C’est un véritable événement qui n’a pas eu l’impact qu’il mériterait. En 2001, la Commission biblique pontificale publiait un ouvrage innovant qui fait le point sur les relations entre christianisme et Ecritures juives.
[quote]Les chrétiens ont reçu comme livre sacré les Saintes Ecritures juives, et le Nouveau testament est incompréhensible sans référence à cette tradition hébraïque[/quote]
Fruit d’un travail collégial considérable, l’ouvrage porte la signature du cardinal Joseph Ratzinger, futur Benoît XVI. Dans la ligne de Nostra Aetate (cinquantenaire célébré cette année) le document romain rappelle avec autorité ce qui a été longtemps perdu de vue : les chrétiens ont reçu comme livre sacré les Saintes Ecritures juives, et le Nouveau testament est incompréhensible sans référence à cette tradition hébraïque. Alors que circulent encore les clichés marcionites d’un Dieu bon du Nouveau testament opposé à un Dieu vengeur de l’Ancien, il n’est pas inutile de réaffirmer l’unité de la Bible, premier et nouveau testaments, et de relancer le processus de rapprochement et d’estime entre chrétiens et juifs.
[quote]Le nouveau testament a été structuré par des juifs[/quote]
Les diverses parties du document soulignent l’imbrication profonde des thèmes juifs et chrétiens, le nouveau testament ayant été structuré par des juifs et composé à partir de matériaux appartenant clairement à la tradition hébraïque orale et écrite.
L’ouvrage met en lumière le fait que ce qui est devenu le kérygme chrétien n’est pas une croyance autoproclamée, mais s’inscrit dans la dynamique de la révélation biblique antérieure. Certes, lorsque le Nouveau testament affirme que Jésus « accomplit » ce qui l’a précédé, cette notion est complexe et mérite des approfondissements hors de toute polémique. Car la figure de Jésus n’est pas là pour disqualifier les profils de ses prédécesseurs, mais pour ouvrir des voies spirituelles renouvelées à l’intérieur de la tradition. La liberté contestataire et réformatrice de Jésus est une forme de fidélité originale aux grandes thématiques du Premier testament. D’ailleurs de nombreux passages du Nouveau testament trahissent une familiarité indiscutable avec les modes d’expression juives rabbiniques. Les méthodes d’interprétation utilisées par Jésus ressemblent étrangement à celles pratiquées par des figures du Premier testament et on peut dire que le Nouveau testament est une variante des commentateurs juifs de la Bible hébraïque. L’oralité précède toujours les écrits et les fils conducteurs se recoupent.
La fixation des canons juifs et chrétiens des Ecritures a été mise au point par les Tradition juive et chrétienne. Quand les disciples messianiques de Jésus se sont distancés de la synagogue, par étapes, les canons juifs de la Bible n’étaient pas encore définis, et les chrétiens ont reçu du judaïsme le corpus de leurs Ecrits inspirés, pas encore labellisé comme canonique par les rabbins.
On peut constater que chez les juifs comme chez les chrétiens, c’est sur des bases communes qu’Ecriture et Tradition constituent le moteur de l’expression de la foi. Tradition rabbinique et tradition christique se développent alors séparément, mais à partir d’un tronc commun. Les deux religions issues de la même tradition hébraïque produisent des interprétations parallèles spécifiques.
Le document montre combien les thèmes du Premier testament constituent la charpente du Nouveau. Le Nouveau Testament ne disqualifie pas l’élection d’Israël qui est définitive. Paul dans sa lettre aux Romains insiste fortement sur la greffe de l’olivier sauvage sur le bon olivier. Même s’il affirme que l’alliance version renouvelée relativise certains aspects de l’alliance version première, il ne la renie pas en tant qu’axe essentiel, et il donne comme perspective finale le salut de tous, Israël, et nouveaux venus respectant les 10 paroles.
L’Eglise recommande aux chrétiens « une lecture juive de la Bible »
Ce qui est véritablement une posture nouvelle de la part de l’Eglise dans ce document, c’est lorsqu’il est recommandé aux chrétiens « une lecture juive de la Bible ». Car, dit le texte, « les chrétiens ont beaucoup à apprendre de l’exégèse juive pratiquée depuis plus de 2000 ans, et de fait ils ont appris beaucoup au cours de l’histoire ».
