant, si d’aventure l’organisation Clowns Sans Frontière décide de se mobiliser pour faire rigoler les enfants irakiens entre deux massacres, nul doute que Justin Trudeau se portera volontaire. Il pourrait faire une blague sur Al Baghdadi qui veut montrer ses grosses mosquées…

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc pour Dreuz.info.

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous