Publié par Guy Millière le 5 juin 2016

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Je suis donc allé au rendez-vous de Béziers. J’y ai parlé. De l’Europe, de la civilisation occidentale et du devenir du monde.

J’y ai écouté ce qui se disait autour de moi. J’y ai rencontré des amis, fait connaissance de gens que je rencontrais fort peu jusque là. J’en ai tiré quelques conclusions. J’en ai tiré quelques observations.

Je tiens à dire d’abord que Robert Ménard est un homme droit et doté d’immenses qualités.

Si fascisme il y a à Béziers, il est chez les islamo-gauchistes qui s’en prennent à Robert Ménard, et pas chez Robert Ménard

Le décrire comme d’« extrême droite » est grotesque et insultant. Il est en train de redresser la ville dont il est le maire. Il est imprégné de valeurs éthiques et conscient qu’au delà de Béziers, c’est de la France qu’il s’agit, et de bien davantage que la France. Le socialisme qui gouverne ce pays suscite un naufrage de plus en plus flagrant et de plus en plus délétère. Ce naufrage porte les couleurs de l’islamo-gauchisme. Robert Ménard pense que redresser la barre est encore possible. Il se bat, avec courage et conviction. C’est un ennemi résolu de toute forme de racisme et d’antisémitisme. C’est un homme aussi éloigné qu’il est possible de l’être, de toute forme d’ « antisionisme ». Ce n’est pas chez lui qu’Alain Finkielkraut se serait fait traiter de « Juif », comme si le mot était une insulte, et ce n’est pas chez lui que quiconque aurait brûlé des drapeaux israéliens. Si fascisme il y a à Béziers, il est chez les islamo-gauchistes qui s’en prennent à Robert Ménard, et pas chez Robert Ménard. Je n’ai, par ailleurs, pas vu chez lui de manœuvre politique, et il a pris soin de dire qu’il ne roulait pour personne.

Je pense utile d’ajouter que ce qui a prédominé à Béziers, où ce qui a pris place relevait globalement d’une forme d’embryon d’états généraux de la droite, a été l’esprit d’ouverture et de tolérance : des positions diverses, très diverses, ont pu s’exprimer, et s’il y eut quelques moments houleux, ce qui a prédominé a été l’écoute mutuelle.

Marine Le Pen elle-même a été critiquée en raison de ses dérives marxisantes en matière d’économie

Je pense utile de préciser que si un sentiment global a prédominé chez les gens présents, il a été celui de la déception vis-à-vis des dirigeants politiques censés incarner la droite. Jacques Chirac a été décrit, plus souvent qu’à son tour, comme l’un des grands responsables du naufrage. Nicolas Sarkozy a été présenté, de façon récurrente, comme un opportuniste velléitaire et décevant, Alain Juppé comme un disciple de Jacques Chirac, avec tout ce que cela implique de négatif, et Marine Le Pen elle-même a été critiquée en raison de ses dérives marxisantes en matière d’économie. Je partage ce sentiment de déception.

Je dois maintenant passer aux idées et là, si la coupe n’est pas entièrement vide, je ne puis me convaincre qu’elle est, même, à moitié pleine.

Il est clair que les principes élémentaires de l’économie de marché et d’entreprise sont mal compris de nombre de gens qui, tout en se disant de droite, se placent intellectuellement sous l’ombre portée de la gauche, et les gens présents à Béziers n’ont pas fait exception.

L’incompréhension de l’économie telle qu’elle fonctionne sur la planète touche toute la droite française

La croyance en les potentialités de l’« Etat stratège » n’a cessé de se trouver énoncée. Les propos libéraux venus de Charles Gave, Charles Beigbeder ou de moi-même n’ont guère suscité l’adhésion, sauf lorsqu’a été évoqué le poids des bureaucraties et des réglementations. Même si les candidats des Républicains semblent plus ouverts à de tels propos, la base des Républicains ne l’est, montrent des enquêtes, qu’assez peu, ou de manière très approximative.

L’incompréhension de l’économie telle qu’elle fonctionne sur la planète touche toute la droite française, à des degrés divers, constitue une donnée préoccupante et montre à quel point l’emprise de la gauche sur l’enseignement, les médias et la culture a fait des ravages. Ces ravages à eux seuls suffiraient à me rendre très pessimiste. Ils sont très dommageables.

Il est clair aussi que si les valeurs qui ont fait la fécondité et la grandeur de l’Occident sont chères aux gens de droite, ceux-ci, face aux assauts subis par ces valeurs de la part de la gauche, pensent que le rôle du gouvernement est non seulement de défendre et affirmer ces valeurs, mais aussi de les revivifier et de les réimposer : cette pensée est présente chez nombre de gens qui se disent de droite en France, et elle était très présente à Béziers.

