Publié par Jean-Patrick Grumberg le 25 novembre 2016

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J’ai reçu de nombreux témoignages de touristes israéliens se plaignant d’avoir été victimes de discrimination par les agents de sécurité des aéroports de Paris. J’ai voulu vérifier par moi-même. Je n’ai pas été déçu du voyage…

Aéroport de Paris Orly. J’arrive à la sécurité. Je regarde de très loin le flot des passagers et j’observe : les gens présentent leurs passeport et carte d’embarquement et l’agent de sécurité les fait entrer dans la zone de contrôle des bagages. Tous.

Une cinquantaine de personnes sont passées. Je me dis que c’est le moment de commencer mon test. Je sors mon passeport israélien.

L’agent porte une barbe, courte, il a un fort accent arabe. A l’instant où il voit mon passeport, il le prend, et s’en va. Un autre agent me demande de me mettre sur le côté pour laisser les autres passer — parce que les autres ne sont pas arrêtés.

Même si cela correspond aux témoignages qui m’ont été rapportés, où les agents d’Aéroport de Paris, dès qu’ils voient un passeport israélien, isolent leurs porteurs, je veux leur donner le bénéfice du doute. Je veux penser qu’il s’agit d’une coïncidence, et que cela n’a rien à voir avec mon passeport israélien, même si je suis la seule personne ainsi contrôlée.

L’agent qui a pris mon passeport s’installe à une table et recopie sur une feuille de papier les informations de mon passeport. Je ne suis pas sûr que ce soit très légal. Il est maintenant en possession de mon nom, de mon numéro de passeport et de mon adresse personnelle. Ce détail est plus que louche. Là, je commence à décocher la case coïncidence.

Je me dis que soit la direction d’Aéroport de Paris n’est pas en charge des procédures, qui sont décidées par des gens qui n’aiment pas beaucoup les Israéliens, soit qu’Aéroport de Paris ne sait pas ce qu’il se passe dans ses murs. Ou qu’il s’en désintéresse.

Je me dis que si cet agent barbu à l’accent arabe peut librement noter le nom et l’adresse d’un Israélien sur un bout de papier, c’est qu’il sait qu’il ne risque aucune sanction.

Je me dis que ceux à qui il remet chaque jour des noms et adresses d’Israéliens dont il constitue la liste ne doivent pas la conserver pour leur envoyer des roses par Interflora.

Je me dis que les réseaux islamistes sont bien organisés, aux aéroports de Paris.

Au bout de quelques minutes, l’agent revient et me demande de le suivre. Il a toujours mon passeport en main.

Il m’emmène vers un collègue, lui fait un signe. L’autre a compris. Il me fait retirer mes chaussures — je suis le seul passager à qui l’on demande de retirer ses chaussures. Il passe mes bagages dans la machine à rayon, je passe sous le portique, qui ne sonne pas, mais pourtant, un autre agent m’attend et me fait une fouille archi-complète. Puis il applique un tampon sur mes vêtements, mes mains, ma taille, et le place dans un appareil.

Au bout de quelques instants, comme évidemment rien n’a bipé, il m’envoie vers un autre agent…

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Celui-ci commence la fouille totale de mes bagages. J’ai déjà eu une fouille totale de mes bagages. Jamais à ce point. Il ouvre mon ordinateur, le badigeonne avec le même tampon qui a été utilisé sur moi précédemment. Il ouvre mon sac, ouvre chaque pochette, sort tout le contenu, le vérifie, le remet.

L’appareil où le tampon a été apporté ne bipe toujours pas, évidemment.

Puis il s’attaque à ma valise…

Il sort tout, regarde tout, soulève tout, inspecte tout, ouvre tout, et passe son tampon partout, qu’il envoie vers la machine, qui ne bipe toujours pas.

La comédie dure bien 15 minutes.

Pendant ce temps, trois passagers me rejoignent dans cette zone. Ils parlent hébreu avec un accent russe. Ils commencent à subir le même traitement. Nous sommes quatre dans cette zone où l’on contrôle le contenu des bagages. Quatre Israéliens. Ce n’est plus une coïncidence. Pendant tout le temps que durera la fouille, aucun autre passager que ces trois Israéliens et moi-même ne sera contrôlé.

Je peux témoigner.

La discrimination raciale et antisémite à l’aéroport de Paris Orly n’est pas un mythe, je l’ai vécue. Elle n’est pas nouvelle, j’ai reçu de nombreux témoignages de personnes qui ont subi le même traitement quand ils ont présenté leur passeport israélien.

Je n’ai pas été surpris que l’agent qui m’a isolé des autres passagers en voyant mon passeport israélien soit barbu à l’accent arabe, c’est là encore conforme aux témoignages que j’ai reçus.

Je me dis que si les associations antiracistes étaient vraiment des associations antiracistes, si elles étaient vraiment révoltées contre les contrôles au faciès, elles seraient révoltées contre tous les contrôles arbitraires, et pas seulement ceux des minorités visibles.

Je me dis qu’il existe un quart de chance sur un trillion qu’une association antiraciste enquête contre des musulmans dans une histoire de discrimination contre des touristes israéliens.

Je suis dans la salle d’attente. Je vais bientôt embarquer. Je n’ai pas été victime de discrimination à l’aéroport de Zurich, de Londres, de New York, de Milan, de Los Angeles, ni de Genève.

Je me dis que la France n’est plus le pays des droits de l’homme.

Je me dis que tout le monde s’en fout, en France. Je me dis pauvre France.

Je me dis que j’ai quitté la France voilà de nombreuses années parce que j’ai un appétit de liberté qu’elle n’offre pas à ces citoyens. Je me dis que je ne me suis pas trompé.

Je me dis que je suis bien content de retourner chez moi à Los Angeles, retrouver la vraie liberté.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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