Publié par Alain Leger le 20 décembre 2014

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Le brut de pétrole est passé de 100 dollars le baril à 60 dollars, une baisse de 40% depuis juin dernier, mettant en danger des milliers d’emplois, des projets d’investissements qui se chiffrent en milliards, mais également les cartels et le monopole des islamistes de l’OPEP.

Si le baril de Brent, l’unité de mesure utilisée en Mer du nord, se maintient autour de 60 à 70 dollars, environ 85% des nouveaux projets britanniques d’extraction de gaz et de pétrole en mer du nord risquent d’être abandonnés, selon les experts de Wood Mackenzie, un institut de recherche et d’analyse du marché de l’énergie, du charbon et du métal.

Pour Goldman Sachs, seulement un cinquième des 500 plus grands champs pétrolifères du monde sont rentables si le cours reste à ou en dessous de 60 dollars.

Cela se traduira par l’abandon de 27 milliards de dollars d’investissement programmés, et une menace directe sur l’emploi.

En Grande Bretagne, près d’un demi million de personnes travaillent directement ou indirectement pour l’industrie du pétrole, et de nombreuses plateformes de la Mer du nord risquent de perdre de l’argent, et donc de fermer.

Et le pétrole risque de baisser entre 20 et 50 dollars le baril, comme entre 1986 et 2004.

Mais d’abord, pourquoi les prix ont-ils tant chuté.

La première explication se trouve dans les progrès technologiques et environnementaux qui ont fait baisser la demande à long terme et risquent de transformer les réserves pétrolières en dehors du Moyen-Orient en “stocks dormants”, un peu comme les immenses réserves de charbon que la terre possède et dont personne n’a vraiment un gros besoin.

L’autre explication majeure de la baisse des prix, et probablement la cause principale, est la révolution du pétrole de schiste aux Etats Unis et ailleurs, qui augmente de façon prodigieuse les réserves mondiales, et bloque le retour du monopole de l’OPEP qui fixait arbitrairement les prix.

“La révolution du schiste bitumineux rend potentiellement obsolète environ 1 milliard de dollars de projets d’extraction traditionnelle du pétrole,” explique Michele della Vigna, une analyste de chez Goldman Sachs. “L’industrie doit baisser ses coûts de production de 30% pour que ces projets redeviennent viables au prix actuel du brut.”

Il faut ajouter à cela l’impact de la faiblesse de l’économique dans plusieurs parties du monde – la Chine avait dopé les prix avec le renforcement de sa demande, maintenant calmé par le ralentissement économique américain.

Ensuite, il y a les raisons géopolitiques.

La levée possible des sanctions contre l’Iran et la Russie, la fin de la guerre civile en Syrie et en Irak, mettront sur le marché mondial des réserves de pétrole supplémentaires supérieures à celles de l’Arabie saoudite.

Et la révolution du schiste empêche le cartel de l’OPEC d’imposer de nouveau son monopole sur la fixation des prix, non pas en raison des coûts d’exploitation – l’extraction est relativement coûteuse, mais par sa souplesse : la production peut être interrompue et démarrée très facilement et pour beaucoup moins cher que les exploitations traditionnelles. Cela veut dire que les producteurs de pétrole de schiste se retrouveront en position d’arbitrage sur les marchés globaux à la place de l’Arabie saoudite.

Cela veut dire encore que dans un marché vraiment concurrentiel, les Saoudiens et autres producteurs à bas prix continueront à produire le maximum possible, et la production de pétrole de schiste s’arrêtera lorsque la demande sera faible, et augmentera rapidement quand elle sera forte. La logique du marché faisant le reste, cela signifie que le coût marginal de production du pétrole de schiste aux Etats Unis, soit entre 40 et 50 dollars le baril, devrait dans le futur représenter le prix plafond du marché mondial, et non le prix plancher.

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C’est également la position défendue par de nombreux analystes, qui pensent que le prix actuel, loin d’être une passade, est en train de subir un ajustement durable du marché correspondant à une abondance de ressource de pétrole et une demande faible.

Dans ce contexte, la tentation naturelle de l’OPEC est de rétablir son monopole pour fixer les prix à la hausse entre 50 et 120 dollars le baril.

Pour cela, elle va continuer son travail de lobbying en sous main auprès des écologistes afin de mettre KO autant d’exploitations de pétrole de schiste qu’elle pourra et éviter ainsi que le marché revienne vers une saine concurrence.

Si les prix se maintiennent entre 20 et 50 dollars, c’est que le marché libre aura la main haute, et que les producteurs islamistes auront perdu un peu de terrain. S’il se situe entre 50 et 120 dollars, c’est que l’OPEC aura retrouvé le moyen de dominer le marché.

Avec les liquidités, qui se chiffrent le milliards de dollars, accumulées pendant le boum des prix, les grosses compagnies pétrolières ont les réserves suffisantes pour attendre de voir comment le marché va tourner, et elles peuvent – et ont probablement intérêt – à laisser le marché s’agiter. Car une baisse durable du prix du baril aura un effet dopant sur l’économie…

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Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Alain Leger pour Dreuz.info.

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