Ce qui nous amène à reconsidérer la manière de commenter les textes du Nouveau Testament. Longtemps, la tendance a été d’instrumentaliser les textes du Premier Testament au service du Nouveau, comme un faire-valoir systématique de la personne du Christ. Le document invite à une démarche tout autre : on n’utilise plus la typologie pour faire dire aux textes ce qu’on voulait qu’ils disent, mais on accueille le message des Ecrits. La compréhension rétrospective rejoint les principes du midrash : maassé aboth simane labanîm (Les faits vécus par les pères sont un signe pour les descendants).
De même, si nous suivons la dynamique pédagogique de l’évangile des marcheurs d’Emmaüs, nous constatons que Jésus, rabbi vivant par-delà sa mort, ramène ses disciples vers les Saintes Ecritures d’Israël pour comprendre les événements. Sans ce mouvement de retour, de teshuva, la compréhension du présent demeure impossible. « Commençant par Moïse et parcourant tous les prophètes, il interpréta pour eux dans les Ecritures ce qui le concernait… » (Luc 24.25). Des rabbins ont exprimé le fait qu’en passant d’étape en étape à travers les textes bibliques, on ressent le feu intérieur de la prise de conscience révélatrice. (La Torah, les Prophètes, les Ecrits). Ce feu évoque la révélation au Sinaï, et c’est quelque chose de cet ordre que semblent avoir vécu les marcheurs d’Emmaüs : « notre cœur n’était-il pas brûlant quand il nous interprétait les Ecritures ? » Ce qui correspond bien au bel adage rabbinique qui cite « bereshit bara» la création au commencement, où bereshit est transposé en « berit esh » alliance de feu !
Suivre Jésus, c’est comme lui se référer aux Ecritures du judaïsme pour donner sens révélateur à l’actualité. Lumière et chaleur de la fulgurance d’en haut dans nos réalités terrestres.
Le document «Le peuple juif et ses saintes écritures dans la Bible chrétienne*» invite les chrétiens au « respect pour l’interprétation juive de l’Ancien Testament » selon les mots du cardinal Joseph Ratzinger. Cette conviction explicite l’apport central de Nostra Aetate ainsi réactivé par le document romain de 2001 : « Les deux religions, catholique et juive, se rencontrent dans l’héritage commun de la Sainte Ecriture d’Israël ».
[quote]L’Etat d’Israël est la seule garantie terrestre contre les antisémitismes meurtriers[/quote]
C’est bien cette vision qui anime les rencontres du dialogue judéo-chrétien et qui devrait encourager les catholiques et les juifs à se parler, à partager leurs approches dans le respect des spécificités et des richesses de chaque tradition issue des mêmes origines. Le monde catholique qui applique à la personne historique de Jésus la notion d’ « incarnation » de la Parole de Dieu devrait être capable d’appliquer le même principe à la Terre qui fait partie intégrante de l’alliance. Comme le dit le rabbin Jacquot Grunewald, l’Etat d’Israël est la seule garantie terrestre contre les antisémitismes meurtriers. Les citoyens libres des démocraties comme les membres des chrétientés orientales menacés par le terrorisme islamique doivent le comprendre, puisque comme les juifs ils sont devenus des cibles. Le monde de 2015, fragilisé par les événements tragiques qui le façonnent chaque jour, a besoin de ce souffle vital de la Bible pour s’éloigner des abîmes de la déshumanisation et retrouver un supplément d’âme salvateur. Juifs et chrétiens ont la responsabilité d’en porter ensemble le flambeau !
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez pour Dreuz.info.
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Juifs et chrétiens ont la responsabilité d’en porter ensemble le flambeau !
Tout à fait d’accord avec cette affirmation, mais j’ajouterais également les Justes des Nations, qu’ils soient non Juifs ou non Chrétiens !
Je tiens également à faire remarquer ce que concrètement le Nouveau Testament doit à l’Ancien :
. Le « Je vous salue Marie… » c’est à quelques mots de différence près, le Kaddish
. Les Fêtes Juives et Chrétiennes tombent quasiment au même moment : La Pâque Juive, la Pâque Chrétienne, le Lundi de Pentecôte et Chavouote, Hanouka et Noël…
. Les Chrétiens ont repris des mots Hébreux : AMEN, ALLELOUIA…
. Le Jour de l’An a lieu 8 jours après la Naissance de Jésus, c’est à dire le Jour de sa Circoncision
etc.
Donc effectivement, lire le Nouveau Testament se calque beaucoup sur l’Ancien, tout en ayant sa propre interprétation et lire le Nouveau sans connaître l’Ancien est bien incompréhensible ! Ou tout du moins il peut être compréhensible, mais avec la lecture de l’Ancien, la lecture est plus complète et l’Homme qui le lit se sentira plus Grand !
c’est la prière du Notre Père qui est analogue au Kaddish, pas le je vous salue Marie.
