Publié par Magali Marc le 27 septembre 2015

Lors du débat des chefs (en français), sur la chaîne publique de Radio Canada, la question du port du niqab lors de l’assermentation à la citoyenneté canadienne mais aussi dans l’espace public a resurgi, et les cinq chefs des principaux partis en ont profité pour répéter leurs positions.

Justin Trudeau

Justin Trudeau est le chef du Parti libéral du Canada, un parti centriste qui a gouverné tantôt à gauche, tantôt à droite. Son père Pierre Eliott Trudeau a été premier ministre du Canada de 1968 à 1979, puis de 1980 à 1984.

Dans cette élection, M. Trudeau-fils prend systématiquement position à gauche pour faire concurrence au NPD qui s’est bien installé depuis 2011 dans des circonscriptions montréalaises multi-ethniques qui avaient l’habitude de voter libéral.

M. Trudeau a réitéré sa position “multiculturelle” lénifiante et conciliante sur le niqab :

«…Monsieur Harper et Monsieur Duceppe veulent jouer sur la peur. Si un homme ne peut pas imposer sa volonté pour comment une femme s’habille (sic). On ne devrait pas avoir un État qui impose à une femme comment ne pas s’habiller …»

Thomas Mulcair

Thomas Mulcair est le chef du Nouveau Parti démocratique, le parti le plus à gauche du Canada appuyé par les syndicalistes.

Fidèle à sa base gauchiste/pacifiste, Mulcair continue de promouvoir sa vision multiculturelle de la société. Sachant bien que les intentions de votes au Québec dans les dernier sondages sont en baisse à cause de cette question, il a commencé par botter en touche et reproché à Stephen Harper de se servir de la question du niqab dans un but électoraliste.

«M. Harper tente de cacher son bilan derrière la question du niqab … Il se cache derrière cette question tellement divisive (sic)»

Puis poussé dans les câbles par Gilles Duceppe, il finit par admettre :

« … Je suis en faveur de la règle existante qui prévoit qu’une femme doit se dévoiler avant de se faire assermenter. C’est évident… Je veux qu’on s’unisse …».

Plus tard il répond à Harper :

«Ce n’est pas en privant ces femmes [qui souhaitent porter le niqab] de leur citoyenneté et de leurs droits que vous allez réussir à les aider.»

Gilles Duceppe

Gilles Duceppe est le chef du Bloc québécois, un parti indépendantiste qui ne présente des candidats qu’au Québec et dont le but est de faire la promotion de l’indépendance du Québec sur la scène fédérale.

Se situant tantôt à gauche, tantôt à droite, au gré ce ce qu’il perçoit comme étant la défense des intérêts du Québec, Gilles Duceppe était sans doute lors du débat celui qui avait le pouls de la population du Québec surtout dans les régions où se cantonne son électorat.

«On parle ici d’une question fondamentale, c’est la question de l’égalité des hommes et des femmes dans notre société. L’Assemblée Nationale est unanime sur ce point … les hommes et les femmes doivent être égaux dans notre société…»

Stephen Harper

Stephen Harper est le premier ministre actuel et le chef du parti conservateur, un parti de droite qui vise à réduire la taille de l’État et de la bureaucratie.
Sa position est claire :

« Quand on souhaite se joindre à la grande famille canadienne, on ne doit pas cacher son identité et c’est pour cette raison qu’on prête serment à visage découvert …. Je ne vais jamais dire à ma jeune fille qu’une femme devrait se couvrir le visage parce qu’elle est une femme.»

Stephen Harper connaît bien le sentiment des Québécois sur cette question. Il sait qu’il joue sur du velours. Effectivement, les derniers sondages montrent une remontée de son parti au Québec où il demeure toutefois troisième dans les intentions de vote derrière les Néo-démocrates et les Libéraux. Mais cela pourrait changer.

Élisabeth May

[quote]Pour Mme May, les droits des femmes sont importants seulement quand il est question des amérindiennes[/quote]

Élisabeth May est la cheffe du Parti vert, un parti écologiste qui à l’instar de tous les partis verts en Europe, campe sur des positions gauchiste/pacifistes/droit-de-l’hommistes.

Malheureusement, la seule femme présente à ce débat des chefs des principaux partis canadiens a jugé bon de laisser deux hommes (Harper et Duceppe) défendre les droits des femmes canadiennes à l’égalité.

Mme May, qui ne comprend rien au Québec et à l’importance de la question identitaire, s’est contentée de remarquer, en interrompant les autres, que la question du niqab n’a rien à voir avec l’économie ou l’emploi et qu’il s’agit d’un faux débat.

Tout comme ses amis de gauche, Mme May prétend que les droits des femmes sont importants seulement quand il est question des droits des femmes amérindiennes.

