Publié par Magali Marc le 19 décembre 2016

Que pourra faire le Président Trump qui a dénoncé avec véhémence en campagne électorale l’accord sur le nucléaire avec l’Iran ? Pendant que les gauchistes dans les médias de masse s’évertuent à faire passer Trump pour un clown ou pour un fasciste à la solde de Poutine, des gens sérieux tentent d’évaluer les options qui s’offrent à lui.

Pour mieux comprendre cette situation, j’ai traduit pour les lecteurs de Dreuz ce texte de l’excellent Brigadier général de Réserve, Yossi Kuperwasser*, paru le 7 décembre dernier sur le site du Jerusalem Center for Public Affairs.

La décision éventuelle de Trump concernant l’Iran sera cruciale

– Par le Brigadier-Général (Rés.) Yossi Kuperwasser

Au cours de sa campagne électorale, Donald Trump a affirmé qu’immédiatement après son entrée à la Maison-Blanche, il renégocierait le « désastreux » et « horrible » accord nucléaire avec l’Iran. (Le vice-président élu Mike Pence a aussi appelé à « déchirer l’accord avec l’Iran » pendant la campagne électorale.)

Depuis les élections M. Trump n’a pas abordé la question, et beaucoup croient qu’il peut changer sa position – pour paraphraser les leaders israéliens, ce que vous voyez des politiciens au pouvoir est différent de ce que vous entendez lors des campagnes électorales.

Le président élu a, en fait, trois options :

Première option

Il peut ne pas toucher à l’accord, mais intensifier les efforts pour vérifier que l’Iran le respecte (obtenir de meilleurs renseignements des services secrets, montrer une plus grande fermeté face aux tentatives des Iraniens de tester la détermination des Américains).

Parmi ceux qui appuient cette option, on trouve d’une part ceux qui pensent que l’accord est ce que l’on pouvait obtenir de mieux (certains croient même qu’il empêchera l’Iran de se doter éventuellement d’armes nucléaires). Du point de vue de ce camp, en rouvrant l’accord, les États-Unis remettraient en question l’unité internationale qui le rendait possible, en particulier à un moment où les Européens, les Russes et les Chinois recréent des liens économiques avec l’Iran.

D’autre part, les partisans incluent également ceux qui soutiennent qu’une supervision accrue permettrait de mettre en lumière les violations iraniennes de l’accord. Ce qui aurait pour effet de justifier un renouvellement des sanctions, sans que les États-Unis soient les premiers à renier l’accord.

Deuxième option

Ne pas toucher à l’accord, mais ajouter des sanctions sur les questions non reliées au nucléaire.

Dans ce cas de figure, les objectifs consisteraient à entraver les efforts de l’Iran à développer des missiles à longue portée et à limiter sa tendance à exploiter la promotion de l’accord par l’administration Obama pour élargir sa propre influence dans la région (certains préconisent des sanctions supplémentaires visant le soutien de l’Iran au terrorisme et ses violations des droits de l’homme).

Selon ce scénario, les Iraniens devraient freiner leurs activités problématiques. Les chances augmenteraient de voir l’Iran réagir avec colère et violer l’accord nucléaire, permettant alors aux États-Unis, à leur tour, de le renier sans qu’on puisse les tenir pour responsables de son effondrement.

Troisième option

Exiger de l’Iran que l’accord soit rouvert pour discussion.

Légalement parlant, ce n’est pas difficile dû au fait que l’engagement des États-Unis envers le JCPOA (Joint Comprehensive Plan of Action) était fondé sur un décret présidentiel. Du point de vue des États-Unis, le plan n’est pas devenu un traité international (d’ailleurs, aucune des parties ne l’a signé).

Le nouveau Président pourrait annoncer que si l’Iran refuse de rouvrir l’accord pour discussion, Washington renoncera au décret et réappliquera les sanctions secondaires (dont certaines n’ont de toute façon jamais été annulées, mais seulement suspendues, le Congrès ayant récemment décidé de les prolonger pendant encore 10 ans).

Cela signifie que les États-Unis gèleraient leurs liens économiques avec toutes les entités faisant affaire avec l’Iran ; les entreprises et les banques européennes réagiraient en mettant fin à ce commerce.