La gauche détraque les sociétés auxquelles elle s’attaque et entraine une intrusion de type totalitaire

La gauche a voulu remodeler la société, pour la détruire, et s’en est prise à la famille, à la patrie, à l’identité nationale. Elle a favorisé l’islamisation du pays et impulsé un relativisme culturel qui n’a pas été tout à fait relatif, puisqu’il a traité judaïsme et christianisme beaucoup plus mal que l’islam. La tentation de vouloir remodeler la société en sens opposé ne peut, en ce contexte, qu’être logique. Il n’en reste pas moins que le rôle d’un gouvernement dans une société libre ne peut pas avoir pour but une politique de remodelage de la société sans que celle-ci cesse d’être libre. La gauche détraque les sociétés auxquelles elle s’attaque et entraine une intrusion, de type totalitaire, de la politique dans des domaines où elle n’a pas à être présente. Elle suscite, par réaction, une volonté d’intrusion inverse. Peut-il exister une rectification des ravages venus de la gauche qui ne passe pas par une intrusion de la politique dans des domaines où elle n’a pas à être présente ? Quand une société est aussi détériorée que la société française la réponse semble être : non.

Le rappel du rôle du gouvernement dans une société libre, et le rappel de ce qu’est une société libre ont été absents à Béziers, tout comme le rappel de ce qu’est un Etat de droit digne de ce nom. Ces rappels sont, très largement, absents au sein de la droite française. Cela me semble dommageable.

Il est clair, enfin, qu’en termes de politique étrangère et de vision du monde, les effets du discours de gauche ambiant ont un impact à droite. Le danger que constitue l’islam est clairement perçu par les gens de droite, et ceux présents à Béziers l’ont exprimé sans circonlocutions, souvent avec moins de circonlocutions qu’au sein de la droite française en général.

une incompréhension de l’évolution géopolitique du monde, du rôle et du statut des Etats-Unis dans cette évolution géopolitique, et du rôle et du statut de la Russie

Nombre de gens présents à Béziers ont tenu, par ailleurs, des discours anti-américains qui ont pu paraître imprégnés des vieilles diatribes « anti-impérialistes », ou des discours ressentimentaux inhérents au gaullisme : ces discours sont, hélas, assez fréquents au sein de la droite française, pas seulement à Béziers. Les discours anti-américains sont allés de pair avec des discours pro-russes qui paraissaient venir du même « anti-impérialisme » et des mêmes discours ressentimentaux inhérents au gaullisme. Ces discours laissaient voir une incompréhension de l’évolution géopolitique du monde, du rôle et du statut des Etats-Unis dans cette évolution géopolitique, et du rôle et du statut de la Russie dans cette même évolution géopolitique. Ces discours laissaient voir tout à la fois une méconnaissance presque totale de ce que sont les Etats Unis et la Russie, et une méconnaissance presque totale aussi de la géopolitique contemporaine. Ces méconnaissances sont quasiment omniprésentes dans la société française où la gauche a semé la confusion et broyé les repères. Elles sont, hélas, quasiment omniprésentes au sein de la droite française elle-même qui, sur ce plan, est dans un brouillard aussi épais que celui dans lequel se trouve la gauche. Si la gauche se complait dans le brouillard, car elle propage la confusion et entend effacer les différences entre liberté et servitude pour mieux asseoir son emprise, la droite ne peut se complaire dans le même brouillard sans s’égarer.

L’égarement était présent à Béziers. Il est présent dans toute la droite française. L’égarement était présent aussi dans l’illusion, souvent énoncée à Béziers, que la France toute seule, repliée sur elle-même, pourrait peser sur le devenir du monde. Cela me semble regrettable.

En ce contexte, les propositions qui ont émané du rendez-vous de Béziers ont pu, parfois aller dans la bonne direction, parfois laisser nettement à désirer.

Les meilleures propositions ont montré, par delà l’incompréhension de l’économie telle qu’elle fonctionne, une volonté de surmonter les scléroses et l’asphyxie ambiantes, et, aussi, une volonté d’abolir quelques uns des éléments essentiels du remodelage destructeur entrepris par la gauche.

Entrent dans cette catégorie,

  • l’affirmation de la nécessité de mettre fin au statut de fonctionnaire et de simplifier radicalement les normes administratives,
  • l’affirmation de la nécessité de remplacer le principe de précaution par le principe d’expérimentation,
  • l’affirmation de la nécessité d’abolir les trente cinq heures et le financement public des centrales syndicales,
  • d’en finir avec les zones de non droit,
  • de mettre en place une liberté de choisir l’établissement scolaire de ses enfants,
  • et d’abroger la loi autorisant le mariage homosexuel.

Entrent dans cette catégorie aussi les mesures destinées à freiner (un peu) l’islamisation du pays : moratoire sur les constructions et agrandissements de mosquées, limitation des naturalisations aux cas d’assimilation.

D’autres propositions sont plus préoccupantes, parce que porteuses de ce que j’ai défini ici comme dommageable, ou regrettable :

  • ainsi, celles s’en prenant aux grandes surfaces ou au traité de libre échange transatlantique, qui ignorent les vertus de la concurrence économique et du libre échange, et prétendent répondre à la destruction du dynamisme économique en France par des mesures détruisant davantage le dynamisme économique,
  • celle affirmant la « supériorité du politique sur le juridique », qui tourne résolument le dos à ce qui pourrait faire de la France une société plus libre, plus proche de l’Etat de droit et plus à même de rétablir une séparation et un équilibre des pouvoirs,
  • celle encore demandant la sortie de la France de l’Otan, qui vient à l’évidence directement d’un anti-américanisme très primaire et qui, au vu de la faiblesse de l’armée française, placerait la France hors de toute structure de défense digne de ce nom, avec toutes les conséquences susceptibles de découler.