En bonne gauchiste, ce qui touche à la «religion» islamique, elle s’en tamponne le coquillard (avec une patte de cloporte enfarinée).

En conférence de presse après le débat, M. Duceppe n’en démordait pas :

«Ce n’est pas parce que peu de femmes portent le niqab que cette question n’est pas fondamentale… C’est un droit sacré, c’est fondamental l’égalité homme-femme… Il n’y a pas de division au Québec, 90 % des Québécois et Québécoises sont contre [l’assermentation à visage voilé].»

À l’opposé, le chef libéral Justin Trudeau a une fois de plus accusé le Bloc et le Parti conservateur de tenter de capitaliser sur cet « enjeu de division (sic) ».

« Ce n’est pas ce qui préoccupe les gens. Ce qui préoccupe les gens, ce sont les emplois, l’avenir de leurs enfants », a-t-il affirmé.

Pour sa part, le chef néodémocrate Thomas Mulcair s’est dit persuadé que le niqab ne lui coûtera pas de votes au Québec :

« Je pense que si vous regardez notre situation à travers le Québec, on continue d’aller très bien, a-t-il soutenu. J’ai la confiance des Québécois qui me connaissent depuis très longtemps …»

En fait les analystes des maisons de sondage ne partagent pas cette vision optimiste :

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« Dans l’ensemble, il est fragile – il est vraiment fragile au Québec», a déclaré le sondeur Jean-Marc Léger au sujet de l’appui du NPD, qui, a t-il ajouté, semblait être plus fort au début de la campagne. «…Il est devenu de plus en plus difficile pour [Mulcair] de se connecter avec les Québécois. … Il a été trop fort, trop tôt.»

Selon le journal d’Ottawa Hill Times, qui a mené son propre sondage, il est particulièrement frappant de voir la taille du vote non-engagé au Québec, où 22 pour cent sont indécis et 11 pour cent disaient qu’ils ne voteront pas, ou choisissaient « aucune de ces réponses » lors d’un sondage téléphonique.

D’après cet hebdo, tout en étant situé dans le peloton de tête, le NPD ne reçoit l’appui que de 23 électeurs québécois sur 100. Il y aurait ainsi un énorme potentiel de changement spectaculaire au Québec.

Les chroniqueurs, dans les journaux, abondent dans le même sens que Stephen Harper et Gilles Duceppe.

Denise Bombardier, dans le Journal de Montréal du 19 septembre demande comment les choses se passeraient si c’étaient les hommes qui étaient obligés de porter la burqa :

«Que diraient messieurs Trudeau, Mulcair et Couillard, si enclins à la tolérance et au respect de lois votées dans le passé … si c’était leur propre sexe qui subissait cette inégalité à cause d’une culture ancestrale qui prend sa source dans la peur panique de l’autre sexe…? Le Canada serait donc condamné, en vertu de la Charte, à accepter comme l’expression de la liberté individuelle, cette pratique culturelle aliénante débarquée dans la modernité ?»

Selon Mathieu Bock Côté (Journal de Montréal 24 septembre), le NPD de Thomas Mulcair « s’est clairement tiré dans le pied en faisant du droit de porter son niqab au moment de prêter son serment de citoyenneté un droit fondamental. Bien des électeurs (au Québec) qui voulaient lui donner sa chance ont alors découvert un parti converti à l’intégrisme multiculturaliste et manifestement incapable d’imposer quelques balises que ce soit devant des revendications fanatiques qui témoignent d’un manque de respect flagrant de la société d’accueil. »

Lise Ravary dans le Journal de Montréal du 25 septembre écrivait :

«Je suis contre le port du niqab en public au Canada, pas seulement au moment de voter ou de prêter serment.
Dans un pays libre et démocratique, les citoyens, ce qui comprend aussi les manifestants, ne se promènent pas dans la rue le visage dissimulé. C’est aussi une question de sécurité …

Dans notre société, se cacher le visage signifie qu’il y a intention criminelle. Le Canada se définit comme un pays multiculturel. La cohabitation pacifique de tous ces gens venus d’ailleurs fait partie de l’essence de l’âme canadienne.

…Selon la Cour européenne, dissimuler son visage peut être considéré comme portant atteinte au droit d’autrui d’évoluer dans un espace de sociabilité facilitant la vie ensemble.

… Culturel ou religieux, le niqab ? C’est sans importance car ce n’est pas à nous de décider de la validité des croyances religieuses d’autrui mais le niqab est un refus explicite non seulement du vivre ensemble mais aussi des us et coutumes qui nous définissent. »

Un lecteur du journal Le Devoir a la phrase juste :

« … On se demande pourquoi Mulcair préfère plaire à des extrémistes religieux plutôt qu’à 90% des Québécois.»

Les sondages sont éloquents. Mulcair prend les Québécois pour acquis et il a tort !

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

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