Le notre père s’adresse à Dieu directement, tandis que le kaddish parle de Dieu à la 3ème personne, mais la thématique est semblable.
Erreur Jésus n’est pas né le 25 décembre mais a la fin d’une année juive fin septembre début octobre. Le 25 décembre les brebis en Israël sont dans les bergeries depuis plus de deux mois, pas dans les pâturages au moment de sa naissance.❇
Cher Alain Arbez,
une lecture juive de la Bible ne peut commencer que par une traduction juive de la Bible, cad tout simplement une traduction non basée sur une idéologie de substitution donc qui ne dit pas le contraire de ce que disent nos sages depuis des millénaires et il y a de très très nombreux exemples !
Cela étant, le texte étant saint, cela implique qu’il véhicule l’infini et que l’étude attentive en hébreu biblique – langue originale sainte où la forme écrite (les lettres, leur forme, leur taille, leur absence parfois, leur position dans les mots, leur valeur numérique « guématria » et mille autres choses) véhicule le sens – devient necessaire (Talmud, Zoar, Kaballah, Psaumes entre autres !) pour en extraire quelques étincelles de sens profond.
C’est possible de nos jours maintenant que les Juifs peuvent s’exprimer un peu librement en Israël puisque leur vie n’est plus directement mise en danger …
Il y a, surtout à Jérusalem, des maitres juifs qui ont étudié en profondeur la Bible, les Evangiles et le Coran. Il faut se mettre à leur écoute … Nombreux sont ceux qui diffuse des cours en français sur la toile pour liberer – grâce à leur enseignement clair – l’humanité entière de millénaires de traductions mensongères !
Pour une oreille catholique, par contre, cela risque de faire un tel remue-ménage que la tradition juive ne croit pas du tout que cela puisse se faire un jour – sauf à titre individuel – avant la venue du Mashia’h !
On le voit tous les jours surtout en Israël avec des missionnaires cherchant à convertir des masses de Juifs et par les accusations de propos sataniques visant à empêcher le developpement florissant des communautés Ben-Noah et/ou Ben-Adam dans le monde (hommes et femmes de communautés chrétiennes ou musulmanes se greffant sans avoir pour but une conversion, au tronc spirituel de l’Israël d’aujourd’hui progressant petit à petit sur la route du troisième Temple et des temps messianiques).
Bonjour Mr l’ Abbé , j’ai du utiliser mon petit escabeau pour atteindre sur le dernier rayon un dictionnaire philosophique
qui m’a éclairé sur le » kérigme » et tant que l’on apprend on reste jeune !
Mais je vous rassure mon Nouveau Testament est à portée de main , bien qu’il s’éloigne un peu plus maintenant de ma portée de compréhension avec la nouvelle clef que vous nous présentez …
Je n’ai pas fait » philo » et je suis beaucoup plus enclin à voir la main de Dieu dans le futur voyage sur Mars ou bien dans la Pieta d’Avignon … mais un psaume gravé dans le métal n’a-t-il pas été déposé sur la surface de Lune ?
cordialement !
en effet, vous avez raison: tant qu’on apprend on reste jeune!
d’autant plus que « disciple » veut dire celui (ou celle) qui apprend… on apprend donc tout au long de sa vie.
moi aussi j’apprends tous les jours.
Merci Monsieur l’Abbé pour ce texte éclairant dans vous avez le secret.
Les malentendus qui empoissonnent les relations des membres d’une même famille doivent être dissipés par la Connaissance. Rien d’autre ne sauvera l’humanité des menaces qui pèsent sur elle.
Respectueusement,
Meriamon
DIEU reconnait pour ses fils parmi les hommes, des hommes et femmes de tous pays
« »Je me dois aux Grecs et aux barbares, aux savants et aux ignorants.
Ainsi j’ai un vif désir de vous annoncer aussi l’Évangile, à vous qui êtes à Rome.
Car je n’ai point honte de l’Évangile: c’est une puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec » » (Romain 1: 14 à 16)
L’histoire de la religion, qui remet les hommes de DIEU et toutes les choses et événements à chacun et chaque chose à sa place et selon la volonté de DIEU.
Par contre, tout ce qui a été écrit après JC sur la religion n’est pas recevable.
La majorité de ces écrits sont sans intérêts parce qu’ils ne sont que des porteurs de confusions.