Publié par Guy Millière le 19 septembre 2015

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Guy Millière – Il est une expression que je vois de moins en moins dans les journaux et magazines en Europe : monde libre. Cette expression est toujours employée aux Etats-Unis.

Elle a une signification : elle désigne les pays dans lesquels la liberté d’entreprendre, de parler, de choisir, de voir respectés ses droits de propriété prévaut et se trouve garantie par des institutions reposant sur le droit naturel des êtres humains. Elle n’est plus guère employée en Europe parce que la liberté, sous tous les aspects que je viens d’énoncer, y disparaît. Elle est toujours employée aux Etats-Unis, parce que la liberté, sous tous les aspects que je viens d’énoncer, y survit et reste chère à une large part de la population.

Je songeais à tout cela en regardant le deuxième débat entre candidats républicains à la présidence, diffusé sur CNN mercredi soir.

[quote]Ce à quoi j’assistais ne pourrait pas exister dans la plupart des pays d’Europe[/quote]

Quinze personnes (quatre, plus onze), toutes de qualité, ont été invitées à parler, échanger, énoncer leurs propositions, se confronter les unes aux autres, et en les écoutant, il m’est apparu que ce à quoi j’assistais ne pourrait pas exister dans la plupart des pays d’Europe.

Quel que soit le sujet abordé, et sans qu’aucun candidat ait besoin d’insister sur ce point, il était clair que la liberté, sous tous les aspects que j’énonce ici, était un fondement et un principe directeur, et que ce qui était en jeu était la survie du monde libre. Il était clair aussi, lorsqu’il s’agissait des démocrates, d’Obama, de Hillary Clinton, que le reproche majeur qui leur était adressé était qu’ils ébranlent gravement la liberté, et le monde libre.

Dans un débat tenu en France, comme dans un débat tenu dans d’autres pays d’Europe, il n’y a plus guère de fondement et de principe directeur. Plus personne ou presque ne parle de la liberté sous tous les aspects que j’énonce ici, et du monde libre. Cela explique à mes yeux pourquoi l’Europe va si mal, et si ce n’est pas la seule explication, c’est une explication essentielle.

Cela explique pourquoi je prête une vive attention aux débats aux Etats-Unis.

Je pense que s’il reste de la liberté, et s’il reste, un tant soit peu un monde libre, c’est parce que les Etats-Unis sont ce qu’ils sont.

Je pense que les Républicains ont la responsabilité de défendre la liberté, la survie des Etats-Unis en tant que pays de liberté, et le monde libre. Et je pense que les Républicains ont raison : les démocrates, Obama, Hillary Clinton représentent un danger absolu (que, pour la première fois dans l’histoire du pays, un socialiste, Bernie Sanders, remplisse les salles, et qu’Hillary Clinton, qui tiet un discours de plus en plus à gauche et de plus en plus irresponsable, et que, malgré les crimes et mensonges dont elle est accusée reste à un niveau élevé dans les sondages, est très préoccupant). Je pense, cela dit, que les Républicains n’ont pas été à la hauteur de leur responsabilité ces dernières années.

L’élection de novembre 2016, en ce sens, est une élection d’une importance historique, bien davantage encore que l’élection de novembre 2012.

Le candidat ou la candidate, qui affrontera le candidat ou la candidate démocrate, doit impérativement gagner, et être un candidat à la hauteur de la responsabilité qui, le cas échéant, reposera sur lui.

Sous cet angle, le débat diffusé sur CNN a permis de mettre au jour d’une manière un peu plus nette un certain nombre de points.

Le premier concerne, et c’est important pour être élu, le charisme, la force intérieure, le sens du commandement.

Le second concerne la cohérence et la solidité des convictions, la compréhension aussi de ce qui est en jeu.

Sous le premier angle, il est flagrant que certains candidats n’ont pas la carrure requise : c’est le cas, quelles que soient leurs qualités par alleurs, de plus de la moitié de ceux qui sont en course. C’est le cas, entre autres (et je le cite parce qu’il est en deuxième position dans les sondages) de Ben Carson, un grand médecin et un grand homme, mais pas un homme de l’étoffe d’un Président : débit monocorde, tonalité tiède, propos parfois erratiques. C’est le cas aussi de Jeb Bush (l’establishment républicain a vraiment fait un mauvais choix), et c’est, parmi les plus petits candidats, le cas aussi de John Kasich, de Mike Huckabee, de Rand Paul, de Scott Walker, de George Pataki, de Lindsay Graham.

