Publié par Ftouh Souhail le 4 avril 2017

Début avril 2017, l’ancien Président de Tunisie donnait une conférence à Montréal, s’inscrivant dans une tournée au Québec.

Le thème était « Transitions démocratiques dans le monde arabe. »

Mr Marzouki a parlé savamment, évoquant notamment les différences avec les autres pays arabes qui expliquent des résultats bien différents, tragiques pour la Syrie, le Yémen, la Libye, mais restant positifs selon lui pour la Tunisie avec une « démocratie fragile ».

Puis, cet ancien professeur de médecine, militant des droits de l’homme de longue date, et toujours homme politique actif, puisqu’il vient de fonder un nouveau parti, « Mouvement de la Volonté du Peuple » résolument ancré dans l’opposition à un gouvernement actuel qu’il accuse de corruption, a répondu aux questions du public à l’Auditorium de BAnQ Vieux-Montréal.

Répondant à une question sur les droits des minorités dans son pays, notamment l’interdiction pour les juifs de se présenter au niveau gouvernemental (selon la nouvelle Constitution de 2014), la prohibition de l’utilisation de la langue berbère dans les écoles publiques et l’absence d’une législation contre la discrimination des noirs, Mr Marzouki a répondu :

« C’est la loi de la majorité, nous sommes à 99,99 % arabo-musulmans, les juifs, Berbères, noirs et machins doivent accepter les choix de la majorité arabe.»

Il a justifié la négation officielle et constitutionnelle du fait amazigh, de l’arabisation et de l’exclusion des juifs de la sphère politique car selon lui, la population du pays est à 99,99 % arabo-islamique.

 

Pourtant, des dizaines de milliers de citoyens se sentent étrangers dans leur propre pays car l’État tunisien refuse de consacrer une partie des programmes scolaires ou de ses médias (radio et télévision) à la langue et la culture juive et berbère.

 

Les noirs en Tunisie sont confrontés à un racisme intolérable, notamment au sud du pays. Dans un déni institutionnalisé, le racisme anti-noir reste impuni en Tunisie, un pays qui prétend avoir donné à l’Afrique son nom antique romain Africa (ou Ifriquia en arabe).

 

 

Il est regrettable que cet ancien défenseur des droits de l’homme refuse l’élimination de ces discriminations.

Tout comme les juifs, les noirs et les Berbères de Tunisie, même si numériquement très peu nombreux, subissent diverses discriminations qui les menacent jusqu’à leur existence et leur culture.

Bien que les Arabes ont su imposer leur langue en Tunisie (1), ainsi que leur religion, cette affirmation de l’ancien président que « nous sommes à 99,99 % arabo-musulmans » est fausse.

La Tunisie, avant d’être arabe, a été successivement

  • Phénicienne,
  • carthaginoise ou punique,
  • province romaine,
  • chrétienne, siège de l’Église d’Afrique.
  • Elle est ensuite passée sous domination vandale, puis byzantine pour être enfin conquise par les Arabes (2).

Cela conduit à affirmer que les Tunisiens, bien avant d’être arabes, sont méditerranéens (3).

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Ftouh Souhail pour Dreuz.info.

(1) Gilbert Granguillaume, Arabisation et politique linguistique au Maghreb, Maisonneuve & Larose, Paris, 1983.

(2) Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères, Geuthner, Paris, 1999.

(3) Charles-André JULIEN, Histoire de l’Afrique du Nord, Payot, Paris, 1931

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