Publié par Olivier Fabre le 28 janvier 2015

Michel Onfray
Suite aux attentats de Charlie Hebdo, Michel Onfray, le libre-penseur, pourfendeur de la pensée unique et de l’émotivité médiatique et politique ambiante, exprime sans détours sa courageuse analyse.

Dans un fougueux élan, il dénonce sans peur la politique islamophobe de la France et la responsabilité de Charlie Hebdo dans l’embrasement des pays musulmans.

Cet héritier des philosophes des lumières n’aura pas de mal à revenir sur les concepts de laïcité et de liberté d’expression qu’il dit défendre.

Pour Michel Onfray la politique extérieure française serait islamophobe :

« Dans cette politique internationale française que nous menons depuis une trentaine d’années, nous menons en France une politique islamophobe … on massacre les populations arabes, les populations musulmanes. » (1)

C’est cette politique qui serait responsable des attentats terroristes qui sévissent en France.

« Sous prétexte de lutter contre le terrorisme, la France mène une politique étrangère islamophobe qui crée le terrorisme. On monte les populations musulmanes contre nous, on peut comprendre qu’elles en aient assez. » (1)

Le terrorisme ne serait donc qu’une réaction de légitime défense, somme toute compréhensible par notre penseur.

Il occulte pourtant la politique pro-arabe de la France initiée par De Gaulle, et suivie sans discontinuité par les chefs d’état et l’intelligentsia de France. Le parti-pris pro-palestinien, le soutien à l’invasion syrienne du Liban, la guerre sainte de Dominique De Villepin contre les Américains préparant l’intervention en Irak sont les éléments les plus saillants de cette politique.

Après avoir rendu responsable la France de ces attentats, Michel Onfray va rendre Charlie Hebdo responsable des persécutions des chrétiens dans les pays islamiques. C’est l’occasion pour lui de donner sa vision de la liberté d’expression qui ne devrait pas supporter le blasphème. Pour forcer sa démonstration, il compare le blasphème au viol ou au massacre. En plus d’être malhonnête, pour effectuer cette comparaison, ce libre-penseur se soumet au dogme islamique qui considère le blasphème comme un crime :

« Je suis athée, mais je ne crois pas que le blasphème soit la meilleure façon de lutter contre les religions…Le propre de la liberté, c’est qu’elle n’est pas illimitée. A-t-on la liberté de violer ? De massacrer ? … Charlie Hebdo , c’était la tyrannie de l’enfant-roi : je dessine ce que je veux, comme je veux, quand je veux, avec force scatologie. Mais si votre dessin met le feu à tous les pays musulmans de la planète, si à cause de lui on brûle des chrétiens et leurs églises, faut-il continuer comme si de rien n’était ? Certains dessins et certains propos tuent. La responsabilité n’est pas un vain mot. » (1)

[quote]Cette inversion de la victime et du bourreau est perverse[/quote]

Dans ce passage, il rend responsable Charlie Hebdo de sa propre mort et du massacre des chrétiens des pays musulmans. Cette inversion de la victime et du bourreau est perverse. Elle exonère les fanatiques islamiques pour faire porter la responsabilité exclusive sur Charlie Hebdo. Or si ces fanatiques sont suffisamment méprisables pour tuer des caricaturistes ou massacrer des populations à cause de dessins, c’est à leur turpitude qu’il faut s’en prendre.

Prenant appui sur cette très mauvaise analyse, Michel Onfray propose de nous soumettre au diktat islamique de l’interdit du blasphème pour défendre notre société de liberté face au terrorisme. Par ce choix, il voudrait faire prendre à la France la pente glissante et sans fin de la soumission à l’islam. Pour l’islam, le blasphème n’est pas seulement la représentation de Mahomet le fondateur de l’islam, c’est aussi toute critique à son égard, à l’égard du Coran et de la théologie islamique. Tout ce qui n’est pas conforme au canon musulman est considéré comme du blasphème.

Pour pacifier la société française, notre penseur athée, après son exercice de géopolitique, deviendrait théologien. Il souhaite la formation étatique d’un islam français compatible avec les valeurs républicaines et financé par l’Etat, donc un islam dénaturé dans une France ayant renié sa laïcité car finançant le culte islamique :

« Il faut un islam républicain, en liaison avec l’État : le ministre de l’Intérieur, qui est aussi en charge des cultes, devrait envisager la formation des imams, leur paiement, éventuellement aussi le financement des mosquées par l’État, avec un droit de regard sur les prêches. Chaque fois qu’un imam se ferait remarquer par des propos incompatibles avec la République, le gouvernement réagirait en conséquence. » (1)

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Sans parler du caractère complètement irréaliste de cette nouvelle mission qu’Onfray désire confier à l’État, il y a là aussi un manque de logique.

Michel Onfray voudrait interdire les publications de Charlie Hebdo, car la représentation de Mahomet est un blasphème, mais en voulant conformer l’islam aux valeurs républicaines, il se heurterait aux mêmes réactions violentes de la part de la communauté musulmane. En effet, l’islam se considérant comme parfait ou divin, il n’accepte pas de voir son dogme changé par des non-musulmans. Ce serait aussi un blasphème.

L’incohérence de ces positions montre la fragilité de la réflexion du grand philosophe.

D’ailleurs ce penseur qui se vante d’être dans la réflexion et non dans l’émotivité paraît pourtant prendre position plus par peur des terroristes que par raisonnement.

Il faisait part il y a peu de ses sentiments défaitistes et suicidaires sur sa propre civilisation. Il déclarait :

« L’Europe c’est terminé, l’Occident c’est terminé aussi. » (01:07)

« Moi je pense qu’il n’y a plus rien à faire (01:54)… Ça coule, réjouissons-nous, champagne sur le pont! » (05:21)

Du défaitisme à la collaboration avec l’ennemi, il n’y a qu’un pas qu’Onfray semble avoir franchi : le libre penseur nous propose à peu près de nous conformer à la charte des droits de l’homme en islam où tout est permis ; sauf ce qui est contraire à l’islam…

Pour cet hédoniste se prévalant des lumières, et qui veut continuer de jouir en paix, tous les renoncements sont bons. De la liberté d’expression à la laïcité, en passant par l’abject assassinat de ses compatriotes, toutes les loyautés seront abandonnées sur l’autel de l’hédonisme de l’enfant-roi. Il ne faudrait pas que quelques attentats ou guerre civile menacent de réveiller notre rebelle de son douillet coma de fin de vie.

Avoir peur des terroristes islamiques est bien compréhensible. Réagir à sa peur avec lâcheté, l’est beaucoup moins surtout lorsque, comme Onfray, on se dit philosophe. La mollesse est l’ennemi de la vertu. Socrate, Diogène le cynique et tant d’autres ont cherché l’énergie, le courage et l’honneur qui sont aussi le bien et le beau.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Olivier Fabre pour Dreuz.info.

(1) http://www.lalsace.fr/actualite/2015/01/23/onfray-on-a-casse-la-republique

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