Publié par Alain Rubin le 8 juin 2016

À l’attention de Monsieur Eric Fait

Unesco, 7, place de Fontenoy

75352 Paris 07 SP

Objet : effacement du passé du peuple juif

Copie à madame Bokova

Copie à l’Ambassadeur Klarsfeld

Monsieur,

Je voudrai tout d’abord transmettre à madame Bokova mes sincères remerciements pour l’intérêt qu’elle porte à nos questionnements.

Je note, avec intérêt, les partenariats que l’Unesco a établi avec le Centre Peres pour la paix, faisant suite à l’exposition organisée par le centre Simon Wiesenthal, l’inscription des sites de Massada et Bet Shearim, la mission confiée à monsieur l’ambassadeur Serge Klarsfeld pour l’enseignement de l’Histoire de la shoah (l’extermination des Juifs, prévue des deux côtés de la Méditerranée, que vous appelez Holocauste).

J’ai bien noté aussi : le fait que l’Unesco entend promouvoir l’éducation préventive combattant les « discours de haine au travers des curricula scolaires ». C’est un gros travail, si l’on a en tête tous les ouvrages utilisés avec les fonds des Nations Unies présentant les Juifs comme une espèce à abattre, partout où on pourra la saisir et par tous les moyens possibles.

Je reste dans une même inquiétude, pour ne pas dire plus, s’agissant de ce que j’ai qualifié de shoah de la mémoire. En effet, qualifier Jérusalem terre sainte des trois religions monothéistes et lieu de dialogue (des juifs, des chrétiens et des musulmans) ne me satisfait que très partiellement.

Je m’explique : cette formule ne répond pas au problème posé par le fait que l’exécutif a aboli les presque deux mille ans d’Histoire du peuple juif avant l’évènement représenté par ce que le coran appelle le « mirajj » puis la conquête armée arabo-musulmane. Elle fait de la question de Jérusalem une question purement confessionnelle, déconnectée de l’Histoire du peuple qui a fait de cette ville le patrimoine moral pour l’humanité toute entière.

Les liens, auxquels votre courrier se réfère, confirment-ils, ou nient-ils : le passé des Hébreux sur cette terre grande comme la Bretagne à laquelle on aurait ajouté le Cotentin ; l’Histoire de la Judée ; celle des groupes de Juifs et de Samaritains qui ont sans cesse marqué le pays ; l’Histoire du Ichouv depuis le 15ème siècle, avec le rachat d’une portion de la Galilée aux Ottomans (à Souleymane-le magnifique) puis les retours successifs à partir des années 1860 à 1890, au 19ème siècle et le rachat, fort cher, de chaque pousse de terre déclinant la volonté du juif de retrouver tout ce dont témoigne son calendrier ?

Je souhaitais, et je souhaite toujours, rencontrer Madame Bokova. Je voulais lui offrir à cette occasion un livre qu’elle a dû lire, que je l’invite à relire : La Guerre Des Juifs*, de Flavius Josèphe.

Je pensais commencer notre entretien en lui rappelant ces évènements, que nient la résolution de l’exécutif de l’Unesco, auxquels Josèphe a consacré 555 pages (dans l’édition de 1977, préfacée par Pierre Vidal-Naquet).

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Je me permettrais, ici, de donner à Madame Bokova, un ou deux courts témoignages de ce contemporain des évènements ; écoutons-le, ce ne sera pas inutile : 

« (…) les magistrats de Jérusalem leur coururent après (après Cumanus, représentant de César, et ses deux escadrons de cavalerie), vêtus de sacs et la tête couverte de cendres ; ils les suppliaient de faire demi-tour et de ne pas provoquer la fureur des Romains contre Jérusalem (…) ; d’avoir pitié de leur patrie et du Temple. » (Livre II.12-237 page 252)

Je voulais inviter Madame Bokova, et tout l’exécutif (enfin ceux qui savent et veulent lire) de l’Unesco à réfléchir à cet autre passage : 

« Tant que Cestius Gallus demeura en Syrie à administrer sa province, personne n’osa lui envoyer une délégation pour accuser Florus. Mais, quand il se rendit à Jérusalem à l’occasion de la fête des Azymes (une fête palestinienne, sans rapport avec le peuple des Juifs, la fête des Azymes ?), le peuple se pressa autour de lui. Il n’y avait pas loin de trois millions de personnes qui le suppliaient de prendre en pitié les malheurs de leur nation (…) (idem page 256-257, II. 280).

Ces supplications se rapportent à un tragique et meurtrier évènement s’étant produit après la mort d’Hérode. Citons encore Josèphe, ce ne sera pas long :

« (…) les calamités recommencèrent pour les Juifs, -écrit-il-. La fête des Azymes avait amené un grand concours de peuple à Jérusalem et la cohorte romaine avait pris position sur le portique du Temple (II.12-223 à 226 page 250)… les Juifs furent pris de panique et ils s’enfuirent du Temple en direction de la ville. Mais, près des sorties, la bousculade fut si forte que, se foulant aux pieds et s’écrasant les uns les autres, ils périrent au nombre de plus de trente mille. La fête se transforma en deuil pour toute la nation, en chant funèbre dans chaque demeure. »

Chaque pierre de la ville, Jérusalem, en hébreu Iroushalaïm ha koddesh (la demeure du Saint), est imprégnée du sang de ces trente mille, comme de celui du presque million qui périra en 70, puis des autres dizaines de mille tués à l’issue de la défaite de Bar Kochba, de celui de Juifs et des Samaritains massacrés par les Byzantins au 6ème siècle, puis leurs descendants exterminés, jusqu’au dernier, avec les arabo-musulmans vaincus par Godefroy de Bouillon…

Il s’agit d’une présence tragique, que vient contrebalancer l’ambiance si particulière de cette ville qui est bien plus qu’une ville : elle est chair et âme d’Israël, depuis que David en a fait sa capitale.

  • L’Unesco va-t-elle sortir de ce que j’ai qualifié- je voudrai que ce soit à tort- de lyssenkisme ?
  • Va-t-elle dire l’Histoire, avec ses méandres et ses contradictions, avec ses obscurités et ses pages sombres qui ne sont le monopole de quiconque ?

Dans l’attente de vous relire et d’un rendez-vous avec Madame Bokova, je vous prie de bien vouloir agréer l’assurance de mes plus respectueuses et cordiales salutations.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Alain Rubin pour Dreuz.info.

Alain Rubin UNESCO page 1

Alain Rubin UNESCO page 2

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