Je m’attends à ce que Ben Carson baisse dans les sondages. Le seul dans cet ensemble à pouvoir rester beaucoup plus longtemps en course sera Jeb Bush, parce qu’il a l’appui de l’establishment du parti. Plus vite ces candidats sortiront de la course, plus vite il sera possible de passer aux choses sérieuses. Ces candidats ont pu se présenter : la grandeur de la démocratie américaine est que n’importe qui peut se présenter, mais une fois la présentation faite, le temps du jugement et du discernement doit venir. J’ajouterai à la liste Bobby Jindal, qui est un homme de conviction, mais n’a pas réussi à convaincre et en est réduit, pour exister, à cracher son venin de manière ridicule et obsessionnelle sur Donald Trump.

Il reste dans ces conditions : Donald Trump, précisément, puis Marco Rubio, Ted Cruz, Carly Fiorina. J’accorde un strapontin à Christie, mais je pense que sa candidature n’a pas décollé : une accolade donnée à Obama en 2012 lui a sans doute été fatale.

[quote]Les candidats qui restent se répartissent en deux groupes : Donald Trump d’une part, les autres d’autre part.[/quote]

Sous le second angle, certains des candidats qui n’ont pas la carrure requise, ont aussi montré leurs limites : Ben Carson a tenu des propos assez irrresponsables concernant le péril islamiste, et proches de l’isolationnisme qui caractérise Rand Paul, lui, clairement isolationniste (les libertariens n’ont jamais rien compris à l’existence du mal), John Kasich a montré qu’il avait des positions molles et socialisantes, proches de celles que la base républicaine ne supporte plus, Scott Walker a semblé mal assuré, Jeb Bush aussi, quand bien même il a défendu la politique étrangère de son frère. Passons sur les autres. Les candidats qui restent se répartissent en deux groupes : Donald Trump d’une part, les autres d’autre part.

Christie, Rubio, Cruz, Fiorina, montrent une connaissance des dossiers, cohérence, solidité, compréhension. Trump, lui, peut se montrer flou, et imprécis. Il ne semble pas toujours comprendre toute la complexité du Proche-Orient, ou le jeu de Poutine. Il lui faudrait d’urgence s’entouter de conseillers compétents en géopolitique pour remédier à ses lacunes. On pourra me dire que s’il est élu, il s’entourera bien. Le problème est que s’il ne s’entoure pas bien dans les semaines qui viennent, il risque fort de ne pas être élu.

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Dans ces conditions, Christie étant loin derrière, il reste Rubio, Cruz, Fiorina.

Trump peut se rattraper, mais il a montré ses points faibles, et cela peut lui coûter beaucoup.

L’establishment républicain ne l’aime pas, et pensait qu’il pouvait tomber en raison de ses faiblesses. A lui de montrer que l’establishment républicain avait tort. L’establishment républicain voulait se mobiliser contre lui : il serait navrant que l’establishment républicain n’ait pas même à se mobiliser pour parvenir à ses fins. J’ai dit ici que seul Trump pouvait faire tomber Trump : je persiste et je signe. Si Trump tombe, cela viendra de Trump.

Pur l’heure, Trump reste en tête dans les sondages, Carly Fiorina monte fortement, Rubio et Cruz montent un peu.

Rien n’est joué. Je ne doute pas que les semaines à venir seront passionnantes. Je doute que les médias français en parlent.

[quote]Les débats entre Républicains sont incompréhensibles pour ceux, en France, qui seraient chargés de les commenter[/quote]

En France, comme dans d’autres pays d’Europe, il n’y a plus guère de fondement et de principe directeur, non. Les débats entre Républicains sont dès lors incompréhensibles pour ceux, en France et dans d’autres pays d’Europe, qui seraient chargés de les commenter.

J’ai entendu, sur une chaîne de télévision française, tous les candidats républicains définis comme fascistes. George Orwell ne le savait pas en son temps, mais en parlant de la novlangue, il définissait le langage journalistique français et européen au début du vingt-et-unième siècle : la liberté, c’est le fascisme, et, sans doute, que le fascisme est la liberté. A un certain degré de n’importe quoi, je change vite de chaîne.

Je devrais, je sais, faire preuve de compassion : voir arriver en tête des sondages, chez les « fascistes », un homme d’affaires, une femme d’affaires, un grand médecin noir d’origine modeste, et deux fils d’immigrés cubains, eux aussi d’origine modeste, il y a de quoi en perdre ses repères lorsqu’on regarde les choses depuis ce côté de l’Atlantique.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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