Une telle proposition, si elle était mise en oeuvre, ne déplairait pas à la Russie poutinienne, c’est une évidence, et servirait le projet eurasien tel que conçu par Alexandre Douguine, projet assez nettement socialiste et peu démocratique.

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Lors de mon intervention, j’ai souligné la nécessité impérative de reprendre le travail des idées en partant des fondements.

Il est crucial que les gens de droite réapprennent les idées de base de l‘économie de marché, de libre concurrence et de libre entreprise, parce que c’est sur la base de ces idées que la prospérité, partout sur terre, a pu prendre son essor

Je pense plus que jamais que seule une reprise du travail des idées en partant des fondements serait impérative.

Je pense que sans cette reprise du travail des idées, aucun redressement d’ensemble ne sera possible ou, simplement, envisageable.

Il est crucial que les gens de droite en France réapprennent les idées de base de l‘économie de marché, de libre concurrence et de libre entreprise, parce que c’est sur la base de ces idées que la prospérité, partout sur terre, a pu prendre son essor. Le retour au dynamisme économique n’est pas concevable sans cela.

Il est crucial que les gens de droite en France se ressourcent dans la philosophie du droit et discernent que la France n’a jamais été un Etat de droit jusqu’à présent, et que seul un Etat de droit peut offrir les garanties de stabilité et de liberté requises pour que la société française sorte de l’errance titubante qui la marque et du socialisme qui la broie.

Il est crucial que les gens de droite voient que ce qui est en jeu aujourd’hui est la survie, bien au delà de la France, de la civilisation occidentale tout entière, que la France ne peut avoir un avenir qu’en se considérant partie intégrante de la civilisation occidentale, et en se penchant sur l’histoire des cultures : malgré les années Obama, les Etats Unis ne sont pas un ennemi de la civilisation occidentale, mais constituent au contraire, jusqu’à ce jour, le cœur vivant de celle-ci. La Russie n’a pas été et n’est toujours pas une puissance de liberté. Elle reste un pays porteur de déficits très nets en matière de dynamisme économique et en matière de droit. Que la Russie puisse s’arrimer à la civilisation occidentale n’est, dans le moyen terme, pas impensable. Que la France et l’Europe s’arriment à la Russie et la prennent pour phare impliquerait une accentuation du naufrage qui se dessine.

Il serait crucial aussi que les gens de droite regardent en face la construction européenne : celle-ci n’est aucunement libérale, comme je l’entends dire trop souvent. Elle est la mise en place d’un absolutisme technocratique et d’un Etat administratif qui anéantit peu à peu le droit, la démocratie, la liberté de choix, la liberté d’entreprendre, les identités nationales. Elle est constructiviste au sens que Friedrich Hayek donnait à ce terme. Elle joue un rôle majeur dans le naufrage qui se dessine. Elle se brisera, tôt ou tard. Dans ses décombres, il importera de trouver des moyens de rebâtir, non pas en se repliant sur des pays trop petits et trop affaiblis,  mais en nouant des alliances et en se tournant vers ce qui se trouve peu à peu anéanti aujourd’hui. Précisément : le droit, la démocratie, la liberté de choix, la liberté d’entreprendre, les identités nationales.

Le travail des idées doit précisément préserver ce qui se trouve peu à peu anéanti aujourd’hui. C’est impératif.

L’alternative est trop sombre pour que je l’évoque ici. On sait que les civilisations sont mortelles. Il m’arrive de craindre que la France et le reste de l’Europe en soient à l’agonie.

J’ai trouvé à Béziers des gens partageant mes craintes et souhaitant un sursaut.

Je pense que sans travail des idées, le sursaut n’aura pas lieu.

L’initiative a été excellente. Ce qui doit suivre l’initiative reste à venir.

Savoir si ce qui reste à venir éventuellement viendra avant qu’il ne soit trop tard est une autre question.

Est-il trop tard ?

Je sais, tout juste, qu’il est très tard, et que je reste pessimiste.

Je sais, en tout cas, que ce n’est pas avec l’élection présidentielle de 2017 que ce qui reste éventuellement à venir viendra.

Pour l’heure, aucun programme, et aucun candidat, n’est à la hauteur. C’est triste, mais c’est ainsi.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

PS. Je n’ai rien dit des comptes rendus du rendez-vous de Béziers parus dans la grande presse : en dehors de Valeurs Actuelles, qui était associé à l’événement, et pour partie, du Figaro, on a pu voir une fois de plus que les journalistes français sont aussi bien dressés que les chiens d’Ivan Petrovitch Pavlov : chez ces gens là, on ne réfléchit pas, on éructe.

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