Je n’ignore pas le statut du pape dans la religion catholique, et je comprends la difficulté de mes amis catholiques d’émettre des réserves sur celui-ci. Je respecte le catholicisme, mais je ne suis pas catholique. Je respecte le statut du pape, mais, au nom des valeurs qui sont les miennes, je me considère libre d’émettre des réserves.
Je traite en détail, dans le prochain numéro du mensuel Israël Magazine (israelmagazine.co.il) des relations pour le moins difficiles entre judaïsme et christianisme, et des relations plus difficiles encore entre Israël et l’Eglise. Des pas décisifs semblaient avoir été franchis concernant le judaïsme avec le concile Vatican II, et, concernant Israël, avec la reconnaissance du pays par le Saint Siège en 1994. Des difficultés et des ambiguïtés subsistaient, incarnées par les propos fréquents de Michel Sabbah, patriarche latin de Jérusalem jusqu’en 2008, puis de son successeur, Fouad Twal.
Je ne savais pas ce que seraient les positions du pape François. Je pouvais penser qu’il lèverait les difficultés et ambiguïtés : je dois constater que cela n’a pas été le cas. Le voyage qu’il a effectué au Proche-Orient il y a un an m’avait consterné et mis en colère. J’aurais pu songer que c’était un accident de parcours : j’ai du constater ces derniers jours que ce n’était pas le cas.
Avoir reçu Mahmoud Abbas n’était, c’est le moins que je puisse dire, pas une initiative heureuse. Avoir, trois ans après la reconnaissance d’un « Etat palestinien » réitéré officiellement cette reconnaissance est un geste délétère. Avoir décidé de signer un traité avec cet « Etat » est plus grave encore. Que des hommes politiques sans scrupules se comportent ainsi est une chose, que le dirigeant de l’Eglise, et l’Eglise elle-même adoptent ce comportement est une autre chose.
Ce qui explique à mes yeux reconnaissance et traité est assez simple : le pape François vient d’un continent où la théologie chrétienne a été influencée par une déviation religieuse appelée la théologie de la libération.
Celle-ci est née en 1968 (les détails figurent dans mon article publié dans Israël Magazine), par les thèses d’un prêtre péruvien, Gustavo Gutierrez Merino, que je considère bien davantage comme un marxiste que comme un Chrétien. Elle s’est rapidement disséminée dans toute l’Amérique latine, en même temps que de multiples mouvements terroristes appelés « mouvements de guérilla ». Elle a légitimé la « lutte armée » au nom de la « libération nationale », un « anti-impérialisme » sorti des vieux manuels léninistes et a confondu la compassion chrétienne envers les pauvres avec la lutte des classes.
Gustavo Gutierrez Merino, qui est toujours de ce monde, a été longuement reçu par François voici quelques semaines. Un peu plus tard, François recevait Raul Castro, qui a semblé sortir enchanté de la rencontre. Le 23 mai, François a béatifié Oscar Romero, archevêque de San Salvador, assassiné en 1980, et, de fait, disciple de Gustavo Gutierrez Merino. A l’époque de l’assassinat d’Oscar Romero, des assassinats de prêtres adeptes de la théologie de la libération avaient lieu dans tout le Salvador, qui était en pleine guerre civile. Ces prêtres et Oscar Romero étaient des hommes de courage. Ils méritent d’être honorés et respectés. Ils n’ont, cela dit, pas été assassinés parce qu’ils étaient chrétiens. Oscar Romero après sa mort a figuré dans de multiples graffitis de propagande où figuraient aussi Karl Marx et Ernesto Guevara.
François devrait publier bientôt un texte sur le « changement climatique ».
L’Eglise mériterait mieux à mes yeux que de devenir une organisation redonnant vie à la théologie de la libération, reprenant les thèses délétères de l’écologisme militant, et montrant des penchants pour des gens qui sont plus proches des islamistes assassins de Chrétiens que des Chrétiens assassinés.
Dans un entretien accordé à un journal argentin, La Voz del Pueblo, le pape François dit vouloir qu’on se souvienne de lui comme d’un « brave type ». Je ne veux pas douter que c’est un « brave type ». Mais s’il veut vraiment laisser ce souvenir, il devrait en revenir aux principes éthiques fondamentaux du Christianisme, se souvenir davantage de ce que le Christianisme doit au judaïsme, et redécouvrir que Karl Marx n’est pas chrétien, et que certaines personnes, telles Raul Castro et Mahmoud Abbas, sont des liaisons dangereuses pour le successeur de Saint Pierre.
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Je serais moins affirmatif sur le caractère marxiste de la théologie de Gutierrez. Comparativement à d’autres courants, tel un Camillo Torres, il est différent. Il n’incite pas à la lutte armée, il n’expose pas une théorie binaire sur les exploiteurs et les exploités, mais influencé par l’excellente étude d’Albert Gelin sur les « anawîm » (pauvres de Yahvé) il veut encourager les plus démunis à se prendre en charge sans subir leur destinée.
On peut ajouter que – de la part de François – signer un accord préventif avec le « représentant » des Palestiniens n’est en aucun cas une caution à un régime ou une idéologie. C’est plutôt le signe d’un besoin de se rassurer par des précautions statutaires en raison de risques majeurs…
Avec sa grande expérience de la pauvreté, de la détresse, ce cher pape François est devenu un militant ; en tant que chrétienne et amie d’Israel
je ne digère pas la main tendue à des Castro et Abbas, pauvres de nous !!!