Selon cette approche, l’accord est considéré comme tellement dangereux pour la sécurité internationale que les propositions précédentes impliquent un risque très élevé et inacceptable que l’Iran adhère strictement à l’accord en dépit des pressions, car il promet à l’Iran la capacité de produire un arsenal d’armes nucléaires de grande envergure d’ici 9 à 14 ans.

Une telle démarche pourrait susciter des discussions acerbes avec les Européens, la Russie et la Chine, et alimenter les tensions et même une escalade vers l’Iran, qui pourrait alors renier l’accord et tenter de se doter d’armes nucléaires.

Une attitude ferme de la part de la nouvelle Administration, cependant, dissuaderait certainement les Iraniens. À l’heure actuelle, leurs possibilités de se doter d’armes nucléaires sont nettement moins bonnes qu’avant l’accord (sur ce point, les partisans et les opposants de l’accord s’entendent).

“Le pire accord jamais négocié”

Que fera Trump ?

Apparemment, la meilleure option de son point de vue est d’exiger une renégociation de l’accord, qu’il a appelé – à mon avis, de façon tout à fait justifiée – «le pire accord jamais négocié» qui pourrait conduire «à un holocauste nucléaire».

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Un tel choix s’apparente probablement à d’autres aspects de son approche de la politique étrangère en général et du Moyen-Orient en particulier.

Obama, pour sa part, lors des négociations avec l’Iran, n’a pas utilisé la puissance des États-Unis comme un levier.

Au lieu de cela, il a traité les extrémistes islamiques réalistes comme des partenaires favoris.

Dans cette catégorie, on retrouve autant Rouhani et son camp dans le monde chiite que les Frères musulmans parmi les sunnites.

Ces acteurs ne cherchent pas un conflit direct avec l’Occident à ce stade-ci. Ils aspirent plutôt à changer l’ordre mondial une fois qu’il leur sera possible de le faire (par exemple après s’être doté d’armes nucléaires).

Pour l’instant, ils veulent éviter une confrontation à tout prix.

Trump, contrairement à Obama, vise à renforcer les liens avec les alliés naturels des États-Unis, à savoir Israël et les États pragmatiques arabes – en particulier l’Égypte, l’Arabie saoudite et la Jordanie. Il veut aussi éviter les frictions inutiles avec la Russie.

Il est cependant prêt à défendre les intérêts vitaux des États-Unis (empêcher la nucléarisation de l’Iran et restreindre ses actions dans la région) et ainsi démontrer que les États-Unis sont en fait une superpuissance (ce que signifie le slogan “Make America Great Again” dans ce contexte).

Ses nominations jusqu’à présent à des postes clés de son administration renforcent l’impression qu’il choisira la troisième option, et certainement pas la première.

Les pourparlers entre la nouvelle Administration et Israël, mis en lumière par la rencontre prévue entre Trump et Nétanyahou en février, se concentreront sur l’analyse de ces options et la clarification de la position israélienne. La décision de Trump sera toutefois prise sur la base d’intérêts américains, et non israéliens.

Pendant ce temps, l’Iran travaille dur pour tirer le meilleur parti des derniers jours du mandat d’Obama, notamment en finalisant rapidement les accords internationaux visant à réhabiliter son industrie pétrolière.

L’Iran a également augmenté son aide en vue de la prise de contrôle d’Alep par les partisans d’Assad et, apparemment, a intensifié ses livraisons d’armes au Hezbollah, ce qui oblige Israël à agir afin de les arrêter. »

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

* Le Brigadier-Général (Rés.) Yossi Kuperwasser est directeur du “Project on Regional Middle East Developments” au Jerusalem Center. Il était auparavant Directeur général du ministère israélien des Affaires stratégiques et chef de la Division de la Recherche du renseignement militaire de l’armée israélienne. Il est aussi l’auteur du fameux Rapport gouvernemental israélien sur l’affaire Al-Dura, le premier rapport officiel à ce sujet, qui a été publié en 2013, et a été salué par Philippe Karsenty qui se bat depuis 16 ans pour faire jaillir la vérité sur le mensonge de France 2 et de Charles Enderlin sur l’affaire Al-Dura.

 

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